Le mot « éducation » issu du latin, signifie conduire, commander, guider, faire produire la terre, faire se développer un être vivant. Le verbe « enseigner », toujours issu du latin, signifie transmettre à la génération future plus de connaissances et de savoir, de savoir-faire et des valeurs à partir d’une culture commune.
Le terme éducation a un objectif de formation globale d’un individu à travers différents niveaux, religieux, social, culturel, technique, scientifique et médical.
Le terme enseignement a une visée plus précise, soit pourquoi ici celle de la connaissance à l’aide de signes. Signes utilisés pour la transmission de connaissances qui font référence au langage parlé et écrit.
Enseigner est donc éduquer, mais éduquer n’est pas forcément enseigner.
Ainsi, il ne faut pas oublier que le rôle des parents est d’éduquer et le rôle des enseignants est d’instruire. L’éducation ne se limite pas à l’instruction qui serait relatif au savoir et savoir-faire, elle vise également l’individu dans sa capacité physique, intellectuelle et morale. C’est-à-dire à tout ce qui lui permettra d’affronter sa vie personnelle, de la gérer en tant que citoyen responsable vis-à-vis de la société dans laquelle il évolue.
Si les écrits bibliques et talmudiques ne comportent aucune doctrine précise sur l’éducation, c’est avant tout du seul fait que cet art est bien plus qu’une théorie, la Torah est elle-même, toute entière, Education. Outre le célèbre commandement: «Tu l’enseigneras à tes enfants», il n’existe pas dans la Torah de Mitsva d’éduquer.
Éduquer, nous dit Rashi, c’est placer l’individu dans des conditions qu’il lui faudra plus tard assumer. En fait, éduquer, c’est inaugurer, c’est-à dire bien reconnaître les possibilités de l’enfant et les accroître.
La majorité des sociétés ont édifié un système éducatif dont la vocation première est d’encourager l’insertion des enfants dans la société qui les a vu naître. Le dessein est respectable, mais il aura de terribles effets secondaires en période de mutation car un tel principe ne permet forcément pas d’apprêter ces enfants à bâtir un autre type de société, ni même à faire face aux cahots d’une société en crise. Le nombre croissant des exclus de notre système en est une preuve évidente.
Un autre souci majeur réside dans l’uniformisation, pour ne pas dire le nivellement des individus. Sous prétexte d’égalité on façonne un modèle imposé, un « passe-partout » et quelle fatalité pour tous ceux qui ne s’y conformeraient point.
Les systèmes éducatifs semblent plus déséquilibrés les uns que les autres. Ceux qui construisent programmes et emploi du temps, paraissent avoir négligé la fameuse devise de Montaigne: « Mieux vaut une tête bien faite qu’une tête bien pleine ».
Tout semble se passer comme si l’on considérait que l’enfant n’a aucune possibilité de savoir ce qu’il fera de sa vie. Et partant de ce postulat, on lui tient sommairement ce discours:
« Assimiles, absorbes le plus de choses possibles, cela te servira « peut-être » un jour »
L’institution opère un véritable gavage d’oie, sans aucune inquiétude des cadences et des potentialités réelles de chaque enfant.
De surcroît, le temps offert à la découverte des activités physiques et artistiques, pourtant essentiels à l’épanouissement d’un être humain s’est redoutablement rabougri. Ces trente dernières années ont été témoins de bouleversements, entre autres l’abandon des formations concrètes (type apprentissage des métiers manuels), au profit de l’enseignement toujours plus long des matières dites « nobles ».
Naguère, ceux qui n’avaient aucun goût ou peu de dispositions pour les études, pouvaient apprendre un vrai métier et entrer de plain-pied dans le monde des adultes. Quelle fierté lorsqu’ils ramenaient leur première paie à la maison!
A présent, tous sont condamnés à se morfondre sur les bancs d’une école qui leur donne peu à peu le dégoût d’eux-mêmes (à force d’échecs répétés) et de la vie.
