« Les Égyptiens ont commencé à faire travailler les Israélites pour briser leurs corps » (Shemot 113).
Afin de garder le peuple juif occupé afin qu’il n’ait pas le temps de penser aux paroles de Moshe annonçant leur liberté, Pharaon décréta que dorénavant les esclaves juifs devront ramasser leur propre paille tout en conservant leur quota de briques. Pourquoi Pharaon n’a pas seulement doublé son quota? De cette façon, il les aurait forcés à travailler plus dur et aurait bénéficié d’un doublement de la production ?
La Torah décrit notre travail en Egypte comme « avodat parech » , littéralement travail qui brise la personne. Avodat parech est défini comme un travail qui n’a pas de but et qui est conçu uniquement pour maintenir l’esclave occupé (voir Rambam, Hilchos Avadim 116).
Pharaon a compris que rien ne diminue une personne comme ne voyant aucun but à son activité, aucun résultat dans lequel il peut s’enorgueillir. Ainsi, les esclaves juifs construisaient des « arei miskenot » , qui peuvent être traduits en « villes pitoyables ». Ces villes, dit le Midrash, ont été construites sur des fondations de sable, et renversées immédiatement après la construction, pour être reconstruites à nouveau. Pour le seul objectif de doubler la charge de travail des Israélites sans doubler la production qui correspond parfaitement aux plans de Pharaon.
Le travail peut être exaltant, épanouissant et ennoblissant, mais seulement quand c’est la mélakha – un travail ciblé , travailler avec un but. Mais le travail sans but ( avodah ) ne sert qu’à briser l’esprit d’une personne.
Un prisonnier dans un camp de travail soviétique a été confiné dans sa cellule pendant dix ans et forcé de tourner une poignée qui dépassait de sa cellule. On lui a dit que la poignée servait à faire tourner un moulin à farine de l’autre côté, mais après avoir été libéré, il a découvert que la poignée était reliée à rien. La réalisation qu’il avait travaillé pour rien était plus écrasante pour lui que les dix ans d’emprisonnement.
Le Talmud (Beitzah 16a) appelle les Babyloniens stupides pour avoir mangé leur pain avec du pain. Les « ba’alei mussar » expliquent qu’ils ont été pris dans un cercle vicieux sans autre but que leur propre perpétuation. Ils ne travaillaient que pour gagner suffisamment de pain pour avoir la force de travailler un autre jour et gagner plus de pain pour se nourrir un autre jour. Travailler pour manger afin que l’on puisse travailler pour plus de résultats est une vie sans but. Lorsque la nécessité de gagner sa vie est retirée d’une telle vie, elle perd toute signification. C’est pourquoi tant de retraités deviennent déprimés et même suicidaires lorsqu’ils arrêtent de travailler.
Ceux qui ont la Torah sont épargnés par cette situation difficile, car ils réalisent que tout ce qu’ils font est d’assurer la vie éternelle dans le prochain monde. Cette reconnaissance donne du sens et de la valeur à toutes les activités de la vie, car plus le but est important, plus l’effort est important.
Par Rav Zev Leff.