Pas moins de 20 victimes du massacre de Daesh au Bataclan sont encore à l’hôpital, un an après les attentats de Paris : « Nous ne devons pas être tués une seconde fois ».
Des terroristes de Daesh ont abattu 90 personnes le 13 novembre de l’année dernière, alors qu’ils assistaient à un spectacle du groupe Eagles américains de Death Metal.
L’atrocité faisait partie d’une vague d’attaques ciblant les bars et restaurants et le stade de football du Stade de France.
Alors que 130 personnes ont été tuées lors du massacre de Daesh, plus de 400 ont été blessées et 20 sont encore en convalescence à l’hôpital. 2000 suivent une forme ou autre de traitement en raison de leurs traumatismes.
Plus de 50 enfants grandissent sans l’un de leurs parents, et 1 000 encore ont perdu un parent.
Un an après les attentats de Paris, les survivants du carnage et ceux qui ont perdu des êtres chers, font de leur mieux pour ne pas passer de la colère à la peur.
Chacun a sa propre façon de tenter de guérir.
« Nous sommes ceux qui ont été laissés, harcelés par la même ombre, unis par l’idée que nous ne devons pas être tués une seconde fois, dit Antoine Leiris, le jeune père qui a écrit, un message sur Facebook largement partagé, trois jours après la la mort de sa femme dans le massacre, promettant de ne pas céder à la haine ».
« Je suis une sorte de totem autour duquel les gens se sont rassemblés, un symbole de quelqu’un qui tente de se relever. Mais je suis juste une personne normale… Il y a des jours où j’ai peur, des jours où je veux fuir, des jours où je veux tout casser en morceaux, comme tout le monde », a dit Leiris à l’AFP dans une interview téléphonique.
Parmi ces autres victimes, il y a aussi cette femme qui aujourd’hui doit élever ses deux enfants seule, ou un amputé qui montre la balle qui a déchiré sa jambe et qui a reçu de bonnes « paroles » de la part d’un survivant de la Shoah qui lui a appris qu’il est normal de ne pas pardonner.
« Au début, moi et mon fils, nous nous sommes isolés du monde, parce que le monde nous avait fait du mal. Mais nous ne voulions pas rester dans l’isolement. Ce fut ma façon de me ré-engager dans le monde », dit-il.
Maureen Roussel, une survivante du carnage à la salle de concert Bataclan, a abandonné son emploi comme assistante d’enseignement après les attentats.
« Je me suis dit que si je ne pouvais pas me protéger en face du danger, je ne pouvais donc supporter d’être responsable des enfants » a dit Roussel.
Un an plus tard, elle est encore traumatisée, imaginant sans cesse des scènes plus apocalyptiques.
L’association « Vie pour Paris », qu’elle a fondée pour aider les survivants et les familles des victimes, a agi comme une sorte de bouée de sauvetage.
« Avant, je m’occupais des petits enfants. Maintenant, je vais aider beaucoup de grands enfants ».
Lea Malwe, un physiothérapeute de 28 ans, a été frappée sur deux fronts, le 13 Novembre 2015.
Son petit ami « drôle, gentilet beau », un ingénieur du son qu’elle avait rencontré dans un bar quelques semaines plus tôt a été abattu dans le Bataclan.
Quelques minutes plus tôt, des hommes armés ont fauchés 14 personnes au restaurant et au bar Carillon et Restaurant Petit Cambodge et un bar au coin de la même rue.
Lea Malwe qui avait l’habitude de se vanter auprès des étrangers sur la situation sécuritaire de sa ville a vécu « comme un robot » depuis.
« Avant je pensais devenir maman, vieillir, devenir une grand-mère et ainsi de suite, et maintenant, rien de tout cela est certain. Je sais maintenant que vous pouvez mourir d’autre chose que de vieillesse », dit-elle.
Sa seule source de réconfort est de « voir les gens qui s’aiment ».
« Si, comme moi, vous avez la chance d’une seconde vie, la vie est presque plus belle, dit Claude-Emmanuel Triomphe, un haut fonctionnaire qui a été laissé sur le trottoir dans un bain de sang après avoir été abattu sur une terrasse de café ».
Triomphe, 58 ans, prenait un verre à « La Bonne Bière » quand une balle a déchiré sa cuisse, endommageant son intestin et le nerf sciatique.
Une autre balle l’a frappée dans le bras, et des fragments ont touché la cheville et le pied.
Il rappelle l’arrivée de « l’ange », un médecin qui a utilisé des serviettes de bar pour appliquer un garrot et, plus tard, l’aide d’un autre ami médecin, qui l’a sauvé d’une embolie pulmonaire en allant vers l’hôpital.
Après des semaines allongé, sur le dos regardant un plafond de l’hôpital, il a finalement été « mis à la verticale » et sanglé dans un fauteuil roulant – le point charnière d’une reprise remarquable.
« J’ai appris à marcher, et mettre un pied devant l’autre », dit Triomphe, qui marche aujourd’hui sans béquilles.
Les randonnées dans les montagnes, sa grande passion est hors de question pour le moment, mais d’autres horizons sont possibles.
L’année prochaine, Triomphe se déplacera à Marseille pour prendre un rôle important en tant que commissaire de l’Etat pour l’engagement civique.
L’une des questions qui le ronge est « pourquoi la France a produit plus de djihadistes que tout autre pays européen ».
« Voilà une question fondamentale », dit-il.
Pendant ce temps, les enquêteurs français pensent avoir identifié un terroriste belge en Syrie en tant que coordinateur de Daesh dans cette attaque meurtrière – mais un an plus tard, les autorités ont encore du mal à cerner le cerveau derrière ce massacre.