L’un des derniers chapitres d’un exil millénaire : une des dernières Juives du Yémen fait son Aliyah après la mort de son mari

C’est une page de l’histoire juive orientale qui se tourne dans un silence émouvant : Badra Yossef, l’une des dernières Juives du Yémen, a quitté son pays natal pour s’installer définitivement en Israël, mettant fin à une présence bimillénaire de la communauté juive sur les terres de l’antique royaume de Saba.

Son départ a été confirmé ce mercredi matin par une source locale yéménite citée par Kan, la chaîne publique israélienne. Son mari, Yéhia Yossef, considéré comme l’un des derniers chefs de la communauté juive restée au Yémen, est décédé l’an dernier. Depuis, Badra est restée seule, sans protection ni soutien, dans un pays ravagé par la guerre civile, la haine religieuse, et la chasse aux minorités non-musulmanes.

Selon cette source, Badra aurait été escortée discrètement vers l’Éthiopie, où elle a pu rejoindre des membres de sa famille, avant de faire son Aliyah en Israël avec leur assistance.

Un journaliste yéménite, Ali Ibrahim al-Moshki, qui suit de près le sort des communautés marginalisées dans son pays, a confirmé l’information dans une publication Facebook poignante :

« La mort de son mari et ses nombreuses maladies ont poussé sa famille, vivant à l’étranger, à insister pour qu’elle quitte le pays. »

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Un exode discret et une fidélité bouleversante

Le couple vivait à Arhab, au nord de la capitale Sanaa, dans une région tribale où la présence juive s’était effondrée depuis la montée en puissance des Houthis, milice chiite pro-iranienne. Yéhia Yossef, malgré les persécutions et l’insécurité croissante, avait toujours refusé de quitter le Yémen, attaché à sa terre, à sa maison, à sa mémoire.

« Badra et Yéhia faisaient partie de ces Juifs du Yémen qui ont aimé leur patrie malgré tout, et qui ont vécu sur cette terre dans des temps doux comme dans les temps amers », a écrit al-Moshki dans un hommage empreint de dignité.

Mais après sa mort, Badra n’a plus eu la force de rester seule, dans un environnement devenu invivable pour quiconque est porteur d’une identité juive ou israélienne.

La fin d’un monde

Le départ de Badra marque la quasi-extinction d’une communauté qui comptait plus de 50 000 âmes au début du XXe siècle, et qui a été, pendant des siècles, un pilier vivant du judaïsme oriental.

Ceux qui sont partis durant l’Opération Tapis Volant dans les années 1949-1950 avaient gardé espoir que certains résisteraient, préserveraient les traditions, les synagogues, les manuscrits. Mais le nationalisme arabe, les persécutions islamiques, puis la guerre moderne, ont balayé les derniers bastions.

Les quelques dizaines de Juifs qui subsistaient encore au Yémen dans les années 2000 ont presque tous été exfiltrés par les services israéliens ou des organisations juives américaines. Le départ de Badra Yossef est un symbole : le Yémen juif a cessé d’exister.

Une communauté, un sacrifice, un silence

Le silence autour de cette exfiltration est à la fois stratégique et tragique. Les Houthis, soutenus par l’Iran, considèrent les Juifs comme des ennemis absolus. Ils ont saccagé des synagogues, confisqué des biens, et même expulsé les derniers fidèles restés à Rayda et Sanaa. Israël n’a pas voulu commenter officiellement ce transfert, afin de ne pas compromettre les réseaux encore actifs sur place.

Mais pour les Israéliens d’origine yéménite – nombreux à Netanya, Rosh HaAyin, Rehovot et Bnei Brak – cette nouvelle suscite des larmes et une gratitude mêlée de colère. Des associations comme Torat HaTeiman ou Shavei Israel réclament depuis des années que les autorités facilitent le sauvetage des derniers Juifs pris en otage dans des pays hostiles.

Un legs à honorer

Aujourd’hui, Badra Yossef vit en Israël, probablement entourée de ses proches, dans un pays qui reste la seule terre d’accueil pour ceux qui ont survécu aux persécutions. Son histoire rappelle celle des derniers Juifs d’Alep, de Bagdad, de Téhéran — autant de témoins d’un monde juif oriental disparu, mais dont les voix continuent à résonner à travers leurs enfants, leurs chants, leur courage.

Que le peuple d’Israël se souvienne de Badra et Yéhia.
Que leur fidélité soit notre fierté.
Et que leur maison désormais soit la nôtre, en Eretz Israël.

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