Tsahal mise sur l’intelligence artificielle pour prévenir les suicides parmi ses soldats

Après une guerre éprouvante, l’armée israélienne affronte un autre front : celui du traumatisme invisible. Le chef du corps médical de Tsahal, le général de brigade Dr Zivon Aviad-Bar, a dévoilé un programme inédit utilisant l’intelligence artificielle pour détecter la détresse psychologique chez les soldats. Objectif : sauver des vies avant qu’il ne soit trop tard.

Lors de la conférence annuelle de la santé organisée par Ynet et Yedioth Aharonoth, le général Aviad-Bar a présenté un bilan médical détaillé de la guerre de Harvot Barzel (« Épées de fer »).
Selon lui, l’armée a divisé par deux le taux de mortalité des blessés par rapport à la Seconde Guerre du Liban de 2006 : « Nous avons sauvé deux fois plus de vies qu’auparavant », a-t-il affirmé, précisant que le taux de décès parmi les blessés graves est passé de 14,8 % à 6,9 %.

Mais au-delà des prouesses médicales, l’officier a insisté sur un enjeu nouveau : la santé mentale des troupes. « Aujourd’hui, plus de 1 200 soldats souffrant de stress post-traumatique servent encore, en régulier comme en réserve. Autrefois, on les aurait démobilisés. »

Pour faire face à la montée des troubles psychologiques, Tsahal a intégré un outil d’intelligence artificielle conçu par le professeur Yossi Belz : un chatbot interactif qui entraîne les soldats à reconnaître les signes de détresse chez leurs camarades.
« Nous sommes passés d’une sensibilisation théorique à un apprentissage pratique », explique Aviad-Bar. « Le système parle leur langue, leur apprend à détecter les signaux faibles — changements d’humeur, isolement, propos ambigus — et à réagir vite. »
Ce dispositif s’inscrit dans une stratégie plus large de prévention des suicides, après une année marquée par plusieurs drames au sein des unités combattantes. (ynetnews.com)

L’armée de défense d’Israël, longtemps attachée à une culture du silence et de la résilience, change de paradigme. Le général Aviad-Bar le reconnaît : « Sauver un soldat d’une blessure invisible est parfois plus difficile que de stopper une hémorragie. »
Le programme Ta’atsumot (« Forces intérieures »), créé pour accompagner les vétérans atteints de stress post-traumatique, en est l’exemple le plus visible : les soldats y reçoivent un suivi psychologique quotidien, combinant thérapies de terrain, sessions de groupe et activités rééducatives — agriculture, mer, méditation, et sport.

Cette approche a déjà permis à plusieurs centaines de soldats blessés psychologiquement de reprendre du service. L’armée y voit une double victoire : humaine et stratégique.

Les chiffres témoignent d’un basculement : la guerre de 2023-2024 a laissé un traumatisme collectif. Les combats prolongés à Gaza et dans le nord ont affecté moralement des milliers de jeunes combattants, souvent témoins de pertes extrêmes.
Tsahal admet désormais que les blessures psychiques peuvent être aussi invalidantes que les blessures physiques. Dans un pays où le service militaire reste un rite national, reconnaître cette fragilité est une évolution sociétale majeure.

L’introduction d’outils d’intelligence artificielle marque une tentative d’adapter la prévention au langage d’une génération connectée. « Les jeunes parlent plus facilement à un écran qu’à un supérieur », note un psychologue militaire cité par Israel Hayom. « Si un chatbot peut sauver une vie, il a sa place dans la trousse médicale de Tsahal. »

Reste la question de la confidentialité et de l’usage des données. L’armée assure que les échanges avec l’IA sont anonymisés et qu’aucune information personnelle n’est stockée sans consentement. L’objectif n’est pas la surveillance, mais l’éducation émotionnelle.
Les spécialistes saluent cette initiative, tout en rappelant qu’aucune technologie ne remplacera l’empathie humaine. « L’IA peut signaler, pas guérir », résume le psychiatre Dr Oren Davidson.

Dans une armée marquée par la guerre et la douleur, la santé mentale devient un front prioritaire. En combinant science, technologie et humanité, Tsahal reconnaît que la victoire ne se mesure pas seulement en batailles gagnées, mais aussi en vies sauvées du désespoir.
Le général Aviad-Bar l’a résumé d’une phrase simple :

« Quand un soldat apprend à repérer la détresse de son ami, il devient aussi un soldat de la vie. »


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