Toit (Skhakh) Ă©moi ! –

 

Moadim lĂ© simh’a ! Un article sur Souccoth ? Comment donc Ă©crire quelque chose d’original sur l’une des Chaloch RĂ©galim – Les trois grandes fĂȘtes lors desquelles tous les HĂ©breux Ă©taient tenus de monter au Temple de JĂ©rusalem – alors que tant de nos Sages se sont penchĂ©s dessus ? Vous parlez des lois rĂ©gissant la construction de la Souccah ? Outre le fait que ce serait quelque peu rĂ©pĂ©titif, cela se rĂ©vĂšlerait aussi un peu tardif car, depuis Yom Kippour, tout un chacun s’est fait architecte, selon un plan d’ensemble bien Ă©tabli, et vous ĂȘtes maintenant assis dans une cabane solide !

 

Une simple « cabane » ? Voire ! Laissons la « cabane » au Canada avec Line Renaud car, la Souccah, c’est quand mĂȘme autre chose. Pour preuve ? Le code de lois des « Arbaa Tourim » (« Les Quatre Piliers », livre Ă©crit par Rabbi Yaacov Ben Acher dit « le Tour » – 1270/1340 – et ayant servi de base pour le Choulh’an Aroukh) indique que la fĂȘte de Souccoth a lieu en tichri, et non en nissan, car en nissan : «  les hommes ont l’habitude de se construire de petites huttes pour leur dĂ©tente (
) ; dans ces conditions, on ne se rendrait pas compte que la Mitzvah de Souccah traduit l’ordre divin. Par contre au mois de tichri, les hommes ont l’habitude de rentrer dans leur demeure, et par le fait que nous faisions le contraire, Ă  savoir que nous sortons de nos maisons vers les souccoth, alors il est Ă©vident que l’accomplissement des lois de Souccoth traduit la volontĂ© divine, qui nous a ordonnĂ© de nous souvenir de Ses miracles et Ses hauts-faits. »

 

Qu’est donc alors que la Souccah ? Que reprĂ©sente-t-elle ? Il y a , bien entendu, l’explication classique selon laquelle cette construction provisoire rappelle la protection (qui perdure aujourd’hui sous une autre forme) dont HachĂšm a fait bĂ©nĂ©ficier notre peuple durant les quarante annĂ©es oĂč nous avons errĂ© dans le dĂ©sert. Ainsi, en explication Ă  Vaykra XXIII, 42-43 (« Dans les souccoth vous rĂ©siderez sept jours. Tous les membres du peuple d’IsraĂ«l devront habiter dans des souccoth. Afin que vos gĂ©nĂ©rations futures sachent que J’ai installĂ© les BĂ©nĂ© IsraĂ«l dans des Souccoth, lorsque Je les ai sortis d’Egypte  ») nos MaĂźtres expliquent, dans la GuĂ©mara Soucca (11b), qu’il s’agit des nuĂ©es de Gloire par lesquelles HachĂšm a entourĂ© les BĂ©nĂ© IsraĂ«l, pour ne pas qu’ils subissent le soleil (mais, contrairement Ă  ce que nous faisons, Il ne les a pas installĂ© dans de vĂ©ritables cabanes). Cependant la Souccah symbolise Ă©galement le peuple entier d’IsraĂ«l rĂ©uni bientĂŽt dans son lieu de rĂ©sidence – Aujourd’hui im ezrat HachĂšm ! – sous la protection de Hakadoch-baroukh-Hou. D’oĂč tire-t-on cela ? De Amos IX, 11 (« En ce jour, Je relĂšverai la Souccah caduque de David, J’en rĂ©parerai les brĂšches, J’en restaurerai les ruines, Je la rebĂątirai comme au temps jadis  »). Cette Souccah des temps Messianiques prĂ©figure l’union du peuple d’IsraĂ«l et le retour Ă  la royautĂ©, mais aussi des lumiĂšres divines trĂšs Ă©levĂ©es qui descendront et se rĂ©vĂšleront alors dans le monde, ainsi qu’il est dit dans le Midrach Tanh’ouma : « Alors, Ă  l’époque du Machiah’, Je vous rĂ©compenserai en manifestant Ma RoyautĂ© dans toute Sa splendeur et en vous protĂ©geant par ma Souccah. Ainsi qu’il est Ă©crit dans Ichaya IV, 6 : Il y aura une Souccah qui donnera, le long du jour, de l’ombre contre la chaleur, et qui servira d’asile et de refuge contre l’orage et la pluie. »

