Smotrich au kibboutz religieux : “Vous êtes déconnectés de la réalité”

Le ton est monté d’un cran dans le débat sur la réforme du marché laitier. Dans une lettre publique au kibboutz religieux, le ministre des Finances Bezalel Smotrich a accusé l’organisation d’“alignement sur les monopoles”, de “désinformation” et même d’agir “en déconnexion totale d’avec le peuple d’Israël lorsqu’il s’agit de vos intérêts économiques”. Une charge sévère, qui intervient après le refus du kibboutz religieux de rencontrer le ministre au sujet de la réforme du lait.
Source : https://www.inn.co.il

Selon Smotrich, ce refus est le signe d’un choix politique clair : se ranger du côté de Tnuva et du Conseil du Lait, qu’il présente comme un “monopole qui étouffe les consommateurs depuis des années”. L’opposition du kibboutz religieux n’est pas nouvelle, mais le ministre affirme que la campagne menée contre la réforme a dépassé les limites d’un désaccord économique : elle reposerait, selon lui, sur des arguments “mensongers et démagogiques”.


Dans sa lettre, Smotrich reproche aux dirigeants du kibboutz religieux d’avoir publié dans les journaux du week-end un appel public contre la réforme, plutôt que d’accepter un dialogue frontal. “Au lieu d’un débat professionnel, vous avez choisi la voie de l’attaque médiatique. Vous me forcez donc à répondre de la même manière”, écrit-il.

Smotrich, qui porte la réforme comme l’une de ses priorités économiques, accuse ses détracteurs de “ne pas respecter l’intelligence du public” en affirmant que l’ouverture à la concurrence ne ferait baisser ni les prix, ni le coût du panier alimentaire. Il cite plusieurs exemples tirés du marché : les poissons d’élevage importés, la baisse du prix de la crème et du beurre après la suppression des taxes douanières, ou encore l’ail importé vendu “moins d’un shekel la tête”.

Pour illustrer son propos, il a publié une photo prise dans son propre supermarché local à Kedumim : un filet de tilapia vendu 13,90 shekels le kilo, “environ un tiers du prix des poissons d’élevage israéliens”. À ses yeux, la preuve est flagrante : “Ou bien vous ignorez la réalité, ou bien vous choisissez sciemment de ne pas dire la vérité.”


Le ministre poursuit en affirmant que la concurrence n’a pas détruit les filières existantes, contrairement à ce que laissent entendre certains agriculteurs. “Oui, certains secteurs de la pêche dans les kibboutzim ont fermé. Ce n’est pas agréable, mais aucun kibboutz n’a fait faillite pour autant”, écrit-il. Les kibboutzim, ajoute-t-il, ont su développer d’autres sources de revenus et “continuent de prospérer”.

Sur le beurre et la crème, Smotrich se montre encore plus catégorique. Depuis la suppression du droit de douane, dit-il, “il n’y a plus de pénurie, les prix ont baissé, l’offre s’est diversifiée et, contre toute attente, Tnuva produit aujourd’hui 150 % de beurre de plus qu’avant la réforme”. Pour lui, l’ouverture à la concurrence n’affaiblit pas la production locale ; elle la pousse à se moderniser.

Il affirme que la réforme qu’il propose – qui vise à réduire le prix du lait, des produits laitiers et à démanteler certains mécanismes de quotas – aura le même effet : “Le marché sera plus compétitif. Les consommateurs paieront moins. Vous produirez davantage et gagnerez davantage. Et tout cela avec une garantie de sécurité financière que n’a aucun autre secteur en Israël.”


Smotrich reconnaît pourtant la crainte des producteurs : la peur du changement, du bouleversement d’un système qui les protège depuis des décennies. Mais il insiste sur le contexte économique : “Le coût de la vie est devenu insupportable. Des familles entières comptent chaque shekel pour survivre. Nous n’avons plus le luxe de défendre des monopoles.”

Il appelle ainsi les membres du kibboutz religieux à revenir à ce qu’il considère comme leurs valeurs fondatrices : un lien profond avec le peuple d’Israël et ses difficultés économiques. “Prouvez que vos idéaux ne sont pas qu’un slogan. Lorsque cela touche votre portefeuille, ne vous déconnectez pas du public que vous prétendez représenter”, écrit-il.

Pour lui, la réforme n’est pas une attaque contre le kibboutz religieux ni contre les agriculteurs, mais une “révolution sociale” destinée à libérer les consommateurs israéliens du poids de structures fermées. Il assure que l’État continuera à assurer des filets de protection, mais exige des producteurs un engagement clair : “Vous devrez vous moderniser, augmenter votre productivité et devenir réellement compétitifs.”


Un autre point a été évoqué dans la lettre : la crainte d’importations en provenance de Turquie. Smotrich balaie cet argument sans détour : “Vous savez très bien que les produits laitiers n’ont jamais été importés de Turquie et ne le seront pas. Les importations proviennent d’Europe – Pologne, France, Finlande. Alors pourquoi entretenir un mensonge qui sert seulement les intérêts d’un monopole ?”

Ainsi, le ministre replace le débat dans un contexte plus large : celui d’un marché israélien confronté depuis des années à des prix élevés, en partie liés à des mécanismes hérités des anciennes politiques agricoles. La réforme du lait est l’un des dossiers les plus sensibles, car elle touche non seulement l’économie rurale, mais aussi l’identité des kibboutzim, dont beaucoup considèrent la production laitière comme un symbole historique.

Mais pour Smotrich, l’heure est venue de choisir entre tradition et responsabilité nationale. Et dans sa conclusion, le message est sans ambiguïté : “Venez travailler avec moi. Ensemble, nous pouvons briser les monopoles et apporter une véritable nouvelle sociale au peuple d’Israël.”

 


Rédaction francophone Infos Israel News pour l’actualité israélienne
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