Un simple geste manqué a suffi à déclencher une tempête politique et sportive. Vendredi 5 septembre, lors des championnats d’Europe juniors de judo à Bratislava, la Française Doria Boursas, championne de France des moins de 63 kg, a refusé de serrer la main de l’Israélienne Kerem Primo à l’issue de leur quart de finale. Ce geste, perçu comme une humiliation, a provoqué la colère d’Israël et relancé les tensions dans un climat déjà explosif entre Paris et Jérusalem.
Le geste qui déclenche la controverse
Après sa victoire, la judoka française de 19 ans s’est contentée d’exécuter l’inclinaison réglementaire, comme l’exige le protocole, avant de tourner le dos à son adversaire. Kerem Primo, qui s’avançait pour lui tendre la main, est restée un instant décontenancée sur le tatami.
Si le règlement du judo n’impose pas la poignée de main, cette tradition est un symbole universel de respect et de fair-play. Son refus est donc immédiatement apparu comme un affront, au-delà de la stricte pratique sportive.
Selon RMC Sport, cette décision serait liée à un différend personnel antérieur entre les deux athlètes. Mais dans le contexte politique actuel, l’incident a été largement interprété comme un acte militant.
La réaction immédiate d’Israël
L’ambassadeur d’Israël en France, Joshua Zarka, a rapidement réagi sur X (ancien Twitter). « Ce comportement honteux et contraire aux valeurs du sport bafoue l’esprit du fair-play », a-t-il écrit. Le diplomate a appelé la ministre française des Sports, Marie Barsacq, ainsi que la Fédération française de judo, à condamner fermement ce geste et à prendre des « mesures concrètes » contre la sportive.
Dans un climat diplomatique tendu, marqué par l’annonce d’Emmanuel Macron de reconnaître officiellement l’État palestinien à l’ONU en septembre, cette polémique sportive a pris une dimension politique immédiate.
Le sport instrumentalisé
Ce n’est pas la première fois que le sport, et le judo en particulier, se retrouve au cœur de tensions liées au conflit israélo-palestinien. Plusieurs athlètes iraniens, algériens ou marocains ont déjà été sanctionnés pour avoir refusé d’affronter des judokas israéliens dans des compétitions internationales【source : Boycotts sportifs contre Israël – Wikipédia】.
La particularité ici est que l’affaire n’implique pas un pays traditionnellement hostile à Israël, mais la France, censée être un partenaire occidental. « Voir une athlète française reproduire les gestes de boycott qui relèvent habituellement des régimes islamistes est profondément choquant », a réagi un responsable israélien.
Silence gêné en France
Du côté français, la Fédération de judo s’est contentée d’un communiqué minimal, rappelant que « l’inclinaison est le seul geste obligatoire » et que « les éventuels différends personnels entre athlètes ne relèvent pas de l’institution ». La ministre des Sports, Marie Barsacq, n’a pas encore pris la parole publiquement, malgré la demande insistante de l’ambassade d’Israël.
Cette retenue est interprétée à Jérusalem comme un signe d’ambiguïté, voire de complaisance. Israël estime que la France, en pleine crise diplomatique avec l’État hébreu, hésite à condamner fermement ce qui est perçu comme un boycott symbolique.
Une judoka sous pression
Doria Boursas, jusque-là connue uniquement dans le milieu du judo, se retrouve malgré elle au centre d’une polémique internationale. Ses proches parlent d’une « jeune femme dépassée par l’ampleur médiatique de son geste ». Certains évoquent une maladresse ou une réaction à chaud. Mais pour Israël, l’incident dépasse la sphère personnelle : « Quand une athlète française refuse de serrer la main d’une Israélienne, ce n’est pas une simple affaire de tatami. C’est un signal politique envoyé au monde », résume un diplomate.
L’ombre de Gaza et de la reconnaissance de la Palestine
Cette polémique sportive ne peut être dissociée du contexte actuel. Depuis le massacre du 7 octobre 2023 et la guerre à Gaza, les relations entre Israël et une partie de l’opinion publique européenne se sont tendues. En juillet, Emmanuel Macron a annoncé que la France reconnaîtrait un État palestinien lors de l’Assemblée générale de l’ONU en septembre, provoquant la colère de Benjamin Netanyahou et de son gouvernement.
Dans ce climat, chaque geste hostile ou perçu comme tel à l’égard d’Israël prend une dimension politique. Le refus de poignée de main de Bratislava illustre la manière dont le conflit du Moyen-Orient s’invite jusque dans les compétitions sportives européennes.
Israël déterminé à réagir
Les autorités israéliennes ne comptent pas laisser l’incident sans suite. La Fédération israélienne de judo devrait saisir la Fédération internationale (IJF), qui pourrait rappeler à l’ordre la Fédération française. Dans le passé, l’IJF a déjà sanctionné des athlètes refusant de combattre des Israéliens, rappelant que « le sport doit rester un espace de respect mutuel ».
En France, la question est désormais politique. Le gouvernement devra décider s’il condamne publiquement la judoka ou s’il minimise l’incident au risque d’aggraver les tensions avec Israël.
Conclusion : quand le judo devient champ de bataille diplomatique
L’affaire Boursas-Primo illustre une tendance inquiétante : la contamination du sport par les fractures politiques. Un geste qui aurait pu rester une simple maladresse sportive se transforme en affaire d’État, parce qu’il touche à Israël. Pour Jérusalem, ce refus de poignée de main est une humiliation symbolique, qui s’ajoute à la crise diplomatique provoquée par la reconnaissance annoncée de la Palestine par la France.
Au-delà de Bratislava, c’est une question de principe qui se pose : peut-on tolérer que la haine et le boycott s’installent jusque sur les tatamis ? Pour Israël, la réponse est claire : le combat pour le respect ne se mène pas seulement à Gaza ou à l’ONU, mais aussi dans l’arène sportive.
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