 

C’est si vrai que, alors que tant les dimensions de hauteur minimale et maximale de la souccah, que ses longueurs et largeurs minimales, le nombre de ses murs obligatoires, le dĂ©calage maximum autorisĂ© entre deux murs, sous les murs, etc. sont dĂ©finis avec prĂ©cision, il n’existe qu’une seule exception : il n’y a aucune limite maximale Ă  la largeur et Ă  la longueur de celle-ci ! Le Talmud dĂ©veloppe cette idĂ©e Ă  partir du verset Vaykra XXIII, 42 (« Dans les souccoth vous rĂ©siderez sept jours. Tous les membres du peuple d’IsraĂ«l devront habiter dans des souccoth ») en indiquant que le mot souccoth (pluriel de souccah) y est Ă©crit sans la lettre “vav”
 ce qui signifie que ce mot peut Ă©galement se lire « souccath » (« La souccah de  ») et donc, selon le systĂšme des exĂ©gĂšses multiples de la Torah, cela signifie Ă©galement que « Tous les membres du peuple d’IsraĂ«l devront habiter dans la souccah ». « La Torah dĂ©sire indiquer ici qu’il est appropriĂ© que tout le peuple d’IsraĂ«l rĂ©side en une seule Souccah » conclut alors le Talmud !

 

Vivre sous un mĂȘme « toit » implique une certaine communautĂ© de pensĂ©e entre co-habitants, certains renoncements. Avant d’y emmĂ©nager, il faut d’abord brider son ego, abandonner quelque peu son petit confort matĂ©rialiste et aussi savoir pouvoir totalement, en cas de besoin, s’en remettre entiĂšrement au MaĂźtre des lieux. Le Rabbi de Kotz, grand maĂźtre h’assidique, explique que le sens mystique de la Souccah est le concept de Bitoul, la notion que dans la mesure oĂč une personne se concentre  sur elle-mĂȘme, elle empĂȘche sa relation aussi bien avec autrui qu’avec D-ieu. C’est la raison pour laquelle, durant cette fĂȘte, chacun a l’obligation de renoncer Ă  la plupart de ses biens terrestres et de retourner aux choses essentielles. D’un sentiment de possession propre, d’une sĂ©curitĂ© faite d’habitudes entre ses quatre murs, d’une impression d’invulnĂ©rabilitĂ©, on passe dans la prĂ©caritĂ©. Cette dĂ©stabilisation permet de nous rendre compte que ce ne sont point les objets dont nous nous entourons qui font notre bonheur, que l’on peut vivre dans un palais en Ă©tant malheureux mais que l’on peut ĂȘtre trĂšs heureux en vivant « d’Amour et d’eau fraĂźche »  car la clĂ© du bonheur rĂ©side dans la qualitĂ© de nos relations : nos relations avec autrui, avec nous-mĂȘmes et avec D-ieu. C’est sans doute pourquoi Souccoth est appelĂ©e, entre autres, « Zman simh’atĂ©nou » : « Le temps de notre joie ». Etrange ! me direz-vous. Comment peut-on ĂȘtre heureux d’une situation oĂč l’on est dans un environnement instable, conditionnĂ© par les alĂ©as du temps et des saisons ? C’est que c’est cela « ĂȘtre juif », oserais-je dire le « (s)chĂ©ma (d’)IsraĂ«l » : ĂȘtre ballottĂ© d’un endroit Ă  l’autre au grĂ© des caprices des Nations (Les sionistes vont se rĂ©crier en affirmant notre dĂ©sormais « indĂ©pendance »  mais les mitnah’alim de ce que fut Yamit, le Gouch Katif et certaines implantations de JudĂ©e-Samarie – dĂ©mĂ©nagĂ©s de force par la volontĂ© de Washington – comprendront !), au travers parfois du beau temps mais souvent des bourrasques et des tempĂȘtes, tout en sachant que le Secret rĂ©side dans le concept d’UnitĂ© (« HachĂšm est notre D-ieu, HachĂšm est Un »), qu’émane de D-ieu tant les bonnes que les « mauvaises » surprises
 ces derniĂšres n’étant lĂ  que pour nous faire grandir et ne paraissant nĂ©fastes qu’à notre vue limitĂ©e par le temps mais menant inexorablement Ă  la finalitĂ© de la CrĂ©ation qui sera le « Bien » absolu ! Cette « philosophie » est quasi incomprĂ©hensible pour les autres civilisations : solidement ancrĂ©es dans leurs pays – leur « état » disent-elles elles-mĂȘmes* – les Nations sont incapables de se rĂ©jouir dans une rĂ©sidence temporaire et ne peuvent donc saisir qu’un peuple, qui est parvenu Ă  surnommer « FĂȘte de la joie » une pĂ©riode symbolisant son insĂ©curitĂ© matĂ©rielle, est impĂ©rissable. C’est sans doute pourquoi, si nous observons les autres croyances copiĂ©es de la nĂŽtre, on peut constater que, si elles ont empruntĂ© – en les dĂ©figurant – presque toutes nos fĂȘtes, l’imitation de la « FĂȘte des cabanes » manque Ă  leur rĂ©pertoire.

