Ni les Syriens, ni les Iraniens et certainement pas Israël n’est intéressé par une confrontation militaire régionale. Assad a peur qu’Israël détruise son système antiaérien, et Téhéran a peur de contrarier davantage Poutine, qui veut la stabilité, mais les tentatives de l’Iran de s’établir en Syrie vont continuer et Israël devra continuer à les contrecarrer.
Ce jour de la bataille aérienne dans la région syrienne s’est terminé par un résultat positif d’un point de vue israélien. Il est vrai que nous avons perdu un avion ce matin, mais les pilotes ont atterri sur notre territoire, et non moins important – la force aérienne peut tirer des leçons de la poursuite de la «guerre entre les guerres» et de la prévention de l’implantation de l’Iran en Syrie. Des décisions nouvelles seront prises après cette ligne rouge, non seulement envers l’Iran mais aussi la Russie, les États-Unis, les pays européens et le monde entier.
Malgré l’avertissement russe d’il y a un an, Israël a attaqué le même avant-poste militaire (la dernière fois en mars 2017), non loin de l’endroit où se trouvait le personnel militaire russe car les Iraniens ont opéré dans cette même zone et se sont servis de la présence russe comme un bouclier humain sous lequel la Syrie a aussi stocké des armes, en particulier des drones et d’autres véhicules aériens sans pilote, en cas de future guerre contre Israël.
Le drone lancé par les Iraniens aux premières heures de la matinée n’était pas seulement une provocation au mépris des attaques de l’armée de l’air israélienne contre les installations iraniennes en Syrie ces dernières années, mais aussi et peut-être principalement – un drone furtif opérationnel. S’il avait réussi, un moyen d’action contre Israël aurait été créé et aurait servi non seulement les Iraniens de Syrie, mais aussi le Hezbollah du Liban.
Le drone furtif que les Iraniens ont envoyé avait pour objectif d’intercepter le système d’alerte précoce et les renseignements israéliens. Il a été copié au drone RQ-70 américain qui s’est crashé chez eux et a été pris par les iraniens en 2011. Les Iraniens ont annoncé qu’ils l’utiliseraient pour construire leur propre drone furtif, ce qu’ils ont fait en surprenant Israël.
Mais leur expérience n’a pas réussi, et elle a également prouvé à quel point le renseignement israélien est efficace et à quel point les systèmes syriens et iraniens pénétrants en Israel seront stoppés. Ce fait a une signification dissuasive, ce qui a également été prouvé lors de la deuxième attaque israélienne du matin (après l’attaque du drone) contre les batteries antiaériennes syriennes et les installations iraniennes sensibles.
À ce stade, il est clair qu’aucun des acteurs – les Syriens, les Iraniens, les Russes et Israël – ne s’intéressent à l’escalade. Tout le monde a besoin d’une période de calme pour évaluer la nouvelle situation qui a été créée dans le Nord, et tout le monde a tout intérêt à ce qu’il n’y ait pas de guerre, pas même une escalade majeure.
Le gouvernement israélien a effectué tous les préparatifs militaires pour une escalade dans le nord, mais il a aussi envoyé des signaux – à la fois sur le terrain et par la voie diplomatique – qu’il n’est pas intéressé à le faire. Israël a demandé aux Russes d’empêcher l’escalade. Les Russes, car ils doivent plaire à Assad, et leur donne la légitimité de rester en Syrie, ont émis un message plutôt tiède qui était également destiné à calmer tous les parties.
Ceci en dépit du fait que les Iraniens, par le fait qu’ils ont envoyé un véhicule aérien sans pilote en Israël depuis un endroit proche du personnel militaire russe, ont grandement embarrassé le Kremlin et approfondi les clivages qui se forment déjà entre Moscou et Téhéran en relation avec l’avenir de la Syrie.
Le régime syrien tente de se vanter du prestige d’abattre un avion israélien, mais en parallèle il cache l’énorme préjudice subi sur son système antiaérien par Israel. Les Syriens très intéressés ont perdu l’un des rares biens (système anti-missile) et vont exiger aux Russes de leur apporter de nouvelles cargaisons de missiles anti-aériens, avec des fonds iraniens, bien sûr. Les Syriens ne veulent pas contacter Téhéran s’ils peuvent le faire avec la Russie.
Par conséquent, toutes les parties ont actuellement intérêt à maintenir le calme, et c’est probablement ce qui se produira. Mais ne nous y trompons pas: les Iraniens continueront à essayer de s’établir en Syrie. Ils chercheront d’autres moyens, et Israël continuera probablement à contrecarrer leurs tentatives, même s’ils doivent payer un prix. La bataille actuelle pour la région syrienne et libanaise après la guerre civile en Syrie continuera d’être menée dans son intégralité.
La Force aérienne a également pris part au processus des leçons apprises, en reconnaissant clairement que le F-16 n’était pas le résultat d’une négligence ou d’une complaisance, mais plutôt une nécessité et peut-être une erreur tactique. Cela arrive après plus de 30 ans durant lesquels un avion antiaérien n’a pas abattu un avion israélien, il n’y a pas besoin d’être inquiets, les pilotes sont vivants, et de nouvelles méthodes d’assaut, de nouveaux moyens et d’aller de l’avant doivent être recherchés… notamment avec les F15.
Par Ron Ben-Yishai, correspondant des affaires militaires et de sécurité sur Ynet.