Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou et le président français François Hollande ont rendu hommage jeudi 1er novembre à Toulouse aux victimes de Mohamed Merah, lors d’une cérémonie au collège-lycée Ohr Torah (ex-Ozar-Hatorah), où trois enfants et un enseignant ont péri sous les balles du tueur au scooter.
Peu avant 14 heures, François Hollande a accueilli Benjamin Netanyahou dans l’établissement où s’est déroulée la cérémonie.
Le président français a assuré à une communauté juive inquiète qu’il veillerait à sa sécurité et a admis des « failles » dans l’enquête Merah. La France combattra « sans relâche » l’antisémitisme car la sécurité des Juifs est « une cause nationale », a déclaré le chef de l’Etat
Arrivé sur place quelques minutes avant le Premier ministre israélien, le chef de l’Etat en a profité pour discuter avec des élèves de l’établissement et leurs parents. Le ministre de l’Education, Vincent Peillon, et le maire PS de Toulouse, Pierre Cohen, étaient également présents.
Emotion
Dans un moment de forte émotion, le directeur de l’établissement, Yaacov Monsonego, dont la fille Myriam a été abattue par Merah a pris la parole : « Un acte monstrueux de haine a pulvérisé mon univers. (…) La plaie demeurera béante à jamais ».
Avant une prière, Eva Sandler, femme de l’enseignant Jonathan Sandler et mère de deux des enfants tués à Toulouse, s’est ensuite exprimée : « Un peu de lumière chasse beaucoup d’obscurité ».
Peu après 15 heures, c’est François Hollande qui est monté à la tribune : « Le 19 mars 2012, la France était saisie d’effroi par ce drame », a-t-il rappelé avant d’ajouter : « Je veux devant vous rappeler la détermination de la République française à combattre sans relâche l’antisémitisme ». Pour le chef de l’Etat, la garantie de la sécurité des juifs est « une cause nationale ».
François Hollande a aussi précisé qu’il existe des failles dans l’enquête sur le drame de Toulouse. Il a assuré que « toute la lumière sera faite ».
Benjamin Netanyahou a ensuite pris la parole, s’exprimant d’abord assez longuement en français, avant de poursuivre « dans la langue de la bible ».
« Mon ami François Hollande parle et agit (contre l’antisémitisme) avec détermination », a déclaré le Premier ministre israélien.
« Vous avez dit hier que ceux qui s’en prennent aux Juifs s’en prennent à la France tout entière. C’est exactement ce que démontre l’histoire », a ajouté Benjamin Netanyahou faisant allusion à ses entretiens mercredi avec François Hollande à l’Elysée.
« Le meurtrier de Toulouse n’a pas seulement tué des Juifs mais aussi des soldats français, musulmans et chrétiens, sans aucune distinction. La haine barbare de ces assassins ne menace pas seulement les juifs mais la civilisation tout entière », a poursuivi le Premier ministre. Selon lui, le peuple juif a aujourd’hui « les moyens de se défendre contre ceux qui veulent nous rayer de la carte ».
Si François Hollande et Benjamin Netanyahou ont abordé mercredi à Paris la question iranienne et la relance du processus de paix israélo-palestinien, ils viennent à Toulouse à la rencontre d’une communauté encore traumatisée, sept mois après le drame, et inquiète de voir les manifestations antisémites se multiplier.
Cette visite conjointe est « un message très fort d’unité contre cette menace qui pèse sur toute l’humanité », salue la présidente en Midi-Pyrénées du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), Nicole Yardeni.
Netanyahou en campagne électorale
Jusqu’au 19 mars 2012, date de l’attaque, les juifs de Toulouse n’imaginaient pas pouvoir être la cible d’un tueur se réclamant d’al-Qaïda. Depuis, le trouble ne s’est pas effacé. Benjamin Netanyahou est en campagne électorale mais les juifs de Toulouse voient dans sa visite celle d’un homme d’Etat rassurant et apaisant, soucieux de leur sécurité.
Mercredi à Paris, François Hollande a reconnu que l’antisémitisme existait en France et assuré de sa détermination à « pourchasser, poursuivre, éradiquer » ce fléau.
Benjamin Netanyahou a appelé la communauté israélite française à s’installer en Israël et apprécié la détermination de Paris à lutter contre l’antisémitisme.
La représentante du CRIF à Toulouse juge que Benjamin Netanyahou « est dans son rôle d’exprimer cette position tout à fait classique, ayant pour mission de réunir les Juifs en Israël », puis affirme : « L’avant-dernier des pires cauchemars d’un Juif, c’est qu’il soit obligé de quitter le pays dans lequel il vit car il a cessé d’être démocratique. Mais le pire cauchemar, c’est qu’il n’y ait plus Israël pour l’accueillir ».
Une prière et des discours
La cérémonie de Toulouse a débuté à 13h30. Elle a rassemblé des élèves, leurs parents, le personnel de l’école, anciennement Ozar Torah et rebaptisée Ohr Torah après la tuerie, des responsables de la communauté juive de la ville, et des élus pour des témoignages, une prière et des discours de Benjamin Netanyahou et François Hollande.
Le Premier ministre de l’Etat hébreu devait ensuite s’entretenir avec des représentants communautaires. C’est la première fois qu’un Premier ministre israélien se rend à Toulouse.
Lors des obsèques à Jérusalem des quatre victimes juives de Merah, Benjamin Netanyahou avait promis de rendre visite à la communauté toulousaine, la quatrième de France avec 20.000 membres, dont de nombreux sépharades d’Afrique du Nord.
Des mesures de sécurité exceptionnelles ont été prises. La circulation sur le périphérique toulousain devait être suspendue au passage des deux convois entre l’aéroport et le quartier de la Roseraie, où des rues devaient être bouclée et vidées des véhicules garés le long des trottoirs aux abords de l’établissement.
« Avec le Pape et le président des Etats-Unis, le Premier ministre israélien est certainement la personnalité la plus protégée lors de ses déplacements à l’étranger », selon un responsable policier.
Un attentat évitable ?
Mohamed Merah, 23 ans, a assassiné trois parachutistes les 11 et 15 mars à Toulouse et Montauban, avant l’école juive.
L’attentat contre l’établissement juif était-il évitable? C’est une question récurrente que se posent les juifs toulousains. Notamment depuis que Libération a révélé mercredi que des policiers toulousains des services de renseignement avaient alerté leur hiérarchie, 4 jours avant l’attaque de l’école, d’une possible piste islamique en fournissant une liste de nom comprenant celui de Mohamed Merah.
Favorables ou opposés à la politique de Benjamin Netanyahou, deux manifestations distinctes ont rassemblé chacune 200 personnes à Paris mercredi soir. Pendant ce temps à Toulouse, une centaine de militants d’extrême gauche dénonçait la politique de l’Etat hébreu en Palestine, mais n’avaient pas prévu de mobilisation jeudi, afin de ne pas interférer avec l’hommage aux victimes.
Source : CFCA.