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Câest Ă Marseille que sâest achevĂ©e la tournĂ©e europĂ©enne marathon du TourĂ© â Raichel Collective, Ă lâinitiative du guitariste-parolier Vieux Farka TourĂ©, dâorigine malienne et du pianiste-compositeur israĂ©lien, Idan Raichel. « World music », jamais ces deux mots nâont Ă©tĂ© aussi bien associĂ©s. Car câest dans un esprit de promotion de la paix et dâharmonie interculturelle que ces deux artistes dâexception nous ont livrĂ© leur dernier concert, un vĂ©ritable succĂšs populaire, et un phare dans lâobscurité !
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Un monde sans frontiĂšre
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Idan Raichel et Vieux Farka TourĂ© arrivent sur la scĂšne de lâEspace Julien, le sourire aux lĂšvres et le regard complice. La vaste salle est comble accueillant des personnes de toutes origines. Alors quâaucune note nâa encore Ă©tĂ© Ă©changĂ©e, la musique est dĂ©jĂ Ă lâĆuvre. SâopĂšre une vĂ©ritable symbiose entre les deux artistes, comme sâils sâĂ©taient toujours connus, et avec le public. Et pourtant, tout a commencĂ© un peu par hasard, il y a quatre ans en Espagne : la rencontre entre deux univers, et entre deux hommes que tout aurait pu opposer: la gĂ©ographie, la religion ou la politique.
Seule la musique a comptĂ©, comme le dit si bien Vieux Farka Touré : « Quand je monte sur scĂšne, ce nâest pas un malien, ni un musulman, mais un artiste qui sâexprime avant toute chose. La musique nâa pas de frontiĂšre. ».Il est vrai quâil a Ă©tĂ© Ă bonne Ă©cole, celle de son pĂšre, lâimmense Ali Farka tourĂ©. Idan Raichel qui est nĂ© Ă Kfar saba, « un grande ville prĂšs de Tel-Aviv ressemblant à un petit village » a Ă©tĂ© Ă©levĂ© dans une famille originaire dâEurope de lâEst, entre tradition musicale klezmer et souvenir de la Shoa. Cette enfance, et lâespace confinĂ© dans lequel se trouve IsraĂ«l, lui ont donnĂ© lâenvie de dĂ©couvrir le monde, de franchir les frontiĂšres.
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La musique, la libertĂ© et lâharmonie
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Ce qui frappe le plus, câest Ă la fois lâesprit de libertĂ© qui imprĂšgne cette musique, la trĂšs grande diversitĂ© des sources dâinspiration, et lâharmonie qui en Ă©mane. Chacun leur tour, ils commencent un morceau. Idan, au piano, puise aux sources Yiddish, israĂ©lienne ou classique. Quant Ă Vieux, Ă la guitare, il marie des airs traditionnels africains, avec le blues. Puis lâautre lui rĂ©pond. Sây associent ensuite les deux autres membres de lâorchestre, Amit CarmĂ©li Ă la basse et Souleymane âSouley KanĂ©â Ă la percussion. Les voix, sur des registres variĂ©s et en plusieurs langues, se mĂȘlent aux instruments jusquâĂ ce quâil ne soit plus possible de les discerner les uns des autres. Progressivement les diffĂ©rentes influences sâenchevĂȘtrent pour donner une synthĂšse riche dâĂ©motion et de rythme qui Ă©lĂšve lâĂąme. Au dĂ©tour dâune phrase musicale traditionnelle africaine ou orientale, on semble entendre des rĂ©miniscences qui rappellent Jean-SĂ©bastien Bach, Debussy ou encore Gershwin. Le tout intĂ©grĂ© dans un Ă©crin commun.
Ces sonoritĂ©s inouĂŻes semblent le rĂ©sultat de nombreuses rĂ©pĂ©titions pour arriver Ă un tel degrĂ© de convergence. En fait, « chaque concert est unique, nous sommes portĂ©s par lâĂ©motion du moment qui nous tranporte vers des dĂ©veloppements de plus en plus complexes ». « On se suit du regard, un simple geste suffit et on sait immĂ©diatement quelle direction prendre » nous explique Vieux. « Il existe cependant, des sortes de repĂšres musicaux, des balises qui nous guident et Ă partir desquels nous Ă©laborons nos morceaux. Nous sommes Ă lâĂ©coute les uns des autres, en toute confiance. On construit ensemble. Câest Ă la fois improvisĂ© et trĂšs construit » complĂšte Idan». « Ce qui est essentiel câest dâĂȘtre complĂ©mentaire, pas en opposition ».
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Un exemple de vivre et dâavancer ensemble
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Les deux artistes exposent au public le but de leur action et le sens de leur musique. Vieux a dĂ©jĂ fait le voyage de JĂ©rusalem. Idan espĂšre faire celui de Bamako, reportĂ© pour lâinstant Ă cause des Ă©vĂšnements. Leur prĂ©sence sur scĂšne, ensembles, a une valeur Ă©motionnelle et symbolique puissante, alors que les roquettes tombaient sur le sud dâIsraĂ«l et que le nord du Mali est sous la coupe des islamistes dâAnsar Dine. « Je sais quâil y en a qui nâaiment pas que je joue avec un israĂ©lien », reconnait Vieux Farka TourĂ©. « Moi je joue avec un ami, un frĂšre, et on ne fait plus quâun dans la musique ». Idan Raichel nous explique son cheminement : « Vous savez, les gens qui parlent de notre rĂ©gion, le Proche-Orient, ils ne comprennent pas quâavec la guerre, on croit que de lâautre cĂŽtĂ© de la frontiĂšre câest lâennemi ». « Pour moi la libertĂ©, câest de franchir la frontiĂšre, non pour parler philosophie, juste pour faire ensembles de la musique, qui elle ne fait pas de politique ».
Ainsi avec des choses toutes simples mais partagĂ©es, Vieux et Idan espĂšrent montrer la voie Ă suivre et que leur lâexemple, en inspirera dâautres. Et quand on les entend chanter, le bonheur est communicatif, câest la preuve vivante que câest possible !
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Pr Hagay Sobol
Président du Centre Culturel Edmond Fleg
Co-organisateur du concert avec lâEspace Julien
RĂ©daction francophone Infos Israel News pour lâactualitĂ© israĂ©lienne
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