Que s’est-il vraiment passĂ© Ă  Wuhan ?

Le directeur du laboratoire de Wuhan a publiĂ© des Ă©tudes sur la manipulation du coronavirus de la chauve-souris d’une maniĂšre qui pourrait ĂȘtre plus infectieuse pour l’homme.

Vendredi dernier, un rapport tant attendu et contestĂ© de l’Organisation mondiale de la santĂ© a de nouveau Ă©tĂ© retardĂ©. C’était censĂ© ĂȘtre une sorte d’autopsie sur le voyage en Chine d’une Ă©quipe de scientifiques internationaux dirigĂ©e par l’OMS qui a eu lieu plus tĂŽt cette annĂ©e.

La question : comment le SRAS-CoV-2, le virus qui cause le COVID-19,  est-il nĂ© ? Parmi les principales thĂ©ories examinĂ©es : a-t-il Ă©tĂ© accidentellement divulguĂ© d’un laboratoire de Wuhan ou provenait-il d’animaux infectĂ©s dans un marchĂ© humide de cette ville ?

L’enquĂȘte de l’OMS est loin d’ĂȘtre exhaustive, car, comme il l’a fait depuis le dĂ©but de l’épidĂ©mie, le gouvernement chinois a retenu des informations.

Jamie Metzl : Je n’appellerais pas vraiment ce qui s’est passĂ© maintenant une enquĂȘte. C’est essentiellement un voyage d’étude avec de nombreux accompagnateurs et trĂšs bien organisĂ©.

Lesley Stahl : Voyage d’étude ?

Jamie Metzl : voyage d’étude. Tout le monde s’imagine qu’il s’agit d’une sorte d’enquĂȘte complĂšte. Ce n’est pas ça. Ce groupe d’experts n’a vu que ce que le gouvernement chinois voulait qu’ils voient.

Jamie Metzl – ancien responsable du NSC dans l’administration Clinton et membre d’un comitĂ© consultatif de l’OMS sur le gĂ©nie gĂ©nĂ©tique – est l’un des plus de deux douzaines d’experts, y compris des virologues, qui ont signĂ© une lettre ouverte plus tĂŽt ce mois-ci appelant Ă  une nouvelle enquĂȘte internationale avec un retour en Chine. La lettre indique que l’équipe de l’OMS n’avait pas l’indĂ©pendance ou l’accĂšs « pour mener une enquĂȘte complĂšte et sans restriction », en particulier sur une Ă©ventuelle fuite accidentelle d’un laboratoire de l’Institut de virologie de Wuhan, dans la ville oĂč a Ă©tĂ© produite la premiere Ă©pidĂ©mie.

Jamie Metzl : Il faudrait se poser la question : « Pourquoi Ă  Wuhan ? » Pour citer Humphrey Bogart : « De tous les bars de toutes les villes du monde, pourquoi Wuhan ? » Ce que Wuhan possĂšde, c’est l’institut chinois de virologie de niveau quatre, avec probablement la plus grande collection au monde de virus de chauve-souris, y compris les coronavirus de chauve-souris.

Lesley Stahl : J’avais vu que l’équipe de l’Organisation mondiale de la santĂ© ne passait que 3 heures dans le laboratoire.

Jamie Metzl : Pendant qu’ils Ă©taient lĂ , ils n’ont pas demandĂ© l’accĂšs aux enregistrements, aux Ă©chantillons et au personnel clĂ©.

C’est Ă  cause des rĂšgles de base que la Chine a Ă©tablies avec l’OMS, qui n’a jamais eu le pouvoir de faire des demandes ou d’appliquer des protocoles internationaux.

Jamie Metzl : Tout d’abord, il a Ă©tĂ© convenu que la Chine aurait un droit de veto sur
 qui pourrait ĂȘtre en mission. En second lieu


Lesley Stahl : Et l’OMS Ă©tait d’accord avec cela.

Jamie Metzl : L’OMS est d’accord avec cela. En outre, l’OMS a convenu que dans la plupart des cas, la Chine effectuerait la recherche primaire. Et puis il partagerait simplement ses dĂ©couvertes


Lesley Stahl : Non.

Jamie Metzl : –avec ces experts internationaux. Ces experts internationaux n’étaient donc pas autorisĂ©s Ă  faire leurs propres recherches primaires.

Lesley Stahl : Attendez, dites-vous que la Chine a fait la recherche et a montrĂ© les rĂ©sultats au comitĂ© et c’est tout ?

Jamie Metzl : Plus ou moins ça


Lesley Stahl : Wow.

Jamie Metzl : – C’était ça. Pas du tout. Mais c’était plus ou moins ça. Imaginez si nous avions demandĂ© Ă  l’Union soviĂ©tique de faire une co-enquĂȘte sur Tchernobyl. Cela n’a vraiment pas de sens.

