Il y a un mois, nous avons rapportĂ© ici lâhistoire de Liby Giladi, 3 ans, qui attendait une greffe cardiaque Ă cĂŽtĂ© du garçon Ahmed Mahmoud Ali, qui a Ă©tĂ© hospitalisĂ© dans son service. Dans un douloureux coup du sort, elle a trouvĂ© un donneur : le garçon Fouad Mahamid, du mĂȘme Ăąge, qui a Ă©tĂ© tuĂ© dans un accident de voiture. Aujourdâhui le coeur de Fouad bat dans le cĆur de Liby, et cette semaine, leurs parents se sont rencontrĂ©s dans un moment trĂšs Ă©mouvant.
La mĂšre Bella (28 ans) et le pĂšre Benzi (26 ans) lui assurent quâils sortiront immĂ©diatement. Ils rangent le matĂ©riel dans le chariot, placent la bouteille dâeau dans le panier infĂ©rieur et respirent profondĂ©ment. Enfin, neuf mois aprĂšs quâelle a Ă©tĂ© enchaĂźnĂ©e Ă lâhĂŽpital, dĂ©pendante dâun cĆur artificiel, ils peuvent rĂ©ellement emmener Libby se promener. Seulement maintenant, aprĂšs avoir oscillĂ© entre la vie et la mort et avoir eu un besoin urgent dâune transplantation cardiaque, car Liby a reçu un autre cĆur.
Je les ai rencontrĂ©s pour la premiĂšre fois il y a environ deux mois, dans une interview pour un article paru dans le supplĂ©ment « Shishab » le 26 aoĂ»t. Jâai ensuite racontĂ© lâhistoire de Liby et Ahmed Mahmoud Ali (4 ans), deux enfants souriants pleins de joie de vivre qui ont Ă©tĂ© hospitalisĂ©s Ă Schneider, dĂ©pendants dâun cĆur externe. Les deux yeux de Libby, 3 ans, brillaient et son sourire fondait. Mais des tubes sortaient de sa poitrine reliĂ©s Ă un cĆur externe transportĂ© dans une valise, grĂące auquel elle vivait.
Le 2 septembre, une semaine aprĂšs la publication de lâarticle, la nouvelle passionnante est arrivĂ©e.
De lâautre cĂŽtĂ© de la grande joie se trouvaient la tristesse chez Majed et Samar Mahamid, les parents de Fouad qui a Ă©tĂ© mortellement blessĂ© dans un accident de voiture. Fouad avait aussi 3 ans, nĂ© deux semaines aprĂšs la naissance de Libby. Au bout de trois jours oĂč ils se sont battus pour sa vie Ă lâhĂŽpital Rambam de HaĂŻfa, ses parents ont rĂ©alisĂ© que ses chances de se rĂ©veiller Ă©taient Ă©puisĂ©es. Dans une dĂ©cision courageuse et noble, ils ont acceptĂ© de faire don de ses organes pour sauver dâautres enfants. Son foie a Ă©tĂ© transplantĂ© chez une fille de 4 ans, les reins chez un garçon de 15 ans et Liby a reçu le cĆur.
Les deux familles se sont rencontrĂ©s pour la premiĂšre fois Ă lâhopital Shneider. Remplis de peurs, le cĆur tremblant, la famille Mahamid du village de Yeaving Ă Bermat Menashe et la famille Giladi de JĂ©rusalem cherchent les mots justes pour remercier et chĂ©rir. Celle-ci veut rendre grĂące pour le cĆur grĂące auquel sa fille vit, et celle-ci veut chĂ©rir la fille avec qui bat le cĆur de leur fils.
Les hommes se serrent la main, puis sâembrassent. Les femmes sâembrassent. Bella leur tend une photo encadrĂ©e quâelle a faite, avec un dessin dâun cĆur dessus, dans une moitiĂ© une photo de Libby, et dans lâautre moitiĂ© une photo de Fouad. Deux qui ne font quâun. Silencieusement, les yeux larmoyants, Bella propose Ă Samar de placer sa main sur le cĆur battant dans la poitrine de Libby.
« Je nâarrive pas Ă y croire, câest vraiment son cĆur, » Summer laisse les larmes couler sur ses joues. Avec lâaide du Dr Ofer Schiller, mĂ©decin-chef de lâunitĂ© de chirurgie cardiaque et de soins intensifs cardiaques, elle et Majed Ă©coutent les battements du cĆur Ă lâaide dâun stĂ©thoscope. Et Libby, qui jusquâĂ ce moment Ă©tait agitĂ©e, se rend compte quâelle fait partie dâun moment Ă©mouvant, et sâabandonne Ă une respiration profonde. Son cĆur bat. Le cĆur de Fouad.
« Je lâai toujours appelĂ© Fuadi, mon cĆur en arabe », raconte Samer Bared. « Et voici son cĆur dans Libby (qui veut dire mon coeur en hĂ©breu). Câest vraiment une chose incroyable. Il nây a rien qui puisse nous rĂ©conforter plus que de savoir que Fuad a sauvĂ© une vie par sa mort. »
Deux familles, si diffĂ©rentes, qui se sont unies en un instant. Majed (33 ans) travaille dans un studio et une salle de sport Ă Yavea. Samar (32 ans) est entraĂźneuse de patinage artistique. Majed est fiĂšre que leur fille Kemer, 5 ans, ait Ă©galement Ă©tĂ© championne dâIsraĂ«l de patinage artistique pour son Ăąge.
