Quel est le sens profond et la raison obscure de cette pathologie de la peau dont la Torah nous entretient.

L’exégèse biblique, quant à elle, explique que cette maladie est une punition conséquente aux ragots et autres calomnies colportés par le médisant. Une personne souffrant de «lèpre» est appelé «lépreux», en ce qui nous concerne, notre texte le dénomme «metsora», c’est-à-dire : «colporteur de propos diffamants». Il propage de fausses idées et crée des rapports désobligeants entre les hommes.

Comme une souffrance due au mépris, on se serait attendu à la retrouver sévissant parmi toutes les sociétés humaines.

Or, nous dit le Rambam, il n’en est rien ou plus exactement presque rien. La forme dont est atteint Israël est unique, et ne relève guère d’une manifestation naturelle.

La question reste au demeurant posée; pourquoi le peuple Hébreu devait-il souffrir un tel mal?

Le Verbe divin se conjugue en deux temps. Le premier est celui du quotidien, limité aux finitudes de l’univers physique.

Le second est une forme supérieure, une expression empreinte de Sainteté, offerte à Israël par D.ieu Lui-même.  

La Parole transcendante ne puise pas ses sources dans l’immanence du monde matériel, au contraire elle est, elle, à l’ origine de ce monde. C’est par ce Verbe-là que D.ieu créa l’Univers, «Par la parole de l’Éternel les cieux se sont formés, par le souffle de Sa bouche, toutes leurs milices.» (Psaume 33.6)

 

L’Éternel nous a octroyé ici-bas la puissance de Son verbe,  cette parole qui précéda la nature créée nous fut donnée au moment du Don de la Torah, véritable plan de la Création.

Un verset fait allusion à la transmission de la Parole divine aux Hébreux: «J’ai déposé mes paroles dans ta bouche, et je t’ai abrité à l’ombre de ma main, voulant établir de [nouveaux] cieux et réédifier la terre, et dire à Sion: « Tu es mon peuple! »». (Isaïe 51.16)

Les kabbalistes ont expliqué que le terme Hébreu pour désigner Pâques: Pessa’h, était une composition entre ‘pe’la bouche et ‘ssah’parler.

La sortie d’Égypte ouvrit la voie vers le mont Sinaï, elle permit à la parolede devenir libératrice. Preuve essentielle du pourquoi cette fête-mémoire tourne autour du récit de notre printemps de la liberté.

Ajoutons que le refus d’être Moshé, au tout début, s’appuyait sur une raison bien évidente à ses yeux: «Moïse dit à l’Éternel: De grâce, Seigneur! Je ne suis habile à parler, ni depuis hier, ni depuis avant-hier, ni depuis que tu parles à ton serviteur; car j’ai la bouche pesante et la langue embarrassée.» (Exode 4.10)

 

Dans un essai du Rav A.I Kook zatsal, «rédimer la parole», il écrit :

«Quelquefois il nous arrive de ressentir une relation très forte entre notre verbe et l’univers, il s’agit là d’une première étape où le verbe se détache de son exil.»

«Autant l’âme s’élève, autant prenons-nous pleinement conscience de la formidable puissance inhérente à notre parole. Nous reconnaissons clairement l’importance sans borne de chacun de nos énoncés; valeur de la prière, des bénédictions, valeur de l’étude et de tous nos propos. Nous apprenons à saisir l’émotion absolue contenue dans notre verbe, nous devinons tendrement le mouvementet l’agitation du monde engendrés par la seule parole.» (Orot Hakodesh vol 3, p. 285)

L’expression la plus éloquente, pour étayer ce qui sépare ces deux dimensions du Verbe, se trouve dans la remarquable déclaration de rabbi Shimon Bar Yochai:

«Si j’avais pu être présent au mont Sinaï, j’aurais demandé à D.ieu de nous créer avec deux bouches. L’une pour parler en termes de Torah et l’autre pour l’ensemble de nos besoins…» (Talmud de Jérusalem – Berach’ot 8:1)

La première n’est pas toujours présente, et ne peut se consacrer uniquement à la Torah comme à la prière.

Par contre la seconde peut prétendre au mieux en continu, elle peut explorer notre sensibilité et notre conscience de la nature si saisissante.

Dès le matin, la voici prête à annoncer avec ferveur qu’elle remercie et loue le Créateur, son verbe ne reste pas vain et sa parole sans fond. Elle se prépare chaque jour un peu plus à sublimer son quotidien, à dévoiler les secrets de la Sagesse divine.

Elle n’est pas toujours consciente de sa parole, une parole inspirée aux sources de la Parole créatrice, ses prières ont pourtant le pouvoir de changer et de bouleverser l’ordre du monde. (Olat Re’aiah vol. 1, p. 192)

Ayant analysé la valeur intrinsèque et l’énergie du Verbe saint, il nous est plus aisé de comprendre maintenant le pourquoi d’une telle affliction pour Israël seul.

N’en déplaise à la légèreté ou à l’atrophie de certains, notre faculté nous invite à la noblesse d’une parole fondée sur la Divine Providence qui transcende l’Univers.Une capacité à influencer le monde pour le meilleur de lui-même, sinon ce serait vouloir l’abimer.

La maladie vient ici purifier le malfaisant puisque médisant.  

Par Rony Akrich pour Alyaexpress-News