« Ma mÚre ne sait pas que je suis ici » : Le journaliste Yoav Limor avec les combattants à Gaza

Dans la cour d’une des maisons d’un quartier de Gaza se trouve un scooter. Elle est arrivĂ©e ici le 7 octobre, dans le cadre de la campagne de pillage menĂ©e par les habitants de Gaza dans les kibboutzim.  « Nous la ramĂšnerons Ă  la maison « dit l’un des commandants.

Le scooter appartient probablement Ă  l’un des habitants de Nahal Oz. De cette zone sont venus les terroristes qui ont attaquĂ© le kibboutz et l’avant-poste voisin, suivis par la foule qui s’est jointe Ă  la campagne de destruction et de pillage. Aucun des pilleurs n’est ici actuellement : le quartier est vide de population et seules les forces de Tsahal y opĂšrent dans le cadre de la force dirigĂ©e par la 36e Division, chargĂ©e de diviser la bande de Gaza entre la ville de Gaza et la partie sud du territoire.

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Vendredi, le journaliste Yoav Limor de Israel Hayom a rejoint les forces de Tsahal opérant dans la zone :

 » PrĂšs de la barriĂšre de Gaza (ou ce qu’il en reste), nous avons rencontrĂ© le colonel Israel Friedler, gĂ©nĂ©ral de brigade. AprĂšs un bref briefing, nous sommes entrĂ©s dans le namer protĂ©gĂ© et Ă  11 h 45 prĂ©cises nous avons commencĂ© Ă  rouler vers l’ouest. Le colonel Friedler nous a demandĂ© d’attacher notre ceinture, afin que si un engin explosif devait ĂȘtre activĂ©, nous ne volions pas Ă  l’intĂ©rieur du vĂ©hicule. . Lorsque nous avons traversĂ© la frontiĂšre, le systĂšme « coupe-vent » s’est activĂ© : la principale menace pour les troupes ici sont les missiles antichar et les RPG, ainsi que les drones et bien sĂ»r les tireurs d’élite. »

 » Avant notre entrĂ©e, la force a localisĂ© quatre corps sur l’axe oĂč nous sommes censĂ©s nous dĂ©placer. À cĂŽtĂ© de deux d’entre eux se trouvait un RPG, il s’agit donc bien des corps de terroristes. Mais il y a un doute sur les deux autres, et il a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© de les amener en IsraĂ«l pour savoir s’il s’agissait de corps d’IsraĂ©liens. « J’aimerais que nous puissions dissiper les doutes de quelques familles supplĂ©mentaires », dĂ©clare le lieutenant-colonel Gilad Pasternak, le commandant.

Une telle opĂ©ration est particuliĂšrement complexe. Il faut faire intervenir une Ă©quipe de dĂ©minage et des Ă©lĂ©ments rabbiniques, puis coordonner le transfert des corps dĂ©jĂ  transformĂ©s en squelettes. Au cours des premiers jours, l’armĂ©e israĂ©lienne a localisĂ© plusieurs dizaines de corps du cĂŽtĂ© de Gaza et les a ramenĂ©s en IsraĂ«l. La plupart d’entre eux se sont rĂ©vĂ©lĂ©s ĂȘtre ceux de terroristes, mais parmi eux se trouvaient Ă©galement ceux de personnes enlevĂ©es par des IsraĂ©liens qui ont Ă©tĂ© identifiĂ©es et ramenĂ©es pour l’enterrement.

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La tĂąche principale est bien sĂ»r de nuire au Hamas ou, comme le disent tous ceux qui participent Ă  l’opĂ©ration, de l’anĂ©antir. Cela semble beaucoup plus simple qu’il n’y paraĂźt de l’intĂ©rieur, de l’extĂ©rieur. « Tous les chefs terroristes et leur acolytes du 7 octobre sont dĂ©sormais de grandes ombres, explique le colonel Friedler. Ils se cachent dans leurs taniĂšres et ont peur de sortir pour se battre. »

Cela nĂ©cessite que Tsahal morde le territoire palestinien pour cĂŽtoyer l’ennemi : les forces du colonel Friedler ont pris le contrĂŽle d’une zone de Gaza, Ă  plusieurs kilomĂštres de profondeur en territoire palestinien, et opĂšrent Ă  partir de lĂ  pour frapper les terroristes et localiser les puits de tunnels. Leur travail consiste Ă  dĂ©couvrir les ouvertures, puis Ă  faire appel aux unitĂ©s spĂ©ciales du Corps of Engineers qui les gĂšrent. ParallĂšlement, ils sont chargĂ©s d’entretenir l’axe logistique qui permet l’entrĂ©e et la sortie des troupes, l’évacuation des blessĂ©s et le transfert du ravitaillement Ă  toutes les forces de la division.

