À la veille de la libération anticipée de son fils Eitan, retenu en captivité par le Hamas, Tzvika Mor a livré une mise au point sans concession : il réclame le retour des otages, mais refuse que l’État paie ce prix en affaiblissant sa propre sécurité. Dans une interview accordée à Army Radio reprise par The Times of Israel, le père d’Eitan incarne la position d’une partie des familles — la Tikva Forum — qui accepte la nécessité de la pression sur le Hamas tout en dénonçant les accords partis pris qui libèrent des terroristes condamnés.
Tzvika Mor rappelle d’abord l’éducation et les valeurs familiales : « Dans notre foyer, nous avons appris à nos enfants à risquer leur vie pour le peuple d’Israël, pour l’État d’Israël », explique-t-il. Selon lui, si Eitan n’avait pas été enlevé, il aurait combattu en Gaza. Ce rappel n’est pas anecdotique : il fonde la légitimité morale de sa prise de position. Pour Mor, la logique qui gouverne l’échange d’otages ne doit pas renverser la hiérarchie des responsabilités — on ne peut sacrifier la sécurité des citoyens pour ramener des captifs, fût-ce son propre fils. « Nous avons exigé que le prix soit payé par l’ennemi, pas par les citoyens d’Israël qui ont déjà tant payé », affirme-t-il.
La Tikva Forum, groupe composé de familles à la sensibilité politique résolument à droite, a longtemps critiqué les accords qui ont libéré des centaines de détenus palestiniens en échange de quelques otages. Mor explique que la stratégie adoptée après le 7 octobre — une pression militaire soutenue sur le Hamas — a précisément permis d’obtenir des avancées. « La seule pression sur le Hamas nous a permis d’obtenir des résultats », affirme-t-il, renvoyant dos à dos les solutions purement négociées et le laxisme qui, selon lui, nourrit de nouveaux actes de terreur.
Sur le plan concret, Mor s’oppose vivement au prix demandé par certains accords. Il déplore la libération de « 250 terroristes condamnés à la prison à perpétuité » et de milliers de détenus, qui, dit-il, reviendront « tuer des Israéliens ». « C’est ainsi que cela a toujours été : on libère des meurtriers et on récolte ensuite plus de meurtres », lance-t-il. Cette préoccupation est partagée par de nombreux analystes sécuritaires : la remise en liberté de condamnés pour terrorisme porte un risque réel pour l’ordre public et la dissuasion. Mor cite aussi la crainte d’une reconstruction du potentiel militaire du Hamas — arguant qu’une « nouvelle génération » de cadres pourrait être renforcée par de tels échanges.
Pour autant, la voix de Mor n’est pas une voix d’inaction. Il se réjouit — émotion sincère — de la perspective de serrer son fils dans ses bras : « Nous commencerons par une longue et forte étreinte », confie-t-il, évoquant le silence et l’étreinte comme premiers gestes. Sa position est double : fermeté politique et vulnérabilité humaine. Il se refuse à instrumentaliser la douleur pour des postures politiques faciles ; il veut, au contraire, que la nation prenne des décisions lucides et supportables sur le long terme.
Sur la scène publique, la déclaration de Mor a relancé le débat national sur la stratégie des échanges. D’un côté, les partisans d’un rapatriement rapide et massif soutiennent qu’il faut tout tenter pour sauver des vies, même au prix d’aménagements lourds. De l’autre, des voix comme celle de Mor avertissent que jouer avec la sécurité civile pour obtenir des retours partiels ou conditionnels reviendrait à creuser une dette stratégique payée par la population. Cet équilibre entre humanité et prudence est au cœur d’un débat qui prend des allures d’épreuve d’équilibre pour le gouvernement.
Enfin, la leçon que Mor veut transmettre est simple et exigeante : la libération des otages est une priorité nationale, mais elle doit être poursuivie « sans compromettre notre capacité à empêcher la prochaine attaque ». En filigrane se dessine une injonction politique claire : l’État doit combiner fermeté militaire, intelligence stratégique et compassion — sans céder au chantage que le terrorisme impose. Quand son fils sera chez lui, dit-il, « je lui dirai exactement ce que je pense qu’il faut faire ». D’ici là , sa voix restera une prudente vigie, rappelant que le prix d’un instant d’émotion ne doit pas être payé par la survie du pays.
Rédaction francophone Infos Israel News pour l’actualité israélienne
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