Sans trop savoir, ni pourquoi, ni comment, je me trouvais aux derniers rangs d’une église. Beaucoup d’images représentant des scènes champêtres et bucoliques ornaient les murs froids de ce lieu de « culte ».
Ces tableaux montraient un homme portant une croix en « sac à dos ». Je songeais qu’il devait être difficile de se mouvoir avec un tel bagage.

« Mangez, ceci est mon corps »
Parmi ces nombreuses représentations picturales, il y avait aussi beaucoup de sculptures de cet homme crucifié. Écoutant le maître de cérémonie, j’eus la désagréable sensation que le Christ était en fait élevé au niveau du divin. En regardant cette croix, je ne pus m’empêcher d’imaginer qu’elle représentait une épée plantée sur le sol, celui se trouvant si près de nos pieds. Le curé devait avoir la soixantaine, son discours s’émaillait de psalmodie. Le message était tout à la fois redondant, niais et doctrinal….

« Mangez, ceci est mon corps »
Peut-être était-ce la disgrâce de ce lieu mais d’un coup, mon esprit s’envola.

La transsubstantiation établie par le concile du Latran 4 au XIIème siècle allait permettre lors de l’eucharistie de consommer (symboliquement) la chair du Christ. En ce temps-là, l’église catholique avait un pouvoir considérable sur le peuple.
Cette anthropophagie psychanalytique fut le point de départ d’un syndrome collectif qui eut pour funeste conséquence de structurer l’antisémitisme.
En effet, dès le XIIIème, les pogroms, surtout en Europe du nord, s’intensifient. C’est aussi le point de départ de cette rumeur nous attribuant la paternité de meurtres rituels… Tout se passe comme si l’indigestion occasionnée par ce cannibalisme provoquait un tel trouble, qu’il faille trouver des responsables: et qui mieux que nous, nous qui avons tué leur Christ…

Remontant des limbes de ce rêve vénéneux, je repris conscience. Mon radio-réveil venait de se déclencher. Le cœur battant, immobile dans mon lit, j’entendais de ma radio :
« Aujourd’hui le pape François vient de reconnaître la Palestine. »

« Ceci est mon sang, buvez-le »