Cette annĂ©e, le jour du souvenir des martyrs et des hĂ©ros de lâHolocauste 2022, sera Ă©galement marquĂ© le 80e anniversaire de la dĂ©portation des Juifs de Paris et du dĂ©but de la dĂ©portation des Juifs français vers les camps dâextermination en 1942. Un tiers des Juifs du pays ont Ă©tĂ© assassinĂ©s pendant lâHolocauste. Selon les donnĂ©es de lâAutoritĂ© des droits des survivants de lâHolocauste, il ne reste actuellement que 1 856 survivants de lâHolocauste en IsraĂ«l qui ont immigrĂ© en IsraĂ«l depuis la France.
Lâun dâeux est Moshe Gottel, un Parisien de 85 ans. « Jâavais un an et demi quand la guerre a Ă©clatĂ©, raconte-t-il Ă Walla ! Ă lâĂ©tĂ© 1939, toute la famille est partie vacances dans le nord de la France « Les Français ont promulguĂ© des lois sĂ©vĂšres contre les Juifs, encore pires que les lois de Nuremberg â mĂȘme les Allemands ont Ă©tĂ© Ă©tonnĂ©s de la rapiditĂ© avec laquelle une France libĂ©rale est devenue cruelle envers les Juifs. Peu Ă peu, la situation des Juifs sâest aggravĂ©e. »
Ă lâĂ©poque, le pĂšre de Gottel Ă©tait directeur dâun orphelinat oĂč sĂ©journaient des enfants qui avaient perdu leurs parents pendant la guerre. « Mon pĂšre est allĂ© dans la clandestinitĂ© juive et a demandĂ© Ă se battre avec eux. Ils lui ont dit quâil nây avait pas besoin de plus dâofficiers, mais il y a beaucoup dâorphelins de guerre et ils ont besoin dâun Ă©ducateur pour diriger un orphelinat. Mon pĂšre, en tant quâenseignant, sâest immĂ©diatement chargĂ© de cette tĂąche. »
« Le chef de la police du district aurait aimĂ© aller dans une institution dirigĂ©e par mon pĂšre », se souvient-il, « mon pĂšre lui donnait de lâalcool. Quand il Ă©tait ivre, il lui parlait des Juifs â enfants, vieillards et femmes ». â quâil devait remettre aux Allemands. Il avait lâhabitude dâ « oublier » la liste sur le bureau de mon pĂšre, et immĂ©diatement mon oncle, Henry Klein, est allĂ© avertir ces Juifs de la liste â et ainsi ils ont rĂ©ussi Ă sâĂ©chapper plusieurs fois. Mon oncle Henri, qui a ainsi sauvĂ© des milliers de juifs a Ă©tĂ© exĂ©cutĂ© par un peloton dâexĂ©cution. «Â
« Les Allemands venaient fouiller lâinstitution de temps en temps », a-t-il ajoutĂ©. « Chaque fois le mĂȘme officier vertueux nous a prĂ©venus et nous avons cachĂ© les juifs qui y travaillaient, sauf les enfants qui Ă©taient encore protĂ©gĂ©s en France. » Mais cela nâa pas toujours fonctionnĂ©, et une fois, alors quâil nây avait pas eu dâavertissement prĂ©alable, un comptable hongrois avec toute sa famille y a Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© et ils ont Ă©tĂ© expulsĂ©s. « La veille jâai jouĂ© avec la fille Anna et le lendemain elle nâĂ©tait plus ». MoĂŻse a expliquĂ© quâil ne se souvient pas du nom de lâofficier français qui les a avertis .