 

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Ses forces ont fait plusieurs morts et blessĂ©s ces derniers jours. Quelques minutes aprĂšs notre entrĂ©e Ă  Gaza, Friedler a reçu un rapport du contact selon lequel « deux salles » avaient Ă©tĂ© vus prĂšs d’une des maisons. Ce sont des maisons utilisĂ©es par les riches du quartier. Un char leur a tirĂ© un obus, les Ă©liminant apparemment. « Vous devez croire que nous vous le faisons », s’amuse le gĂ©nĂ©ral de brigade. « Vous avez bien fait. C’était juste sur notre chemin. » Plus tard, lorsque nous sommes arrivĂ©s Ă  l’intĂ©rieur, au cƓur du quartier, nous avons vu la maison, et Ă  cĂŽtĂ© se trouvait une usine qui dĂ©gageait une Ă©paisse fumĂ©e.

Le namer s’arrĂȘte prĂšs d’une des maisons et s’enfuit en courant, le long du mur, jusqu’au premier bĂątiment. « La principale menace ici, ce sont les tirs isolĂ©s venant de l’ouest, alors faites attention », demande le gĂ©nĂ©ral de brigade. . A l’entrĂ©e de la maison sont assis deux militaires qui demandent Ă  ne pas ĂȘtre photographiĂ©s. « Ma mĂšre ne sait pas que je suis ici », explique l’un d’eux.

Leur moral est bon. Quand nous entrons dans la maison, ils commencent Ă  chanter : « Nous ne rentrons pas Ă  la maison tant que la tĂąche n’est pas terminĂ©e ». Leur moral est bon et Friedler explique que « c’est comme ça que sont les soldats ». Je me demande combien de temps il pourra les garder avec une telle motivation, et il rĂ©pond, comme prĂ©vu, aussi longtemps que nĂ©cessaire.

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Pour tous les soldats ici, c’est la premiĂšre guerre. Pour la plupart d’entre eux, c’est aussi leur premiĂšre expĂ©rience avec le feu. « Lors de la premiĂšre rencontre, il y a un peu de choc, mais ensuite on se rĂ©initialise », explique le gĂ©nĂ©ral de brigade. Avant leur arrivĂ©e, ils ont eu le temps de s’entraĂźner intensivement. Il est maintenant temps de fournir des reçus. Le colonel Friedler est convaincu que le le rĂ©sultat viendra, et de maniĂšre considĂ©rable. Si l’armĂ©e israĂ©lienne dispose du temps dont elle a besoin, elle sera Ă  la hauteur : « C’est la guerre la plus justifiĂ©e au monde, et nous ne devons pas l’arrĂȘter tant que nous n’aurons pas gagné ».

Friedler, pĂšre de 6 enfants, Ă©tait commandant de peloton Ă  Homat Magen, commandant de compagnie au DeuxiĂšme Liban, commandant de bataillon Ă  Tzuk Eitan, et maintenant il est commandant de brigade. La semaine derniĂšre, j’ai parlĂ© avec sa mĂšre, Ruthie. Elle a 12 enfants, dont 7 sont dĂ©sormais dans la rĂ©serve, tous en position de combat. « C’est la vraie guerriĂšre de la maison », dit-il.

Je leur ai demandĂ© si la maison leur manquait. Tout le monde a rĂ©pondu qu’ils Ă©taient concentrĂ©s sur la tĂąche. Pour certains, cette dĂ©connexion n’est pas facile. Le lieutenant-colonel Pasternak a laissĂ© Ă  la maison sa femme, Hila, qui travaille comme mĂ©decin, avec un enfant de 2 ans et un bĂ©bĂ© de 5 semaines. « Je ne l’ai pas vue pendant la majeure partie de sa vie ». La derniĂšre fois qu’il s’est rendu Ă  Gaza, lors de l’OpĂ©ration Bordure Protectrice, il Ă©tait commandant de compagnie Ă  Nahal et a Ă©tĂ© blessĂ©. « J’ai reçu une balle dans la jambe, je me suis blessĂ© aux yeux », raconte-t-il.

Il n’est pas le seul Ă  avoir laissĂ© des enfants en bas Ăąge Ă  la maison. Le commandant du bataillon, le lieutenant-colonel Ran Canaan, a eu un fils juste avant d’entrer Ă  Gaza. Il a eu le temps d’accoucher, mais l’alliance Ă©tait dĂ©jĂ  accompagnĂ©e d’un tĂ©lĂ©phone opĂ©rationnel depuis Gaza. Ils ont nommĂ© l’enfant Dor, ou comme il dit : « Une nouvelle gĂ©nĂ©ration, car la lumiĂšre doit l’emporter sur les tĂ©nĂšbres. Cet ennemi cruel doit ĂȘtre Ă©liminĂ© du monde. Nous sommes ici pour libĂ©rer les personnes enlevĂ©es, vaincre le Hamas et rĂ©tablir la sĂ©curitĂ© des habitants de l’État d’IsraĂ«l. »

Le lieutenant-colonel Canaan s’est prĂ©cipitĂ© en bordure de Gaza lors de ce maudit Shabbat. « Je suis arrivĂ© vers 8 heures du matin », raconte-t-il. « Nous avons libĂ©rĂ© un otage, un citoyen français, qui Ă©tait dans la voiture, et tuĂ© pas mal de terroristes.  » Ses soldats ont Ă©tĂ© blessĂ©s et lui-mĂȘme a reçu une balle dans le dos. AprĂšs quelques jours. À l’hĂŽpital, il a Ă©tĂ© libĂ©rĂ© – et est retournĂ© au combat. « Il n’y avait aucun doute », dit-il.