La Chine avait exclu un accident de laboratoire bien avant l’arrivĂ©e de l’équipe de l’OMS Ă  l’aĂ©roport de Wuhan le 14 janvier et a Ă©tĂ© accueillie par des personnes en Ă©quipement EPI complet.

L’équipe comprenait certains des plus grands experts mondiaux sur la façon dont les virus sont transmis des animaux aux humains. Mais alors que dans le passĂ©, il y a eu des fuites accidentelles de virus de laboratoires en Chine qui ont infectĂ© des personnes et en ont tuĂ© au moins un, personne dans l’équipe n’a Ă©tĂ© formĂ© sur la façon d’enquĂȘter officiellement sur une fuite dans un laboratoire.

Ils Ă©taient lĂ  pour une mission de quatre semaines, mais deux d’entre eux ont Ă©tĂ© enfermĂ©s dans cet hĂŽtel en quarantaine. Une fois Ă  l’extĂ©rieur, ils ont eu des Ă©changes tendus avec leurs homologues, une Ă©quipe d’experts chinois, sur leur refus de fournir des donnĂ©es brutes.

Si le virus est originaire d’animaux, l’un des mystĂšres a Ă©tĂ© : comment a-t-il parcouru les mille kilomĂštres depuis les grottes de chauves-souris du sud de la Chine jusqu’à Wuhan ? L’équipe de l’OMS pense avoir trouvĂ© la rĂ©ponse.

Peter Daszak : Ce que nous avons dĂ©couvert dans le cadre de cette mission de l’OMS en Chine, c’est qu’il existe un moyen.

Peter Daszak, membre de l’équipe de l’OMS et expert sur la maniĂšre dont les virus animaux pĂ©nĂštrent dans l’homme, a travaillĂ© sur des flambĂ©es virales antĂ©rieures, y compris en Chine.

Il dit que le chemin ne mĂšne pas au laboratoire de Wuhan, mais va plutĂŽt des fermes d’animaux sauvages du sud de la Chine directement au marchĂ© humide de Wuhan, le marchĂ© des fruits de mer de Huanan.

Peter Daszak : La thĂ©orie est que le virus est passĂ© d’une chauve-souris Ă  l’une de ces fermes d’animaux sauvages. Et puis les animaux ont Ă©tĂ© envoyĂ©s au marchĂ©. Et ils ont contaminĂ© les gens en les manipulant, en les hachant, en les tuant, quoi que vous fassiez avant de cuisiner un animal.

Lesley Stahl : Des animaux sauvages ?

Peter Daszak: Oui, ces


Lesley Stahl : Comme quoi ?

Peter Daszak : C’est un aliment traditionnel. Les civettes sont comme les furets. Il y a aussi un animal appelĂ© blaireau furet. Les lapins, dont nous savons qu’ils peuvent ĂȘtre porteurs du virus. Ces animaux ont Ă©tĂ© amenĂ©s au marchĂ© depuis des fermes situĂ©es Ă  plus de 1 000 milles.

Lesley Stahl: Avez-vous pu tester l’un des animaux trouvĂ©s sur le marchĂ© de Wuhan pour le virus ?

Peter Daszak : Eh bien, l’équipe chinoise l’avait fait et ils ont trouvĂ© des animaux laissĂ©s dans les congĂ©lateurs. Ils ont Ă©tĂ© testĂ©s et nĂ©gatifs. Mais le fait que ces animaux soient lĂ  est l’indice.

Lesley Stahl : Mais n’y a-t-il pas de preuves directes que l’un de ces animaux a Ă©tĂ© rĂ©ellement infectĂ© par le virus de la chauve-souris ?

Peter Daszak : Exactement. Maintenant, ce que nous devons faire, c’est aller dans ces fermes et enquĂȘter. Parlez aux agriculteurs. Parlez Ă  vos proches. Testez. VĂ©rifiez d’abord s’il y a eu des pics de virus.

Lesley Stahl : Donc, l’équipe ne sait pas vraiment si l’un des agriculteurs ou des camionneurs a Ă©tĂ© infectĂ© ?

Peter Daszak : Personne ne le sait encore. Personne n’y est allĂ©. Personne ne leur a demandĂ©. Personne ne les a testĂ©s. C’est en suspens.

MalgrĂ© ces questions sans rĂ©ponse, l’équipe de l’OMS et ses homologues chinois ont convenu que cette hypothĂšse Ă  sens unique – des grottes de chauves-souris aux boucheries comme celles-ci – est l’explication la plus probable.

Peter Daszak : Quelque 75% des maladies Ă©mergentes passent des animaux aux humains. Nous l’avons dĂ©jĂ  vu. Nous l’avons vu en Chine avec le SRAS.

Lesley Stahl : La théorie des fuites de laboratoire est-elle plus ou moins spéculative ?

