Un certain nombre d’observateurs communautaires « modérés » qui se présentent à tort comme « pragmatiques » ne manqueront probablement pas de faire preuve une fois de plus d’un tel relativisme qu’il serait utile de leur rappeler les propos tenus dernièrement par le Grand Rabbin de Paris sur Radio J : « Je ne voudrais pas être alarmiste mais il y aura un avant et un après cette résolution du Conseil de l’Europe. »

C’est avec beaucoup de lucidité et un certain courage que le rav Michel Gugenheim poursuit son discours et rappelle notamment qu’on « ne doit pas simplement se contenter de déplorer mais d’avoir une attitude plus offensive comme l’a fait le gouvernement israélien en affirmant que ce type de résolution ne peut pas ne pas être inspiré par des relents d’antijudaïsme ».

Bien qu’il soit peu probable que cette résolution entraine une interdiction prochaine de la circoncision en France, les résolutions du Conseil de l’Europe n’étant pas contraignantes bien qu’elles soient généralement considérées comme des recommandations en matière de respect des droits de l’Homme par les pays européens, il n’en demeure pas moins que ce texte annonce clairement une évolution des mentalités en mettant fin au consensus qui existait sur cette question depuis la Shoah. Dès lors, nous pouvons considérer avec raison que la résolution du Conseil de l’Europe est une simple étape avant l’offensive finale des détracteurs de la Brit Milah dont le seul objectif est d’imposer l’interdiction de cette dernière. Face à cette menace, nous avons le devoir de nous mobiliser et de rappeler un certain nombre de vérités en tant que juifs et citoyens convaincus que la liberté religieuse est une valeur non négociable.

Les dons sont la bienvenue en cette situation particulièrement difficile  :

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Avez-vous déjà entendu un juif témoigner durant sa vie d’adulte à propos de la « violation d’intégrité physique » (sic) dont il aurait été victime plus jeune ? Un homme circoncis depuis la naissance ne s’interroge pas sur la question. Par conséquent, il n’éprouve pas de regret ni de sentiment de handicap liés à sa condition. Parce qu’aucun enfant n’invoquera jamais les « normes imposées par les droits de l’Homme » (sic) pour reprocher à ses parents leur respect d’une tradition plusieurs fois millénaire, il serait temps de rappeler aux technocrates européens et aux militants anti-circoncision qu’ils ne disposent d’aucune légitimité pour imposer leurs opinions à des adultes qui restent libres de transmettre à leurs enfants l’éducation, les valeurs et les traditions religieuses de leur choix.

On peut également s’interroger sur le caractère réellement démocratique d’un État qui s’apprêterait à s’immiscer avec force dans la sphère familiale ainsi qu’à légiférer sur ce qui relève pourtant de la plus stricte intimité personnelle. Dans tout État de droit qui se respecte, les parents ne disposent pas seulement de cette liberté fondamentale d’éducation et de transmission : en tant que responsables de l’enfant mineur, ils sont aussi habilités à faire des choix au nom de ce dernier. Il en est ainsi lorsqu’un garçon doit être circoncis pour phimosis et que ses parents décident d’une opération. Pourquoi le Conseil de l’Europe met-il en avant l’absence de consentement de la part de l’enfant en cas de circoncision rituelle seulement ? Comment expliquer ce refus de mettre sur un même plan la circoncision rituelle avec l’opération médicale ? Faudrait-il y voir une énième attaque contre la liberté de culte en Europe ?

D’un point de vue scientifique, les éléments avancés par les opposants à la circoncision reposent généralement sur des témoignages biaisés ou relevant de l’exception à défaut de s’appuyer sur des études fiables confirmées par des données représentatives. Ils expliquent ainsi que la pratique de la circoncision entrainerait des conséquences psychologiques chez l’enfant en dehors des risques inhérents qu’elle comporte. Dans le judaïsme, les règles qui encadrent la circoncision sont tellement précises et strictes qu’elles permettent d’éviter de possibles dérives. C’est ainsi que la Brit Milah se pratique -sauf cas exceptionnel- à l’âge de huit jours alors qu’elle est réalisée par une personne formée et habilitée, c’est-à-dire le « Mohel ». De plus, un grand nombre d’études à l’image de celle rapportée par le gouvernement israélien et réalisée par l’American Academy of Pediatrics démentent catégoriquement les allégations mensongères et pseudo-scientifiques avancées par les opposants à la circoncision.

Cette dernière n’est pas non plus une mutilation, ce terme faisant référence à « l’amputation d’un membre ou d’un organe » selon le dictionnaire. En réalité, la circoncision est une simple opération qui consiste à enlever le prépuce. Elle représente par conséquent un acte chirurgical mineur dont les vertus médicales, hygiéniques et sanitaires sont difficilement contestables.

A l’heure où le relativisme gagne chaque jour du terrain en Europe et qu’une institution de première importance fait un parallèle entre la Brit Milah et l’excision, nous devons identifier la nature de nos opposants et leurs possibles motivations. Force est de constater que ceux qui s’attaquent aujourd’hui à nos acquis les plus fondamentaux ne le font pas au nom du conservatisme, du nazisme ou de « l’infériorité de la race juive ». Bien au contraire, ils se présentent souvent comme des « progressistes » et se font les défenseurs autoproclamés des « droits de l’homme » et de la « protection du bien être animal ». Et si le cynisme dont ils font preuve est inquiétant, c’est parce que ces derniers disposent généralement du soutien d’une opinion publique facilement influençable. Les détracteurs de nos pratiques religieuses élémentaires détiennent ainsi un pouvoir de nuisance d’autant plus important lorsqu’on sait qu’ils composent une large coalition faisant presque le consensus à l’extrême gauche ainsi qu’à l’extrême droite de l’échiquier politique sans oublier de comptabiliser un certain nombre de militants de gauche et de droite, les premiers étant sensibilisés par le caractère « progressiste » des combats en question tandis que les seconds se montrent davantage préoccupés par certaines conséquences liées à l’expansion de l’islam sur le « Vieux Continent ».

Le Conseil de l’Europe et les opposants de nos pratiques religieuses les plus élémentaires se caractérisent par une indignation sélective renforcée par leur silence à propos de certaines traditions européennes qui prêtent à polémique telles que la corrida et la chasse. Dans notre Mémoire, les campagnes visant à présenter l’abattage et la circoncision rituelles comme relevant de « pratiques barbares ou inhumaines » heurtent non seulement la sensibilité de chacun mais résonnent tel un écho aux accusations d’antan portant sur le meurtre rituel d’enfants chrétiens par les juifs. Volontairement ou pas, leurs promoteurs contribuent encore à la diffusion de clichés qui servent par la suite de terreau aux discours populistes et aux actes antisémites. Nous assistons ainsi à une volonté -intentionnelle ou inconsciente- de nuire aux communautés juives d’Europe. A l’heure où les traditions ancestrales (pour ne pas reprendre les termes d’un ancien Premier ministre français) sont dénoncées et combattues, il serait bon de rappeler que l’antisémitisme en est également une en Europe…

Par Yonatane Laik – Alyaexpress-News.