Deux responsables politiques français ont déposé une proposition de loi visant à rendre illégales les « formes renouvelées d’antisémitisme », rapporte Le Point mercredi.
Le projet de loi a été déposé par la députée de la 8e circonscription des Français de l’étranger, Caroline Yadan, et l’ancienne ministre de l’Égalité et députée à l’Assemblée nationale, Aurore Bergé. L’ancien président François Hollande aurait également accepté de cosigner le texte.
Le projet de loi, cosigné par 90 autres députés, propose une nouvelle loi qui codifierait les manifestations modernes de l’antisémitisme, notamment les comparaisons des Juifs aux nazis, les appels à la destruction d’Israël et la vénération du Hamas.
Yadan a déclaré qu’elle voulait rendre toute rhétorique du type « Du fleuve à la mer », en particulier là où les cartes d’Israël ont été remplacées par celles de la Palestine, punissables par la loi.
Affiche pro-palestinienne accrochée sur le campus de l’université Northwestern (crédit : Northwestern Hillel)
« Ceci, pour que Rima Hassan ne puisse plus considérer le Hamas comme un groupe de résistance et rester impuni ou qu’on ne puisse plus afficher un drapeau nazi accompagné d’une étoile de David sur ses réseaux sociaux », a-t-elle expliqué.
Rima Hassan, femme politique franco- palestinienne du parti La France Insoumise, a propagé la fausse accusation selon laquelle des « chiens israéliens » violeraient des prisonniers palestiniens et a appelé les « sionistes » à restituer les organes qu’elle prétend avoir été volés aux Palestiniens.
« C’est cette porosité de la haine qu’il faut dénoncer », a déclaré Yadan. « Car c’est ce qui définit l’antisémitisme dans sa forme actuelle et il évolue depuis des millénaires. »
Imposer à Israël une norme différente
Dans son entretien avec Le Point, Yadan a évoqué l’hypocrisie qui consiste à considérer Israël comme un pays différent de celui des autres. Cette hypocrisie est codifiée dans la définition de l’antisémitisme de l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste, selon laquelle « appliquer deux poids deux mesures en exigeant d’Israël un comportement qui n’est ni attendu ni exigé d’aucune autre nation démocratique » est une forme d’antisémitisme.
Il est également mentionné dans les « trois D de l’antisémitisme », un critère formulé par le célèbre homme politique israélien Natan Sharansky, ancien refusnik soviétique, auteur et militant des droits de l’homme, comme modèle pour distinguer la critique légitime d’Israël de l’antisémitisme. Il soutient que la délégitimation, la diabolisation et le double standard sont les trois tests permettant de différencier les deux.
Hillel Neuer, fondateur de UN Watch, et d’autres ont souligné que le nombre de résolutions de l’Assemblée générale des Nations Unies sur les droits de l’homme visant Israël par rapport à d’autres pays est un exemple de ce double standard. De 2015 à 2022, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté 140 résolutions sur Israël et 68 sur d’autres pays.
« Aucun autre État au monde n’est l’objet d’appels à sa destruction ou à la négation de son existence », a déclaré Yadan. « L’Afghanistan ou l’Iran ne sont jamais remis en cause malgré leurs politiques répressives et totalitaires. »
YADAN a déclaré que son expérience en tant qu’avocate l’a aidée à élaborer le projet de loi, affirmant qu’elle a travaillé dur pour élaborer quelque chose qui ne serait pas punissable par le Conseil constitutionnel.
« Sans entrer dans des détails techniques juridiques, je voulais aborder la question de la comparaison faite entre l’ Holocauste et les Juifs en Common Law », a-t-elle dit, ajoutant qu’elle était consciente qu’un tel amendement poserait des difficultés étant donné que beaucoup sont attachés aux lois concernant la liberté de la presse.
« La solution juridique la plus envisageable était d’aborder ce sujet dans le cadre de la loi Gayssot et d’ajouter que la contestation de la Shoah est punissable, même si elle est présentée de manière dissimulée ou vague par voie d’insinuation, de comparaison, d’analogie ou de connexité. »
« En conséquence, comparer l’État d’Israël au régime nazi serait puni comme une banalisation scandaleuse de l’Holocauste », a-t-elle déclaré.
La loi Gayssot, promulguée en 1990, a érigé en infraction pénale en France la remise en cause de l’existence ou de l’étendue des crimes du parti nazi. La négation de l’Holocauste est ainsi devenue illégale en France.
Mme Yadan a ajouté que sa proposition n’était pas vraiment nouvelle, car elle était déjà codifiée dans la loi française. Le seul détail nouveau, a-t-elle dit, était le déni ou l’appel à la destruction d’Israël.
Elle a déclaré au Point qu’elle ne pensait pas que le parti de la France Insoumise voterait pour.
Mais elle ne « recherchait pas le soutien des députés LFI car ils font justement partie intégrante du problème [de l’antisémitisme en France] en légitimant la haine des juifs dans notre pays sous couvert d’antisionisme ».
Elle a fait référence aux mots du philosophe et musicologue français Vladimir Jankélévitch : « L’antisionisme n’est rien d’autre qu’un antisémitisme justifié enfin rendu accessible à tous. C’est la permission d’être démocratiquement antisémite. »
La loi Yadan a également été soutenue par Sylvain Maillard, qui a soutenu la résolution visant à adopter la définition de l’antisémitisme de l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste.
Mais, selon Yadan, la situation « horrifiante » de l’antisémitisme en France a rendu nécessaire d’aller plus loin. « Il fallait passer à une nouvelle étape pour lutter contre cette haine. »