La violence qui s’accroît dans les établissements scolaires n’est sans doute que l’écho de la violence qui est faite à tous ces enfants, qui s’acheminent vers l’école la peur au ventre.
Dans le Livre des Proverbes il est dit: » Eduque le jeune selon sa voie ». En clair, il est essentiel de ne pas administrer à l’enfant des idées étrangères à sa personnalité car cela maltraiterait sa réelle nature. Au contraire, il est fondamental de le soutenir vers la pleine expression de son être vrai.
La seule conduite acceptable serait de procurer à l’enfant ce dont il a besoin pour progresser, pour se bâtir lui-même, pour déployer les aptitudes qui sont les siennes. Son être profond les connaît, mais si l’éducation le dévie du regard intérieur qu’il peut réaliser spontanément, il exhibera alors une personnalité orientée vers l’extérieur, dissociée de ses intentions et nécessités primordiales.
Une écoute affectueuse et soucieuse des éducateurs permet de discerner le début et la fin des étapes du développement tout en plaçant à portée de l’enfant les outils concordants. Il est nécessaire de laisser l’enfant s’arroger lui-même ces outils, au moment choisi par lui. Il est indispensable également de laisser l’enfant réitérer et parachever son apprentissage aussi longtemps que celui-ci le désire.
Il est monstrueux d’introduire un enfant dans un groupe, s’il n’est pas suffisamment construit. Ce n’est pas l’âge qui doit guider le choix des parents et éducateurs, mais la prédisposition de l’enfant à régir ce nouveau milieu. Là aussi, des repères existent. Encore faut-il les connaître!
L’origine du terme « jardin d’enfants » s’inspire du travail de jardinier qui n’exerce jamais de pressions sur ses plantes, mais se contente d’engendrer des situations favorables à leur floraison.
Le bon jardinier, comme le bon éducateur, est celui qui apprend et découvre toutes les capacités de la plante ou de l’enfant. Ces derniers marchant sur le chemin d’un devenir qui leur est propre.
La visée première de tout apprentissage est de révéler l’homme au bon et au bien qui est sien. Par la suite l’éducateur devra lui procurer les moyens de se mesurer avec la vie et d’en franchir les obstacles.
Ceux qui parviennent à émerger du système avec quelques diplômes ne sont, pour beaucoup d’entre eux, pas toujours mieux lotis que leurs compagnons d’infortune. Les meilleurs trouvent généralement un emploi mais remarquent avec surprise qu’ils n’y sont pas vraiment préparés.
Un diplôme d’ingénieur, par exemple, leur permet d’être cadre dès le début de leur carrière. Mais quand ont-ils appris à exercer des responsabilités d’encadrement? Qui les a préparés à affronter les difficultés relationnelles qui sont le pain quotidien du travail en entreprise?
Les études sont de plus en plus longues, effectuées dans un contexte d’assistanat, qui fournit des diplômés généralement immatures malgré leur âge avancé.
S’il faut pousser la comparaison, il est facile de trouver des « Certificats d’Etude » d’avant guerre, ayant une pratique quasi parfaite du français et du calcul. Alors que les bacheliers actuels ne brillent pas toujours par la qualité de leur orthographe ou la maîtrise de la banale règle de trois (et que dire des pourcentages ou du calcul mental!).
Quant à ceux qui n’obtiennent que de « petits diplômes » ou, pire, échouent à l’examen final, leur première expérience professionnelle est souvent le chômage, même pas indemnisé puisqu’ils n’ont jamais travaillé.
Précisons toutefois qu’en Israël, la plupart des étudiants se retrouvent en fac après un service militaire de trois ans minimum et une maturité certaine conséquente de responsabilités bien évidentes qu’ils se devaient d’assumer.
L’échec du système éducatif actuel parait donc considérable, même en regard de son objectif pourtant minimal d’une bonne insertion dans la société. Pour ce qui est de l’épanouissement des individus, il suffit de regarder la tête des gens dans les transports en commun. Lorsque nul ne se donne la peine de faire « bonne figure », peu de personnes ont l’air satisfait de leur sort.