Peter Daszak : Pour qu’une fuite accidentelle se produise qui
 menant au COVID, le virus qui cause le COVID devrait se trouver dans le laboratoire. Ils n’ont jamais eu de preuve d’un virus comme le COVID dans le laboratoire.

Lesley Stahl : Ils n’ont jamais eu le virus COVID-19


Peter Daszak : Pas avant


Lesley Stahl : Dans ce laboratoire ?

Peter Daszak : – avant l’épidĂ©mie, non. Absolument. Il n’y a aucune preuve de cela.

Jamie Metzl n’est pas d’accord, soulignant les propres rapports du laboratoire qui ont envoyĂ© des chercheurs sur le terrain dans des grottes de chauves-souris qui ont ramenĂ© des Ă©chantillons contenant des virus.

Jamie Metzl : Nous savons que parmi ces virus, l’un d’eux est gĂ©nĂ©tiquement le plus Ă©troitement liĂ© au virus SARS-CoV-2.

Lesley Stahl : Mais plus liĂ© n’est pas la mĂȘme chose, non ?

Jamie Metzl : Oui, exactement. Mais nous savons qu’au moins 9 virus ont Ă©tĂ© rapportĂ©s. Et il est trĂšs possible que parmi ces virus, il y en ait un beaucoup plus liĂ© au virus SARS-CoV-2. Et quand j’ai rassemblĂ© toutes ces piĂšces, j’ai dit : «HĂ©, attendez une seconde, c’est une possibilitĂ© rĂ©elle. Nous devons l’explorer. « 

Lesley Stahl : Le chemin que Peter Daszak et l’équipe ont tracé  maintenant cela semble plausible.

Jamie Metzl : Oh, c’est certainement plausible.

Lesley Stahl : TrĂšs, trĂšs plausible.

Jamie Metzl : Non, c’est plausible. Disons que la thĂ©orie est correcte. Vous auriez eu une Ă©pidĂ©mie, peut-ĂȘtre dans le sud de la Chine, oĂč se trouvent ces Ă©levages. Vous avez peut-ĂȘtre vu une sorte de preuve d’une Ă©pidĂ©mie en cours de route.

Lesley Stahl : Et il n’y en avait pas ?

Jamie Metzl : Il n’y en avait pas.

Lesley Stahl : Mais écoutez, votre théorie est également pleine de trous.

Jamie Metzl : Je ne dirais pas que c’est plein de trous, mais c’est incomplet. Nous devons donc accĂ©der aux donnĂ©es pour tester une hypothĂšse pour une autre.

Metzl dit que Peter Daszak a un conflit d’intĂ©rĂȘts en raison de sa collaboration de longue date avec le laboratoire de Wuhan.

Peter Daszak : Je fais partie de l’équipe de l’OMS pour une raison. Et, vous savez, si vous allez travailler en Chine sur les coronavirus et essayer de comprendre leurs origines, vous devez impliquer les personnes qui en connaissent le plus. Et pour le meilleur ou pour le pire, ça l’est.

Il dit que l’équipe a Ă©tudiĂ© la thĂ©orie des fuites lors d’une visite avec des scientifiques du laboratoire et l’a jugĂ©e « extrĂȘmement improbable ».

Peter Daszak : Nous les avons rencontrĂ©s. Nous leur avons dit : « Analysez-vous le laboratoire ? » Et ils ont dit : «Annuellement». « A-t-il Ă©tĂ© auditĂ© aprĂšs l’épidĂ©mie ? » « Oui. » «Quelque chose a-t-il Ă©tĂ© trouvĂ© ? « Non. » «Examinez-vous votre personnel ? « Oui ». Personne n’était


Lesley Stahl : Mais vous ne faites que la croire sur parole.

Peter Daszak : Eh bien, que pouvons-nous faire d’autre ?

Il y a une limite Ă  ce qui peut ĂȘtre fait et nous allons jusqu’à cette limite. Nous leur avons posĂ© des questions difficiles. Ils n’ont pas fait l’objet d’une enquĂȘte prĂ©alable. Et les rĂ©ponses qu’ils ont donnĂ©es nous ont semblĂ© crĂ©dibles, correctes et convaincantes.

Lesley Stahl : Mais les Chinois n’étaient-ils pas impliquĂ©s dans une dissimulation ? Ils ont dĂ©truit des preuves, ils ont puni les scientifiques qui tentaient de fournir des preuves sur cette question mĂȘme d’origine.

Peter Daszak : Eh bien, ce n’était pas notre tĂąche de savoir si la Chine avait dissimulĂ© la question de l’origine.

Lesley Stahl : Non, je sais. Ce que je dis, c’est que ça ne vous fait pas douter ?

Peter Daszak : Dans le travail que nous avons effectuĂ© en Chine, nous n’avons vu aucune preuve de fausses informations ou de dissimulations.

