Le président français Emmanuel Macron a lancé vendredi un appel solennel pour la libération immédiate des otages israéliens détenus par le Hamas depuis près de deux ans. Mais sa déclaration, accueillie avec méfiance à Jérusalem, a suscité une réplique cinglante du président de la Knesset, Amir Ohana, qui accuse Macron d’avoir « donné un coup de pouce au Hamas » en annonçant la reconnaissance d’un État palestinien. Dans le même temps, un sondage révèle que seuls 15 % des Français lui font encore confiance, signe d’une crise politique intérieure sans précédent.
Un appel à la libération des otages
Le 6 septembre, à l’approche du shabbat, Emmanuel Macron a publié un message insistant sur la gravité de la situation des otages. « 700 jours. 700 jours sans leurs proches. 700 jours dans des conditions de détention inhumaines. J’appelle à la libération immédiate de tous les otages encore détenus par le Hamas. Les souffrances et la barbarie durent depuis trop longtemps », a-t-il écrit.
Cet appel intervient alors que 48 Israéliens restent prisonniers dans les tunnels de Gaza, certains morts, d’autres survivant dans des conditions atroces. Depuis le massacre du 7 octobre 2023, marqué par 1 163 victimes et 251 kidnappés, la libération des otages demeure une priorité nationale pour Israël et une exigence morale pour ses alliés.
La réplique cinglante d’Amir Ohana
Mais à Jérusalem, les propos de Macron n’ont pas convaincu. Amir Ohana, président de la Knesset et proche de Benjamin Netanyahou, a répondu avec virulence :
« La moitié d’entre eux auraient déjà pu être libérés si vous n’aviez pas soudainement pensé à déclarer que vous reconnaîtriez ce que vous appelez un “État palestinien”. Le Hamas a alors cru qu’il n’avait plus besoin d’accord. Bravo, Chamberlain. »
En comparant Macron à Neville Chamberlain, symbole de la capitulation face à Hitler en 1938, Ohana accuse directement le président français d’avoir encouragé l’intransigeance du Hamas par sa décision unilatérale. Pour lui, Paris a sapé les efforts de médiation et offert une victoire diplomatique aux terroristes, au détriment des otages et de leurs familles.
Une fracture diplomatique profonde
Cet échange s’inscrit dans un contexte déjà explosif entre la France et Israël. Depuis l’annonce par Emmanuel Macron, en juillet, de la reconnaissance d’un État palestinien lors de l’Assemblée générale de l’ONU en septembre, les relations bilatérales se sont dégradées à grande vitesse.
Israël a menacé de fermer le consulat français à Jérusalem et de saisir des biens français situés dans le pays, comme le Tombeau des Rois. Le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar, a déjà prévenu qu’« aucune visite de Macron en Israël n’aura lieu » tant que Paris maintiendra cette ligne.
Pour Jérusalem, la France, en prétendant défendre la solution à deux États, se range de facto aux côtés du Hamas et fragilise la sécurité israélienne. Pour Paris, au contraire, cette reconnaissance constituerait la meilleure manière d’assurer la stabilité et la survie d’Israël. Le fossé est désormais abyssal.
Une crise politique en France
Sur le plan intérieur, Emmanuel Macron traverse lui aussi une tempête. Un sondage réalisé par l’institut Verian pour Le Figaro entre le 31 août et le 2 septembre révèle que seulement 15 % des Français disent lui faire confiance. 82 % déclarent explicitement ne pas lui faire confiance, un record historique de défiance depuis 2017.
Le Premier ministre François Barrow n’échappe pas à cette impopularité : il n’obtient que 14 % de confiance. Plus inquiétant encore, près des deux tiers des sondés estiment que Macron devrait quitter l’Élysée avant 2027, illustrant la profondeur de la crise politique française.
Cette fragilité interne affaiblit la crédibilité internationale du président français, y compris sur le dossier israélo-palestinien. Israël ne manque pas de souligner que Macron parle au nom d’un pays dont le chef de l’État est désavoué par une écrasante majorité de ses concitoyens.
La question des otages au cœur du débat
Pour les familles israéliennes des otages, l’appel de Macron est perçu avec ambivalence. D’un côté, il rappelle que la communauté internationale ne doit pas oublier ceux qui croupissent encore dans les tunnels de Gaza. De l’autre, ses déclarations récentes sur la reconnaissance d’un État palestinien sont vues comme une contradiction flagrante, qui prive son message de crédibilité.
« On ne peut pas en même temps tendre la main aux terroristes et prétendre plaider pour nos enfants », a réagi une mère d’otage dans la presse israélienne. Cette dissonance nourrit le ressentiment d’Israël à l’égard de Paris.
Un symbole du déclin français
Au-delà de l’incident, l’affaire illustre le déclin de l’influence française au Moyen-Orient. Là où la France se voulait autrefois un acteur central, elle apparaît aujourd’hui isolée, contestée à l’intérieur et discréditée à l’extérieur.
Pour Israël, le vrai partenaire stratégique reste les États-Unis — malgré leurs propres tensions — ainsi que les accords de normalisation avec les pays arabes modérés. La France, elle, risque de basculer dans un camp ambigu, oscillant entre soutien verbal à Israël et concessions politiques aux ennemis de l’État juif.
Conclusion : un double affaiblissement
L’appel d’Emmanuel Macron pour les otages aurait pu constituer un geste fort de solidarité avec Israël. Mais dans le contexte actuel, il apparaît comme un aveu d’impuissance. La réplique d’Amir Ohana révèle la profondeur de la fracture entre Paris et Jérusalem, sur fond de guerre à Gaza et de reconnaissance imminente de la Palestine.
À l’international comme sur le plan intérieur, Macron est fragilisé. Pour Israël, son message n’est pas celui d’un allié fiable, mais celui d’un dirigeant affaibli, contesté chez lui et incapable d’infléchir le Hamas. En d’autres termes, le président français se retrouve désavoué sur les deux fronts.
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