« Libération des otages ? Une figures de proue de ces rassemblements révèle que ce n’a jamais été la priorité »

Depuis près de deux ans, la société israélienne est traversée par une plaie béante : celle des otages du 7 octobre, encore retenus dans les tunnels du Hamas à Gaza. Leur sort, fait de souffrances inhumaines, de faim et d’incertitude, est au cœur d’une mobilisation populaire sans précédent. Chaque samedi soir, des milliers d’Israéliens descendent dans la rue pour exiger : « Rendez-les à la maison, à tout prix ! »

Mais un échange récent est venu jeter une lumière crue sur ces manifestations. L’une des figures de proue de ces rassemblements, interrogée publiquement, s’est vu poser une question provocatrice mais révélatrice : « Si le Hamas proposait de libérer tous les otages en échange d’un maintien de Benyamin Netanyahou au pouvoir pendant cinq ans supplémentaires, accepteriez-vous l’accord ? » Sa réponse fut sans équivoque : « Non ! »

Quand le masque tombe

Cette réponse, lourde de sens, a fait l’effet d’un électrochoc. Car elle expose un paradoxe fondamental. Comment revendiquer que la libération des otages doit se faire « à tout prix », mais refuser un scénario qui garantirait précisément leur retour, sous prétexte que cela consoliderait le pouvoir de Netanyahou ?

L’épisode montre que pour une partie non négligeable des manifestants, le combat n’est pas tant humanitaire que politique. Les pancartes, les slogans, la douleur des familles deviennent des armes dans une lutte visant avant tout à faire tomber le gouvernement en place. Les otages, au lieu d’être l’objet premier de la mobilisation, deviennent un levier émotionnel pour une bataille idéologique.

La fracture israélienne exploitée

Depuis le 7 octobre, l’État hébreu affronte la guerre la plus complexe de son histoire moderne. Tsahal se bat sur plusieurs fronts : Gaza, le Liban sud, la Cisjordanie, sans compter les menaces croissantes de l’Iran. Dans ce contexte, l’unité nationale devrait primer. Pourtant, certains secteurs de la société instrumentalisent la tragédie pour relancer un agenda vieux de plusieurs années : faire tomber Netanyahou, coûte que coûte.

Ce phénomène n’est pas nouveau. Déjà avant la guerre, les manifestations contre la réforme judiciaire avaient révélé une fracture profonde au sein de la société israélienne. La douleur des otages a offert à ces milieux une nouvelle bannière, plus consensuelle, mais qui cache mal un objectif politique inchangé.

Les familles, otages du débat

Il faut le dire sans détour : les familles des captifs vivent un enfer. Leur cri est sincère, leur désespoir authentique. Mais autour d’elles gravitent des groupes militants et des personnalités publiques qui détournent cette cause. Lorsqu’une leader de la contestation déclare qu’elle préférerait voir les otages rester prisonniers plutôt que Netanyahou demeurer au pouvoir, cela signifie que la douleur des familles est instrumentalisée au profit d’une bataille partisane.

En réalité, le Hamas se nourrit de ces divisions. Chaque slogan accusant le gouvernement d’« abandonner les otages » est une victoire psychologique pour les terroristes. Chaque manifestation qui tourne contre Netanyahou plutôt que contre le Hamas renforce l’idée que la société israélienne est prête à s’autodétruire de l’intérieur.

Le jeu dangereux de l’opposition

L’opposition politique en Israël n’ignore pas cet état de fait. Des figures comme Yair Lapid ou Benny Gantz se gardent de critiquer directement les familles, mais laissent prospérer ce climat. Le discours implicite est clair : la libération des otages n’est possible qu’au prix du départ de Netanyahou. En d’autres termes, le Premier ministre est accusé d’être un obstacle plus grand que le Hamas lui-même.

Un tel renversement des responsabilités est choquant. Car les coupables uniques de la situation des otages sont les terroristes qui les détiennent. Mais dans les slogans des manifestations, ce sont Netanyahou et son gouvernement qui deviennent la cible principale, dédouanant presque le Hamas de son crime originel.

Une démocratie fragilisée

Il est bien sûr légitime, dans une démocratie, de critiquer le gouvernement, d’exiger des comptes, et même de manifester. Mais transformer la question des otages en outil pour délégitimer un Premier ministre élu, c’est franchir une ligne rouge. Cela revient à instrumentaliser la vie de citoyens israéliens retenus en enfer pour régler des querelles politiques internes.

Cette dérive n’affaiblit pas seulement le gouvernement, elle fragilise la démocratie israélienne elle-même. Car si le message implicite est que « mieux vaut laisser les otages que laisser Netanyahou », alors l’argument humanitaire n’est qu’un masque. Le véritable objectif est le renversement d’un pouvoir élu par les urnes.

Conclusion : remettre les priorités à l’endroit

L’épisode du refus de compromis a eu le mérite de clarifier les choses. Pour une partie des manifestants, il ne s’agit pas d’arracher les otages aux griffes du Hamas, mais de profiter de leur drame pour en finir avec Netanyahou. Or, dans une démocratie en guerre, cette posture est irresponsable.

La priorité absolue doit rester la sécurité d’Israël, la défaite du Hamas et la libération des captifs. Ceux qui utilisent leur souffrance comme prétexte à un combat partisan oublient l’essentiel : le véritable ennemi n’est pas à Jérusalem, mais dans les tunnels de Gaza.

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