Mais l’école est-elle seule en cause? De toute part, on nous dit que « tout se joue avant 6 ans », certains spécialistes insistant même sur l’importance des 3 premières années de la vie. Même si la scolarisation est de plus en plus précoce, les 3 premières années d’un enfant se déroulent encore dans un contexte essentiellement familial.
Mais les parents ont-ils été préparés? A quel moment nous enseigne-t-on l’art d’aider un enfant à se construire? Tant bien que mal, et plutôt mal que bien, nous reproduisons tout ou partie de l’éducation que nous avons reçue, même lorsque nous croyons la rejeter.
L’éducation n’est pas un dressage, mais aide à construire la volonté de l’enfant, à ranimer chez lui d’abord et avant tout la notion première du verbe « aimer ». L’essentiel étant de générer autour de lui, à la maison, à l’école et jusque dans la rue un environnement aimant et favorable.
La contrainte est elle un complément ou un principe indispensable du système éducatif ? Un dignitaire de l’Eglise voulu justifier cette théorie chrétienne selon laquelle l’éducation par la contrainte peut radicalement modifier la nature des êtres. Ce dignitaire avait donc dressé un chat à servir une collation à ses invités, et l’avait revêtu pour la circonstance d’un tablier de serveur.
Pour lui répondre sur le même terrain, un Rabbin ouvrit une tabatière contenant une souris qu’il lâcha aussitôt, ce qui fit immédiatement retrouver au chat ses instincts de félin.
En effet, la contrainte la plus pesante ne peut rien contre les forces instinctives car obliger ne s’appelle pas éduquer.
La distinction entre l’éducation et le dressage est élémentaire: l’éducation souhaite la participation de l’enfant, elle est affectueuse; le dressage ne se préoccupe guère de la participation de l’enfant, il commande au nom du rendement et fait donc régner la peur pour parvenir à ses fins.
Le parent qui éduque comprend mieux car il se souvient d’avoir été lui-même un enfant, l’autre veut être obéi, peu lui importe le vécu de l’enfant.
Les deux secrets partenaires de l’amour sont la compréhension et la patience.
Comprendre le vécu de l’autre, la manière subjective dont il ressent les choses, nous permet d’être patients avec lui.
Ce qui nous en empêche est le plus souvent notre propre crainte que les choses ne se passent pas comme nous voudrions qu’elles se passent, autrement dit notre propre peur.
Pour garder leur équilibre précaire les parents imposent et décrètent, se disent à eux-mêmes que la manière dont ils agissent est juste en la justifiant « pour le bien » de l’enfant.
Mais que veut dire « faire le bien de l’autre » si l’autre ne le ressent pas ainsi ? Le petit enfant n’a pas d’autre choix que de renoncer à lui-même et à ses besoins pour obéir à celui qui lui fait si peur. Le dresseur veut donc se faire obéir à n’importe quel prix. L’éducateur lui n’a de cesse de garder un lien d’amour avec son enfant et surtout de le lui faire sentir, car il sait que rien, jamais, ne vaudra de lui sacrifier quoi que ce soit.
Qui plus est notre société et notre planète sont en train de mourir des conséquences de la compétition sans merci que se livrent les entreprises et les nations. Le germe de ce comportement suicidaire réside dans la comparaison que les enfants font inévitablement lorsqu’ils ont la même activité. Les systèmes de notation, de classement et la pression des parents qui cherchent à se valoriser grâce aux résultats scolaires de leurs rejetons, ne fait qu’envenimer cette tendance naturelle à la compétition.
Mieux vaut persuader les enfants que chacun d’eux est unique et que l’humanité entière a besoin que chacun d’eux se réalise pleinement. Il suffit ensuite de s’organiser pour que dans une classe, il n’y ait pas deux enfants effectuant les mêmes tâches.
Un enfant est naturellement curieux. Il aime découvrir, expérimenter, vérifier, répéter. Tout est jeux, tout est joyeux si nul adulte ne vient prononcer des interdits ou semer les germes de la peur.