Lesley Stahl : Y avait-il des observateurs du gouvernement chinois dans la salle chaque fois qu’ils posaient des questions ?

Peter Daszak : Il y avait du personnel du ministĂšre des Affaires Ă©trangĂšres dans la salle pendant tout notre sĂ©jour. Sans aucun doute. Ils Ă©taient lĂ  pour s’assurer que tout se passait bien depuis la Chine.

Lesley Stahl : Ou pour s’assurer qu’ils ne lui ont pas dit toute la vĂ©ritĂ© et rien que la vĂ©rité 

Peter Daszak : Vous ĂȘtes assis dans une piĂšce avec des gens qui sont des scientifiques et vous savez ce qu’est une dĂ©claration scientifique et ce qu’est une dĂ©claration politique. Nous n’avons eu aucun problĂšme Ă  faire la distinction entre les deux.

En parlant de déclarations politiques


La gĂ©opolitique a planĂ© sur toute l’enquĂȘte avec un Ɠil pour Ɠil : PĂ©kin a dĂ©clarĂ© que le COVID-19 Ă©tait originaire des États-Unis ; l’administration Trump a accusĂ© la Chine de dissimulation.

Matt Pottinger : Il y avait un ordre direct de PĂ©kin de dĂ©truire tous les Ă©chantillons viraux
 et ils n’ont pas proposĂ© de partager les sĂ©quences gĂ©nĂ©tiques.

Matt Pottinger, alors conseiller adjoint Ă  la sĂ©curitĂ© nationale, citant des informations de renseignement dĂ©classifiĂ©es, a dĂ©clarĂ© que PĂ©kin avait Ă©galement dissimulĂ© que plusieurs chercheurs du laboratoire de Wuhan Ă©taient tombĂ©s malades avec des symptĂŽmes de type COVID et que l’armĂ©e chinoise travaillait avec le laboratoire.

Matt Pottinger : Il existe un corpus de recherches menĂ©es par l’armĂ©e chinoise en collaboration avec l’Institut de virologie de Wuhan, qui n’a pas Ă©tĂ© reconnu par le gouvernement chinois. Nous avons vu les donnĂ©es. J’ai personnellement vu les donnĂ©es.

Lesley Stahl : Pourquoi l’armĂ©e ? Pourquoi Ă©taient-ils dans ce laboratoire ?

Matt Pottinger : Nous ne savons pas. C’est un indice important qui doit ĂȘtre recherchĂ© par la presse, certainement par l’Organisation mondiale de la santĂ©. PĂ©kin n’est tout simplement pas intĂ©ressĂ© Ă  nous permettre de trouver les rĂ©ponses Ă  des questions aussi pertinentes.

Ce que le gouvernement amĂ©ricain sait, dit-il, c’est que le directeur du laboratoire de Wuhan a publiĂ© des Ă©tudes sur la manipulation des coronavirus de chauve-souris d’une maniĂšre qui pourrait ĂȘtre plus infectieuse pour les humains, et qu’il y a eu des rapports faisant Ă©tat de rĂ©glementations de sĂ©curitĂ© laxistes dans le laboratoire.

Matt Pottinger : Ils recherchaient spécifiquement les coronavirus qui se fixent aux récepteurs ACE2 dans les poumons humains, tout comme le virus COVID-19.

Lesley Stahl : Est-ce une arme fumante ?

Matt Pottinger : Non, ce sont des preuves circonstancielles. Mais c’est une balle assez puissante si l’on considĂšre que l’endroit oĂč cette pandĂ©mie est survenue Ă©tait Ă  quelques kilomĂštres de l’Institut de virologie de Wuhan.

Le manque de transparence a suscitĂ© de nombreuses critiques Ă  l’encontre de l’OMS pour avoir acceptĂ© les demandes de la Chine.

Matt Pottinger : La seule chose que j’aurais souhaitĂ© que l’OMS fasse est de prendre votre mĂ©gaphone et de commencer Ă  crier Ă  travers lui pour exiger que la Chine soit plus transparente, qu’elle ouvre sa frontiĂšre pour permettre aux responsables amĂ©ricains du CDC et d’autres experts de l’OMS. partout dans le monde, venez enquĂȘter et aider.

AprĂšs 15 mois et plus de 2,7 millions de dĂ©cĂšs dans le monde, l’équipe devait apporter des Ă©claircissements sur l’origine du COVID-19. Mais l’exercice se termine par plus de questions qu’il n’en a commencĂ©.

Produit par Richard Bonin. Productrice associĂ©e, Mirella Brussani. AssociĂ© Ă  l’émission, Wren Woodson. EditĂ© par Daniel J. Glucksman.


RĂ©daction francophone Infos Israel News pour l’actualitĂ© israĂ©lienne
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