Le gouvernement de Pedro Sánchez a officialisé hier un embargo juridique sur l’industrie de défense israélienne, en annulant des contrats d’armement et en interdisant de nouveaux accords. Mais derrière l’annonce politique, des experts soulignent une réalité embarrassante : la dépendance structurelle de l’armée espagnole aux technologies israéliennes, des missiles aux avions d’entraînement, rend l’application de cette rupture quasi impossible.
Un embargo inscrit dans la loi
Le décret royal adopté à Madrid annule des contrats déjà signés et interdit tout nouveau partenariat avec Israël. Le Premier ministre Sánchez a justifié la mesure en affirmant vouloir « stopper le génocide à Gaza ». L’Espagne avait déjà annulé pour 700 millions d’euros d’achats de lance-roquettes et près de 300 millions d’euros de missiles antichars fabriqués sous licence israélienne. Le texte laisse cependant une « porte de sortie » en cas d’« intérêt national exceptionnel ».
Une dépendance stratégique avérée
Derrière la rhétorique politique, les militaires espagnols admettent un dilemme. Les forces terrestres, la marine et l’aviation utilisent depuis des décennies des systèmes développés ou modernisés par Israël. Les vieux chasseurs F-5, essentiels pour la formation des pilotes, ne volent que grâce à la maintenance assurée par l’Israel Aerospace Industries (IAI). Sans ce soutien, leur mise à la retraite deviendrait inévitable.
« Une chose est la volonté politique de rompre, une autre est la réalité », a confié un haut gradé à l’AFP.
Des alternatives coûteuses et limitées
La ministre de la Défense Margarita Robles assure que « l’industrie espagnole et européenne remplacera ce qui vient d’Israël ». Mais les experts sont sceptiques. Félix Arteaga, chercheur à l’Institut royal Elcano, avertit : « Il n’existe pas aujourd’hui de technologies espagnoles capables de se substituer immédiatement. Il faudra lancer de longs programmes de recherche et développement ».
Le recours à l’industrie américaine ne ferait que déplacer la dépendance. Quant à la Russie et la Chine, elles sont hors de portée pour un pays membre de l’OTAN.
Israël, un fournisseur irremplaçable
L’avantage israélien tient à l’efficacité de ses systèmes, testés en conditions réelles. « Peu de pays savent protéger leur espace aérien comme Israël », souligne David Khalfa, spécialiste franco-israélien. Dans un contexte où l’OTAN se prépare face à la menace russe en Europe de l’Est, se priver d’un tel savoir-faire relève plus du symbole politique que d’un calcul stratégique.
Une fracture entre morale et sécurité
La position espagnole illustre la tension européenne entre un discours « moral » lié à Gaza et les impératifs sécuritaires. Madrid cherche à s’aligner sur la sensibilité pro-palestinienne d’une partie de son électorat, mais risque de fragiliser ses propres forces armées. Dans une Europe confrontée à la guerre en Ukraine et aux provocations russes, cette posture pourrait coûter cher.
En voulant sanctionner Israël, Sánchez expose son armée à un risque d’impuissance. Car au-delà des slogans, l’ombre de Jérusalem plane sur les blindés espagnols, les avions de chasse et les systèmes de communication. La politique étrangère de Madrid pourrait bien laisser ses soldats sans outils pour défendre leur ciel.
Rédaction francophone Infos Israel News pour l’actualité israélienne
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