Le mouvement politique naissant en France opposé au vaccin COVID-19 est inondé d’une propagande antisémite qui rappelle, selon un analyste, la campagne visant à chasser les Juifs de la profession médicale à l’époque nazie.
Alors que plus de 100 000 personnes ont participé samedi dernier à des manifestations nationales dénonçant le vaccin comme un « acte de violence », plusieurs médias ont souligné la présence de plusieurs pancartes affichant le mot « Qui? ». Le même mot est utilisé comme titre d’une chaîne d’extrême droite sur YouTube qui a diffusé des interviews de manifestants à Paris samedi dernier.
Selon le journal Libération , le contenu de la chaîne « regorge de clichés antisémites », parmi lesquels la fabrication médiévale selon laquelle les Juifs sont des « puits d’empoisonnement », qui remonte à la peste noire du XIVe siècle. La chaîne a accumulé plus de 10 000 vues depuis sa mise en ligne dimanche.
La propagation rapide du « Qui ? mème parmi les militants anti-vaccination au cours des six dernières semaines a suivi une interview télévisée du 22 juin avec un général de l’armée française à la retraite qui s’est lancé dans une diatribe antisémite qui évitait d’utiliser le mot « juif ».
Le général Dominique Delawarde fait désormais face à des poursuites pénales pour ses propos dans un échange avec le journaliste Claude Posternak, dans lequel il a déclaré : « Vous savez qui contrôle le pack média dans le monde et en France. Qui contrôle le Washington Post, le New York Times, BFMTV et tous les journaux.
Delawarde a ensuite ajouté sarcastiquement : « Qui sont ces gens ?
Pressé par Posternak à qui il faisait référence, Delawarde a répondu : « C’est une communauté que vous connaissez très bien.
Les remarques sur les Juifs en tant que thème de campagne par des éléments du mouvement anti-vaccination se sont chevauchées avec un antisémitisme de plus en plus venimeux et explicite.
Sur le « Qui? » sur la chaîne YouTube, un présentateur et un manifestant anti-vaccination ont discuté de l’opportunité d’un génocide ciblant les Juifs. Après avoir souscrit à l’affirmation du présentateur selon laquelle « ils devraient faire leurs valises et partir », la manifestante a exprimé sa crainte que même si les Juifs étaient expulsés de France, « ils nous maintiendraient en ligne de l’extérieur ». Elle a ensuite ajouté qu’« ils ont beaucoup de ressentiment envers les Blancs, ils nous considèrent comme des bêtes… C’est écrit dans le Talmud ». D’autres mythes antisémites qui se propagent à travers le mouvement incluent l’affirmation selon laquelle le mot « Covid » est l’hébreu pour « possession démoniaque ».
En conséquence, les médecins juifs et les responsables de la santé publique se sont retrouvés dans la ligne de mire. Une enquête du journaliste Saïd Mahrane pour le magazine Le Point a relaté les expériences choquantes de plusieurs professionnels de la santé juifs depuis l’interview télévisée de Delawarde. Des barbes antisémites répétées ont été lancées contre Jérôme Salomon, un infectiologue qui exerce les fonctions de directeur général français de la santé publique, Alain Fischer, un éminent expert en immunologie, et Mathias Wargon, un médecin urgentiste marié à la ministre du gouvernement Emmanuelle Wargon.
Les attaques contre ces personnalités juives, ou perçues comme telles, ont suivi un modèle établi pendant l’occupation nazie de la France, a expliqué Mahrane.
« S’il est absurde de comparer le sort des juifs sous l’occupation à ceux qui refusent la vaccination contre le Covid, il est possible de voir un continuum dans les propos antisémites visant les médecins juifs des années 1940 et ceux tenus contre certaines [personnes] aujourd’hui « , a écrit Mahrane. « Les mêmes mécanismes sont mis en branle (l’identification des professionnels de santé prétendument juifs par la consonance de leur nom ou par leur apparence, la mise en évidence du titre de ‘professeur’ ou de ‘chef de département’ pour souligner un statut élevé, leur mariage vie pour faire preuve d’endogamie), et les mêmes soupçons (déloyauté, communautarisme, rapport à l’argent, conflits d’intérêts, complots).
D’autres manifestations anti-vaccination sont attendues ce week-end avant l’introduction lundi d’une exigence de vaccin pour entrer dans la plupart des lieux publics en France.
Les leaders du mouvement anti-vaccination en France comprennent l’auteur-compositeur Francis Lalanne et Florian Philippot, ancien vice-président du parti d’extrême droite alors connu sous le nom de Front national qui siège désormais au Parlement européen.