Paris, encore une fois, nous surprend par sa légèreté et son cynisme. Comme si l’histoire ne suffisait pas, voici qu’un diplomate de haut rang, l’ambassadeur de France en Israël, Frédéric Journès, trouve le moyen de jeter l’opprobre… sur les Juifs eux-mêmes. Selon lui, la montée de l’antisémitisme en France « chevauche la manière dont la guerre a été conduite », laissant entendre que l’État d’Israël et, par extension, les juifs, auraient une part de responsabilité dans cette vague de haine.
Une telle déclaration aurait dû provoquer un tollé immédiat et une excuse sans ambiguïté. Or, ce que l’on observe, c’est tout l’inverse : une tentative d’édulcorer les propos, un tweet maladroit supprimé puis réécrit, et surtout… aucune excuse officielle. À la question posée par la presse, la réponse de l’ambassade fut claire : « les propos ont été mal compris ». Ce qui revient, une fois de plus, à faire passer ceux qui dénoncent cette injustice pour des esprits malveillants ou paranoïaques.
La gravité est double. D’abord parce que l’ambassadeur ignore, ou feint d’ignorer, la définition de l’Alliance internationale pour la mémoire de la Shoah (IHRA), adoptée par la France elle-même : accuser les juifs de causer l’antisémitisme, c’est une forme d’antisémitisme. Point final. Ensuite parce que ces accusations s’inscrivent dans une série d’initiatives inquiétantes de la diplomatie française : reconnaissance unilatérale d’un État palestinien, pressions pour imposer des sanctions contre Israël au sein de l’Union européenne, exclusion d’entreprises israéliennes de salons internationaux. Et désormais, un discours qui alimente directement la haine antisémite.
Il suffit de lire les chiffres pour mesurer l’ampleur du désastre : 1 600 incidents antisémites enregistrés en France en 2024. Des synagogues attaquées, des familles menacées, des enfants frappés à l’école. Et pourtant, certains diplomates européens — pas seulement français, mais aussi norvégiens et belges — trouvent le moyen d’accuser… les victimes. L’histoire bégaie dangereusement.
Ce qui rend ce discours encore plus insupportable, c’est l’amalgame permanent entre Israël, Tsahal et les juifs de diaspora. Comme si un enfant agressé à Lyon ou un rabbin insulté à Marseille étaient responsables de décisions militaires prises à Jérusalem. Comme si, en 1942, les juifs de Paris avaient été responsables des décisions de Washington ou de Londres… Cette logique est non seulement fausse, elle est mortifère. Elle légitime la haine.
À ce jeu-là, Paris joue avec le feu. La communauté juive de France — la plus grande d’Europe, la deuxième au monde après Israël — vit dans une insécurité permanente. On cache les kippot, on enlève les étoiles de David, on baisse la voix dans le métro. Et pendant ce temps, la diplomatie française donne des arguments aux agresseurs.
Même Emmanuel Macron, qui aime se présenter en grand défenseur des valeurs universelles, a multiplié les ambiguïtés. Quand il flirte avec l’idée de reconnaître un État palestinien « pour des raisons morales », il oublie que cette décision, dans un contexte de haine, sera lue comme une validation de la violence antisémite. Le président Trump, lui, ne s’y trompe pas : il a déjà rappelé que céder aux pressions islamistes et aux lobbies pro-Hamas, c’est mettre en danger non seulement Israël mais l’Occident tout entier.
Ironie de l’histoire : l’ambassadeur de France prétend que ses propos ont été mal compris. Mais la rue antisémite, elle, les a très bien compris. Ce type de déclarations offre un carburant idéologique à ceux qui rêvent d’effacer la mémoire juive de France, à commencer par le saccage de l’arbre planté à la mémoire d’Ilan Halimi, assassiné en 2006 parce qu’il était juif.
Alors, qui doit s’excuser ? Les juifs de France, encore une fois, pour leur existence ? Ou une diplomatie française qui semble oublier que la République a des principes, et que le premier d’entre eux est la protection de ses citoyens ?
En refusant de présenter des excuses, l’ambassadeur et, au-delà, le Quai d’Orsay, envoient un message clair : l’antisémitisme peut toujours trouver une excuse politique. Mais ce n’est pas une excuse qu’attendent les juifs de France. C’est une protection. Et si la France ne peut plus la garantir, alors c’est Israël qui, une fois encore, deviendra leur refuge naturel.
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