Lorsque lâadministration de Vichy est arrivĂ©e au pouvoir dans la moitiĂ© de la France, les enfants nâĂ©taient plus protĂ©gĂ©s non plus et lâĂ©tablissement dâenseignement a Ă©tĂ© dissous. « Nous avons appris que la Gestapo nous cherchait, et les parents ont dĂ©cidĂ© de dĂ©mĂ©nager en Suisse en trois dĂ©lĂ©gations, car nous Ă©tions une grande famille », raconte Moshe. « Lentement, nous avons tous dĂ©mĂ©nagĂ© en Suisse et avons Ă©tĂ© protĂ©gĂ©s. Jâai grandi dans des institutions de la Croix-Rouge et mes parents Ă©taient dans des camps de rĂ©fugiĂ©s. »
AprĂšs la guerre, les membres de la famille ont tentĂ© de reconstruire leur vie. « AprĂšs la guerre, mon pĂšre est revenu Ă Paris, dans le but de retourner sur son lieu de travail et de revivre », raconte-t-il, « je nâavais aucune idĂ©e de ce quâĂ©tait une vie de famille ou dâĂ©tudes normale ou une vie routiniĂšre, car jâĂ©tait encore petit quand tout a commencĂ©. Nous avons essayĂ© de rĂ©intĂ©grer la communautĂ©, mais tout le monde Ă©tait traumatisĂ©. Ils Ă©taient tous morts-vivants parce quâil nây avait personne Ă qui il restait un proche. De cette pĂ©riode je me souviens que tout est gris â câĂ©tait affreux ».
Bien que ses parents et sa sĆur se soient abstenus de le faire, Moshe a dĂ©cidĂ© dâimmigrer en IsraĂ«l. « Mes parents nâĂ©taient pas sionistes, mais mon pĂšre a compris pĂ©dagogiquement quâil fallait nous permettre dâaller Ă Bnei Akiva en France.
En IsraĂ«l, il est devenu enseignant Ă Kfar Hasidim, a encadrĂ© de jeunes immigrĂ©s et a fondĂ© une famille. « En IsraĂ«l, je me suis mariĂ©, ma femme et moi avons eu quatre enfants, 22 petits-enfants et six arriĂšre-petits-enfants â et un autre en route. Je vis dans la capitale dâIsraĂ«l â Ă JĂ©rusalem, et câest la meilleure vengeance que je puisse demander Ă la France qui nâĂ©tait soi-disant pas antisĂ©mite, mais je ne voudrais vivre dans aucun autre pays. Câest le message que je veux leur faire passer », a conclu Moshe.
« Nâoublie jamais que tu es juif »
Simone Gershenson (anciennement Gershenfish), 88 ans, de HaĂŻfa, Ă©tait une fillette de sept ans lorsque la guerre est arrivĂ©e en France. « Mes parents sont venus en France de Pologne aprĂšs des incidents antisĂ©mites qui sây Ă©taient produits. En 1941, ils ont commencĂ© Ă parler de persĂ©cution des Juifs. A cette Ă©poque, il y avait dĂ©jĂ des interdictions pour les Juifs comme des badges jaunes, et il est interdit de prendre les transports en commun, et tous sortes dâinterdictions », a-t-elle dit.
Sa mĂšre a Ă©tĂ© la premiĂšre victime de la famille. « Un jour, un Allemand a soudainement frappĂ© Ă la porte. Ma mĂšre nous a dit, Ă nous les enfants, de nous cacher sous les lits. Elle lui a ouvert la porte avec un bĂ©bĂ© sur les mains quâelle ne pouvait pas cacher. Nous pensions que seuls des hommes Ă©taient emmenĂ©s, alors papa sâest cachĂ© dans une maison de fous et maman Ă©tait avec nous. « JâĂ©tais française et jâai demandĂ© Ă ma mĂšre de venir avec elle », se souvient-elle.
« Le lendemain, papa nous a emmenĂ©s voir maman en prison », dit Simone. « Je lâai vue dans une petite piĂšce avec des dizaines de mĂšres juives qui attendaient. Ma mĂšre nous a remarquĂ©s et elle nous a criĂ© dessus, je me souviens de son regard dur et ses cheveux Ă©taient en dĂ©sordre. Jâavais tellement peur que je me suis enfuie dâelle â câest comme ça que je lui ai dit au revoir â câest difficile pour moi Ă ce jour que ce soit sa derniĂšre image dâelle. Dans la cargaison numĂ©ro 6, ma mĂšre a Ă©tĂ© envoyĂ©e Ă Auschwitz. Nous avons reçu une carte postale dâun inconnu aprĂšs la guerre. »
De lĂ a commencĂ© le voyage de survie de Simone et de son frĂšre. « Nous sommes restĂ©s Ă la maison avec mon pĂšre pendant encore deux mois. Puis il mâa emmenĂ© avec ma sĆur dans un orphelinat Ă©loignĂ©. Le train Ă©tait plein dâAllemands, mais nous avions dĂ©jĂ appris Ă cacher le badge jaune. LĂ , il nous a dit au revoir et mâa dit : « Nâoubliez jamais que vous ĂȘtes juifs et restez ensemble. « Je lâai vu sâĂ©loigner et câest tout, je ne lâai plus revu, raconte-t-elle. Au bout dâun mois et demi, on nous a informĂ©s quâils lâavaient emmenĂ©.
