Un nouvel éclat secoue la scène politique israélienne. Lors d’un échange houleux à la Knesset, le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir aurait traité la députée Pnina Tamano-Shata de « folle et stupide ». L’élue du parti Bleu et Blanc, choquée par cette agression verbale, dénonce une attitude « menaçante » et un climat d’hostilité grandissant envers la communauté éthiopienne.
La scène s’est déroulée lundi soir dans la « Parsa » de la Knesset, cet espace où les élus se croisent en dehors des caméras. Pnina Tamano-Shata, ancienne ministre de l’Intégration, y interpelle Ben Gvir au sujet de l’arrestation de deux adolescents éthiopiens de 12 et 13 ans, soupçonnés d’avoir participé à un incident violent le jour de Yom Kippour. Selon elle, les mineurs auraient été détenus « en violation de la loi ».
Mais la conversation dégénère rapidement. D’après le récit de Tamano-Shata, le ministre se serait approché d’elle de manière agressive, jusqu’à ce que « son nez touche le mien ». Il lui aurait alors lancé : « T’es folle et stupide ! » — une phrase qui, selon plusieurs témoins, a déclenché stupeur et colère dans les rangs de l’opposition.
« Je lui ai répondu : tu es le fou et le stupide ! », a-t-elle raconté au média Ynet, visiblement émue. « J’étais sous le choc. Ce comportement est violent et indigne d’un ministre. » L’élue affirme qu’elle s’est sentie physiquement menacée : « Je lui ai crié de s’éloigner de moi. »
Peu après l’incident, Ben Gvir est monté à la tribune de la Knesset pour attaquer à son tour la députée, l’accusant d’avoir « détruit la vie d’un enfant de la communauté éthiopienne ». Selon le ministre, la parlementaire aurait « instrumentalisé » le cas du jeune garçon en l’exposant publiquement devant les caméras : « Elle a fait de lui un symbole, elle l’a étiqueté comme un délinquant, elle l’a ruiné. »
Dans un communiqué, le bureau du ministre a ajouté : « Pnina Tamano-Shata a passé quatre heures avec cet enfant dans les couloirs de la Knesset sans lui offrir à boire ni à manger. Le ministre, lui, a pris soin de le recevoir dans son bureau, de lui donner un repas et d’appeler le commissaire de police pour vérifier comment l’aider. »
La députée, elle, dément formellement cette version et dénonce un « lynchage politique » : « Ce qu’il cherche, c’est diviser les Israéliens entre communautés. C’est sa méthode : la provocation, l’humiliation, la peur. » En larmes, elle a pris la parole en séance plénière pour défendre la jeunesse éthiopienne : « À un groupe de 70 000 citoyens, on a ouvert 30 000 dossiers judiciaires. Si ce n’est pas du profilage, qu’est-ce que c’est ? »
Plusieurs députés du centre et de gauche ont réclamé des excuses publiques, tandis que la droite a applaudi la « franchise » du ministre.
Dans les médias, les éditorialistes pointent un climat délétère à la Knesset. « Ce n’est plus un débat, c’est un ring », écrit Haaretz, tandis que Israel Hayom salue « un affrontement symptomatique d’une fracture communautaire que personne ne veut vraiment affronter ».
Ben Gvir, chef du parti Otzma Yehudit, est connu pour ses propos francs contre des journalistes, des Arabes israéliens ou des juges qui ont souvent déclenché des tempêtes médiatiques. Mais cette fois, la charge frontale contre une figure respectée de la communauté éthiopienne risque de laisser une trace durable.
Car au-delà de l’injure, c’est une bataille symbolique pour la dignité et l’égalité qui se joue. La députée Tamano-Shata, née en Éthiopie et arrivée enfant en Israël lors de l’opération Moïse, incarne pour beaucoup la réussite de l’intégration et la fierté d’une communauté trop souvent marginalisée. La voir publiquement humiliée par un ministre du gouvernement met en lumière une tension sociale que le pays peine à résoudre : celle entre Israël des pionniers et Israël des oubliés.
À l’heure où la nation reste secouée par la guerre et les crises internes, cet affrontement verbal résonne comme un signal d’alarme. L’unité israélienne ne pourra tenir si le débat politique se transforme en champ d’insultes. Et si le respect entre élus s’efface, que restera-t-il du lien civique entre citoyens ?
Rédaction francophone Infos Israel News pour l’actualité israélienne
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