 

A Souccoth, tout le peuple d’IsraĂ«l est uni Ă©galement au travers des « Arbaa minim » (Les « Quatre espĂšces »). Trois sont attachĂ©es ensemble : le Loulav (palme de dattier, arbre qui porte des fruits dĂ©licieux mais n’a pas de parfum
 Le fruit symbolisant l’étude de la Torah – « dont le goĂ»t, selon le Talmud, est pareil au miel » –  et le parfum reprĂ©sentant les Mitzvoth – « dont l’odeur, selon la mĂȘme source, est agrĂ©able Ă  HachĂšm ») est la description de ceux qui possĂšdent la Sagesse mais ne pratique pas de bonnes actions ; le Hadas (myrte) a une bonne odeur mais n’est pas comestible Ă  l’image de ceux qui gardent les Mitzvoth mais n’étudient pas ; la Aravah (feuille de saule) ne sent rien et n’est pas mangeable, modĂšle du juif « se laissant vivre ». La quatriĂšme, l’Etrog (cĂ©drat), goĂ»teux et Ă  la dĂ©licieuse fragrance, c’est le Tsadik (« Juste ») que – lors de la bĂ©nĂ©diction – nous rapprochons des trois autres car « celui qui est dans une bonne position doit se rapprocher de celui qui en sait moins, afin de l’influencer dans le bon sens ! » RassemblĂ©es, on agite alors celles-ci vers les quatre points cardinaux et vers le haut et vers le bas, en symbole de l’omniprĂ©sence de D-ieu.

 

« D-ieu dit : mettez-les ensemble, Ă  la maniĂšre dont on lie une botte, alors l’un fera le rachat de l’autre ». Souccoth est donc, surtout, la fĂȘte par excellence de l’unitĂ© spirituelle de notre peuple en la prĂ©sence d’HachĂšm et sous Sa protection ! Le symbole de la Souccah, c’est l’ombre du CrĂ©ateur qui se trouve dans chaque Ăąme juive, le « temps de la Souccah » est mĂȘme – selon le Ariz’al – « le secret des jours »  et ce n’est pas une coĂŻncidence si le nom  « Souccah » (ŚĄŚ•Ś›Ś”), en hĂ©breu, est composĂ© de ce qui exprime la plus grande union possible entre les noms de D-ieu (conjuguant Torah Ă©crite et Torah orale) : les lettres “vav” – Â Ś• – et “khaf” – Â Ś› – faisant la guĂ©matria (6 + 20 = 26, valeur numĂ©rique) du TĂ©tragramme (10 + 5 + 6 + 5 = 26) et les lettres “samekh” – Â ŚĄ – et “hey” – Â Ś” – (60 + 5 = 65) faisant la guĂ©matria du ChĂšm Adnout (appelĂ© « Palais du Nom ») qui s’écrit “aleph” – ڐ – “daleth” – Ś“ – “noun” – Â Ś  – et “yod” – Ś™ – (soit 1 + 4 + 50 + 10 = 65).

 

Par YĂ©h’ezkel Ben Avraham pour Alyaexpress-News

 

* Il est a remarquer que, en français, le mot « état » dĂ©signe tant la « ManiĂšre d’ĂȘtre d’une personne ou d’une chose dans ce qu’elle a de durable », que la « ManiĂšre d’ĂȘtre (physique, intellectuelle, morale) d’un ĂȘtre vivant » ou encore qu’une « AutoritĂ© souveraine s’exerçant sur l’ensemble d’un peuple et d’un territoire dĂ©terminé »


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