Motivation maximale des combattants
Il dit que la motivation des combattants est Ă  son maximum. Tout le monde veut se battre. C’est la nature de l’ñge et de la position, mais c’est aussi la nature de cet Ă©vĂ©nement : le choc laissĂ© par l’attaque de Sim’hat Torah a fait comprendre Ă  chacun qu’il fallait se battre et gagner. C’est pourquoi Tsahal a Ă©galement retirĂ© ses gants : « Nous sommes entrĂ©s trĂšs fort », explique le gĂ©nĂ©ral de brigade.

Cette entrĂ©e a Ă©tĂ© prĂ©cĂ©dĂ©e d’une intense attaque aĂ©rienne dont les vestiges sont visibles partout : maisons dĂ©truites, cratĂšres de bombes, aucun signe de routes. Tout autour, c’est du sable, dont une partie s’est transformĂ©e en poudre qui flotte dans l’air et pĂ©nĂštre dans l’ñme. Et pourtant, c’est mieux que la boue qui sera lĂ  en hiver. C’est pourquoi Tsahal tente d’accĂ©lĂ©rer l’opĂ©ration, Ă  la fois par crainte que les pressions internationales ne cherchent Ă  l’arrĂȘter, et aussi pour profiter du temps relativement favorable, mĂȘme si vendredi aprĂšs-midi il faisait chaud et humide, et la nuit c’était dĂ©jĂ  froid.

Les troupes restent dans les maisons et les quittent pour des activitĂ©s et des scans. Ils mangent des conserves – thon, maĂŻs, haricots – bien loin de la nourriture indulgente dont on les a arrosĂ©s de toutes parts pendant les jours d’attente. Un chaton court Ă  cĂŽtĂ© des caisses vides et se nourrit des restes. « Il est lĂ  depuis notre arrivĂ©e. Apparemment, il n’a jamais aussi bien mangé », s’amuse l’un des soldats.

Nous passons Ă  un autre bĂątiment. Vous passez devant la mitrailleuse qui tient un poste surplombant la zone, traversez ce qui Ă©tait autrefois une route et est aujourd’hui un chemin de terre plein de nids-de-poule au bout duquel « Dubi », un bulldozer D-9, cherche un tunnel qui est censĂ© se trouver ici et entrez dans un autre bĂątiment.

Une rapide montĂ©e des escaliers jusqu’au deuxiĂšme Ă©tage, dont l’entrĂ©e est fermĂ©e par une Ă©paisse couverture et Ă  travers lequel vous avez une excellente vue. Au cƓur de la piĂšce se trouve un fauteuil spacieux. Je demande si je peux m’asseoir et obtenir la permission, puis je demande Ă  prendre une photo. Hommage Ă  cette cĂ©lĂšbre photo de Yahya Sinwar, Ă  la fin de l’opĂ©ration « Gardien des Murs ».

Sinwar a ensuite posĂ© pour une photo sur un fauteuil placĂ© parmi les dĂ©combres, pour dĂ©fier le fait qu’il avait gagnĂ©. C’est dĂ©sormais IsraĂ«l qui est dĂ©terminĂ© Ă  gagner : le colonel Friedler colle le drapeau israĂ©lien qu’il a apportĂ© avec lui sur le toit du bĂątiment et demande aux commandants d’ĂȘtre prudents : « Nous ne sommes qu’au dĂ©but du chemin », prĂ©cise-t-il.

D’un point de vue intĂ©rieur, il semble que Tsahal sait ce qu’elle fait ou ce qu’elle veut faire. L’inquiĂ©tude des soldats est comprĂ©hensible : ils font face Ă  un vĂ©ritable ennemi et Ă  de rĂ©elles menaces. Mais eux et nous n’avons pas le choix : celui qui ne bat pas le Hamas aujourd’hui le recevra demain Ă  la pelle.

La revanche du scooter
Et bien sĂ»r, il y a aussi ici une question de valeur et de vengeance. Le scooter jetĂ© dans la cour la symbolise bien. L’armĂ©e israĂ©lienne s’efforce dĂ©sormais de vaincre le Hamas et de libĂ©rer la bande de Gaza de son autoritĂ©, mais elle s’efforce Ă©galement de fermer les comptes et de garantir que cela ne se reproduise plus – ni dans ce secteur ni ailleurs.

En sortant, le colonel G se demande ce que Nasrallah dira dans son discours. Tout le monde n’espĂšre pas grand-chose, pour que le Hezbollah ne dĂ©tourne pas Tsahal de l’effort Ă  Gaza. Le trajet de quelques minutes se termine lorsque nous atteignons la clĂŽture, et aprĂšs avoir enlevĂ© nos casques et nos gilets, le colonel Friedler nous demande de prendre soin de nous. Dites Ă  la maison que nous gagnerons. »


RĂ©daction francophone Infos Israel News pour l’actualitĂ© israĂ©lienne
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