« Pendant la guerre, nous ne savions rien, nous pensions que la guerre finirait et que nous allions tous nous unir », dit-elle, mais cet espoir sâest Ă©vanoui. « Il (mon pĂšre â MK) a cachĂ© mes deux frĂšres Ă une chrĂ©tienne qui a cachĂ© deux autres filles juives. Un jour, nous lâavons dĂ©noncĂ©e et lui avons demandĂ© de transfĂ©rer les deux garçons. « Ils ont tuĂ© mon petit frĂšre de quatre ans et mon deuxiĂšme frĂšre sâest cachĂ© dans une gare pendant toute la durĂ©e de la guerre sous un faux nom. »
AprĂšs la libĂ©ration, les frĂšres survivants ont cherchĂ© ce qui restait de leur famille. « AprĂšs la guerre, nous sommes allĂ©s au seul endroit oĂč nous pensions que les parents ou dâautres Juifs seraient â une synagogue de la communautĂ©. LĂ , des soldats juifs amĂ©ricains nous attendaient et nous ont aidĂ© Ă trouver mon frĂšre pour rejoindre notre tante en Suisse, et de lĂ nous avons immigrĂ© en IsraĂ«l », se souvient-elle. « En montant Ă bord dâun navire dâimmigrants illĂ©gaux en route vers Eretz Yisrael, un inconnu nous a donnĂ© une grande valise. Lorsque nous sommes arrivĂ©s Ă Atlit, quelquâun dâautre nous lâa prise â aujourdâhui, je sais que câest ainsi que nous avons transfĂ©rĂ© des armes Ă lâIrgoun.
« A MikvĂ© IsraĂ«l, mon frĂšre dâune institution Ă Petah Tikva et moi dâune institution Ă Raanana. « CâĂ©tait trĂšs difficile, dâautant plus quâil nây avait plus dâautres parents et que papa nous a demandĂ© de rester unis, raconte-t-elle. Au fil des annĂ©es, jâai traversĂ© beaucoup dâinstitutions ».
En IsraĂ«l, Simone a fondĂ© une famille et est devenu Ă©ducatrice. « AprĂšs mon mariage, nous avons dĂ©mĂ©nagĂ© Ă HaĂŻfa et nous avons deux enfants », dit-elle. «Jâai travaillĂ© comme enseignante et jâai fondĂ© le projet dâengagement personnel que font les Ă©lĂšves de la dixiĂšme Ă la onziĂšme. Mon message est que nous devons continuer Ă donner, malgrĂ© tout, et câest pourquoi jâai mis en place ce projet, qui continue dâavoir du succĂšs dans tout le pays. »
Cinq rescapés ont immigré cette année de France
Selon les donnĂ©es de lâAutoritĂ© des droits des survivants de lâHolocauste, sur les 1 856 survivants français vivant actuellement en IsraĂ«l, 1 459 reçoivent des prestations mensuelles et les autres reçoivent des prestations annuelles. LâĂąge moyen des survivants immigrĂ©s français est de 84,5 ans, dont le plus ĂągĂ© a 102 ans et le plus jeune 77 ans. Au cours de lâannĂ©e Ă©coulĂ©e, cinq survivants de lâHolocauste ont immigrĂ© en IsraĂ«l depuis la France, et un total de 46 survivants ont immigrĂ© en IsraĂ«l depuis le pays au cours des cinq derniĂšres annĂ©es.
« Chaque survivant a sa propre histoire et chaque communautĂ© a son propre hĂ©ritage », explique Abram Torem, directeur de lâHolocaust Survivorsâ Rights Authority. « Il est de notre devoir en tant quâĂtat dâagir et de veiller Ă ce que chaque survivant de lâHolocauste puisse raconter son histoire unique et ait le droit de vivre avec le respect quâil mĂ©rite. »
RĂ©daction francophone Infos Israel News pour lâactualitĂ© israĂ©lienne
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