Il n’est bien sûr pas question de tout permettre. Mais nous devons organiser l’espace dans lequel les enfants évoluent, pour qu’il ne soit pas nécessaire d’interdire, de restreindre ou d’énoncer de quelconques mises en garde.
L’être humain est plus complexe que ce que l’on perçoit au premier abord.
Outre le corps physique et le mental que tout le monde reconnaît, de nombreux auteurs mettent en évidence l’existence de deux autres composantes tout aussi importantes.
Il y a un corps « subtil » (non perceptible à l’œil non exercé) qui alimente le corps physique en énergie. Certains le nomment corps « vital » et le décrivent comme le siège de nos instincts (issus de notre appartenance au règne animal) et de nos émotions.
Il y a également le siège de notre dimension spirituelle, appelé corps psychique, ou âme ou encore être profond. C’est la partie de nous qui sait vraiment qui nous sommes, et ce que nous avons à accomplir dans notre vie.
Or le système éducatif actuel ne s’occupe pratiquement que du mental (et encore, très imparfaitement! Vous qui lisez ces lignes, avez-vous la maîtrise de votre mental? Avez-vous appris à utiliser conjointement les deux hémisphères de votre cerveau?).
L’éducation du corps physique est à peine esquissée et laissée généralement à l’initiative de chacun. Sans une éducation appropriée, le vital de l’enfant se comporte comme celui d’un petit animal. Certes, à coup de règles morales et d’interdits, le mental apprend à endiguer plus ou moins les exigences du vital (comme l’animal, ce dernier vit dans l’instant et cherche la satisfaction immédiate de toutes ses pulsions).
Mais il s’agit plus d’un refoulement des pulsions (générateur de névroses) que d’une véritable éducation.
L’éducation du psychique est à la fois plus simple et plus contrecarrée par le système actuel. A la naissance, l’enfant est encore en contact avec sa dimension spirituelle.
Si nous lui laissons la possibilité d’explorer seul cette dimension, il n’y a rien besoin de lui apprendre. Il suffit de le laisser seul avec lui-même tant qu’il ne réclame pas notre intervention.
Mais au lieu de cela, la plupart des parents s’inquiètent dès que l’enfant semble inactif. A l’aide de hochets, interpellations et gadgets divers, l’enfant est peu à peu détourné, comme nous l’avons déjà dit, de l’observation intérieure qu’il pratique spontanément.
Il devient ce que nous sommes pour la plupart (sauf important travail sur soi), un être tourné vers l’extérieur, coupé de sa réalité profonde.
L’éducation serait donc patience, et la patience une action incessante, toujours remodelée en fonction de la personnalité à laquelle on s’adresse, et fixée en fonction de la cadence propre à l’enfant ainsi que de sa nature exclusive. L’enfant, tout comme l’homme adulte, est bon par essence et nous nous devons de l’accompagner sur les artères de son être profond.
La manière dont nous concevons l’éducation décide par avance de la société que nous souhaitons voir naître. A cet égard, la négligence dont nous faisons preuve en dit long sur notre absence de vision claire. Ce déficit produit une sourde compulsion à vouloir « insérer » la jeunesse dans la société. L’empressement à jeter sur le marché de futurs consommateurs compte davantage que le souci de former des êtres humains complets.
Raisons économiques obliges, même si le système actuel dans son ensemble est en train de sombrer et que l’urgence serait d’en inventer un autre.
Mais pour cela, il faudrait une vraie lucidité, plus d’intelligence, de générosité, un amour sans borne pour la terre et une créativité libérée des schémas établis.
Ce n’est pas « monnaie courante » par les temps qui courent ou cela n’intéresse que quelques initiatives encore marginales. Vu l’inertie ambiante, il est probable qu’il faudra encore quelques années avant que la prise de conscience émerge dans le domaine éducatif.
Ce qui est certain, c’est que dans un futur proche, nous ne ferons pas l’économie d’une réforme en profondeur de notre conception de l’éducation.
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