À l’Élysée comme à New York, le discours se veut ferme et sans nuance. Emmanuel Macron et le roi Abdallah II de Jordanie ont réaffirmé leur opposition à l’offensive terrestre israélienne sur Gaza, dénonçant une stratégie vouée à « prolonger indéfiniment le conflit ». Les deux dirigeants plaident pour un cessez-le-feu immédiat, la libération des otages et une aide humanitaire massive, tout en brandissant à nouveau le mirage d’un « processus politique crédible ».
Réunis en amont de la conférence internationale prévue le 22 septembre à New York, le président français et le souverain hachémite ont mis en scène une alliance diplomatique qui vise directement Jérusalem. « La paix ne naît pas des ruines, elle se construit sur la justice et la dignité », a déclaré Macron dans une formule lyrique mais accusatrice, reprenant une rhétorique qui aligne Paris et Amman sur une critique frontale de la politique israélienne. Abdallah II, de son côté, a rappelé l’urgence de « restaurer la confiance par des gestes concrets » et insisté sur l’acheminement massif d’aide humanitaire vers Gaza.
La déclaration commune se veut équilibrée sur le papier, puisqu’elle exige également la libération des otages israéliens toujours détenus par le Hamas. Mais le ton dominant reste celui d’une condamnation de l’action militaire israélienne. Paris et Amman rejettent fermement « toute proposition de reconstruction de Gaza impliquant un déplacement forcé de sa population ou une mise sous tutelle du territoire », estimant que ces solutions seraient « contraires au droit international » et « menées à l’impasse ».
Ce discours illustre une dynamique inquiétante pour Israël : alors que Tsahal poursuit ses opérations contre le Hamas dans Gaza-Ville, certains alliés occidentaux affichent une impatience croissante. La France, autrefois perçue comme un médiateur, accentue ses critiques. La Jordanie, voisine directement concernée par toute évolution régionale, joue un rôle clé en donnant une légitimité arabe à ce front diplomatique. L’objectif est clair : replacer au centre la solution à deux États, leitmotiv répété à l’envi par Paris comme par Amman.
« Deux peuples, deux États : c’est la seule voie vers un avenir de paix », a insisté Macron. Mais derrière cette formule, Israël voit surtout un risque : celui d’une pression internationale accrue pour imposer une solution politique sans tenir compte de la réalité sécuritaire sur le terrain. Car dans le même souffle, les deux dirigeants évoquent la nécessité d’un désarmement du Hamas et d’une mission de stabilisation internationale, autant de concepts qui paraissent théoriques face à l’idéologie islamiste enracinée dans Gaza.
Cette posture franco-jordanienne intervient dans un contexte régional explosif. Le Hezbollah multiplie ses provocations au nord, l’Iran continue d’armer ses proxies et la Cisjordanie reste sous tension. Pour Jérusalem, chaque appel au « cessez-le-feu durable » résonne comme une tentative de délégitimer son droit à l’autodéfense. Comme le rappelait récemment un éditorial sur Infos-Israel.News, « aucun État démocratique n’accepterait de voir sa population vivre sous la menace permanente de missiles et d’attentats ».
Au plan diplomatique, cette convergence entre Paris et Amman annonce un front international plus large. La conférence de New York pourrait servir de tribune pour relancer une initiative multilatérale qui place Israël sous pression, en appelant à des concessions unilatérales. Washington, affaibli par ses propres échéances électorales, n’a pas encore clarifié sa position. Mais l’Europe, emmenée par la France, entend se poser en moteur.
Pour Israël, l’enjeu dépasse Gaza : il s’agit de préserver sa légitimité sur la scène internationale et d’éviter que son isolement ne se creuse. Les leçons de l’histoire sont claires : les pressions diplomatiques n’ont jamais protégé les civils israéliens des tirs de roquettes. Et aucune résolution onusienne n’a empêché le Hamas de se réarmer. La vraie question est donc de savoir si la communauté internationale choisira une fois de plus la posture morale, ou si elle assumera la réalité : sans neutralisation durable du Hamas, il n’y aura ni paix ni sécurité, ni pour Israël, ni pour la région.
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