Le sommet trilatéral entre Israël, la Grèce et Chypre, qui s’est tenu le 22 décembre à Jérusalem, illustre de manière particulièrement claire la solidité et la profondeur des relations entre les trois pays. Il s’agissait du dixième sommet de ce type depuis le renforcement progressif de cette coopération stratégique, entamée il y a environ quinze ans. Le choix de Jérusalem comme lieu de rencontre, dans un contexte de guerre prolongée et de critiques internationales croissantes envers Israël, revêt une forte portée politique et diplomatique.
Ce triangle Israël–Grèce–Chypre repose sur une convergence d’intérêts géopolitiques, énergétiques et sécuritaires. À l’origine de ce rapprochement figure notamment la découverte de vastes gisements de gaz naturel en Méditerranée orientale, qui a profondément modifié les équilibres régionaux. À cela se sont ajoutés les bouleversements issus du « printemps arabe », ayant affaibli plusieurs États de la région, ainsi qu’une inquiétude partagée face à la politique de plus en plus assertive de la Turquie sous la direction de Recep Tayyip Erdoğan.
La coopération trilatérale a progressivement pris une dimension institutionnelle avec la création de cadres multilatéraux élargis. L’exemple le plus marquant est le Forum du gaz de la Méditerranée orientale (EMGF), fondé en 2019, qui rassemble notamment l’Égypte, la Jordanie, l’Italie, la Grèce, Chypre et Israël. Ce forum constitue l’une des architectures régionales les plus structurées à avoir émergé ces dernières années, malgré un environnement géopolitique instable et conflictuel.
L’absence de la Turquie de ces mécanismes régionaux n’est pas le fruit du hasard. Elle reflète un choix stratégique assumé par les États participants, visant à bâtir une coopération fondée sur des intérêts partagés et une vision commune de la stabilité régionale. Pour Israël, la Grèce et Chypre, Ankara représente un défi stratégique, même si l’intensité de cette perception varie d’un pays à l’autre. L’amélioration récente des relations entre la Turquie et l’Égypte, par exemple, montre que les lignes de fracture régionales restent mouvantes.
Le sommet de Jérusalem a mis l’accent sur le renforcement de la coopération sécuritaire et militaire entre les trois États. Bien que la Turquie n’ait pas été mentionnée explicitement dans les déclarations officielles, elle était clairement présente en toile de fond. Les discussions ont notamment porté sur des mécanismes de coordination renforcée et, selon certaines fuites médiatiques, sur l’idée d’un « mécanisme de réponse trilatéral » face à des menaces régionales communes.
Pour Israël, l’enjeu central se situe actuellement en Syrie, où se joue une compétition d’influence régionale complexe, notamment avec la Turquie. Athènes, de son côté, observe avec inquiétude la montée des tensions en mer Égée, tandis que Chypre demeure confrontée à un conflit non résolu sur la division de l’île. Ces préoccupations sécuritaires convergentes expliquent la solidité du partenariat trilatéral.
La dimension énergétique a occupé une place centrale dans les discussions. Les trois pays ont réaffirmé leur engagement en faveur de projets communs dans le domaine du gaz naturel et des infrastructures énergétiques. Une attention particulière a été accordée au projet IMEC, le corridor économique reliant l’Inde à l’Europe via le Golfe, Israël, Chypre et la Grèce. Ce projet est perçu comme un levier stratégique majeur, tant sur le plan économique que géopolitique, susceptible de réduire la dépendance énergétique de l’Europe et de renforcer le rôle d’Israël comme hub régional.
La déclaration conjointe issue du sommet a également abordé la situation humanitaire à Gaza et exprimé un soutien explicite au plan en vingt points du président américain Donald Trump. Le texte réaffirme le droit d’Israël à l’autodéfense conformément au droit international et rejette les accusations jugées infondées portées contre l’État hébreu. Notablement, aucune référence explicite à la création d’un État palestinien n’a été incluse, malgré le fait que cette position demeure officiellement soutenue par la Grèce et Chypre.
La question libanaise a également été évoquée, notamment dans le contexte du dialogue en cours entre Israël et le Liban et de l’accord récent sur la délimitation des zones maritimes entre le Liban et Chypre. L’affaiblissement du Hezbollah et les évolutions en Syrie ouvrent, selon plusieurs observateurs, des perspectives inédites d’intégration régionale dans le secteur énergétique.
Si la rhétorique anti-turque a été perceptible en filigrane, certains experts estiment qu’une confrontation ouverte avec Ankara ne sert pas les intérêts stratégiques à long terme. Une approche plus discrète, fondée sur le dialogue indirect et la gestion pragmatique des intérêts, pourrait s’avérer plus efficace pour préserver la stabilité régionale.
En définitive, ce dixième sommet trilatéral confirme la maturité d’une coopération stratégique qui s’est imposée comme un pilier de l’architecture géopolitique de la Méditerranée orientale. Le triangle Israël–Grèce–Chypre apparaît aujourd’hui comme un facteur de stabilité relative dans une région marquée par des rivalités persistantes et des recompositions rapides.
Rédaction francophone Infos Israel News pour l’actualité israélienne
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