Majed est issu dâune famille musulmane, sa femme dâune famille chrĂ©tienne. « Les enfants », souligne-t-il, « nous les avons Ă©levĂ©s pour ĂȘtre des ĂȘtres humains. Mon fils nâarrĂȘtait pas de nous dire : âJe ne suis pas un petit garçon, je serai un grand garçon et un hĂ©ros.â Un garçon heureux, qui a laissĂ© sa signature partout oĂč il allait. Ănergique, constamment en mouvement, comme un ressort. Tout le monde se souvenait de son sourire. Il a laissĂ© un grand trou dans le cĆur de chacun.
« Je rejoue tout et je pleure »
Le 15 aoĂ»t, alors que Liby Ă©tait encore hospitalisĂ©e et quâil semblait quâelle Ă©tait loin dâune greffe du cĆur, Fuad a fĂȘtĂ© son 3e anniversaire. Le lendemain, lui et sa famille sont partis en vacances dans le SinaĂŻ. Ils ont jouĂ© dans le sable, passĂ© du temps dans la mer, profitĂ© de chaque instant. Sur une photo prise sur le tĂ©lĂ©phone portable de Majed, on voit Fouad enlacer un dauphin, avec qui il a nagĂ© dans une piscine du SinaĂŻ. « CâĂ©tait dâabord mon ami », soupira Majed. « Samer travaille Ă lâentraĂźnement de lâĂ©quipe nationale lâaprĂšs-midi, donc Fouad et moi passons beaucoup de temps ensemble. »
Pendant trois jours, Fuad a oscillĂ© entre la vie et la mort Ă Rambam. Trois jours pendant lesquels ses parents, leurs amis et les membres de la famille du village sont restĂ©s Ă ses cĂŽtĂ©s dans le couloir. Lorsquâils ont vu que ses chances de se rĂ©veiller et de guĂ©rir Ă©taient minces, un parent de Majed, qui travaille comme mĂ©decin, a Ă©voquĂ© la possibilitĂ© dâun don dâorganes.
« Il mâa dit que Fouad souffrait dâun grave traumatisme crĂąnien, mais le corps Ă©tait normal et intact, et a Ă©voquĂ© lâidĂ©e de faire don de ses organes. Jusque-lĂ , je ne connaissais pas cette option. Jâai dit que jâĂ©tais en faveur de faire une mitsva et une bonne action, mais celle qui a pris la dĂ©cision finale Ă©tait Samar, la courageuse hĂ©roĂŻne. Je voulais faire un acte humain et dĂ©dier la mitsva Ă Fouad, qui se sentirait comme un hĂ©ros, mais je le savais quâelle serait sa dĂ©cision.
« Puis Samar mâa dit : âIci, la roue tourne, et je vais faire un don et faire lâacte le plus courageux du monde. JâespĂšre que les gens en tireront des leçons.â
« Celle qui nous tient maintenant est notre fille. Câest aussi une hĂ©roĂŻne. Nous lui avons racontĂ©, avec une assistante sociale et une psychologue, ce qui sâest passĂ©. Nous lâavons laissĂ©e dessiner, exprimer par lâart sa colĂšre et sa douleur, et elle apprend lentement Ă gĂ©rer les choses. Elle me demande des nouvelles de Fouad. Il y a quelques jours, elle mâa demandĂ© de lui raconter ce qui sâĂ©tait passĂ© dans lâaccident. Jâai avalĂ© la salive, je lui ai dit quâun chauffeur nâavait pas fait attention et il lâa percutĂ© . Je lui ai dit comme on pourrait le dire Ă une fille de 4 ans.
Samar : « Quand je me souviens de tout ce quâon a traversĂ©, je pleure. JâespĂ©rais que Fouad se lĂšverait, mais on est passĂ© par plusieurs Ă©tapes jusquâĂ ce quâon se rende compte que ça nâarriverait pas. Ă lâhĂŽpital, on nous prĂ©parait lentement Ă chaque Ă©tape .Pendant trois jours, ils ont pensĂ© quâils pourraient peut-ĂȘtre encore le stabiliser, mais quand ils se sont rendus compte quâil ne le ferait pas, et mâont Ă©voquĂ© lâidĂ©e du don dâorganes, jâai dit quâil nây avait pas besoin dây penser. Si mon fils peut sauver une vie, il nây a aucun doute ici.
Alex Tsurani, le coordinateur des dons dâorganes au Rambam, comprend que ce nâest pas une dĂ©cision simple. « Le noble accord de la famille Mahamid de faire don des organes de leur fils a sauvĂ© la vie dâautres enfants et adolescents, qui vont gagner une nouvelle vie grĂące Ă cela. Au Rambam, nous sommes Ă chaque fois Ă©mus par des familles nobles qui comprennent que lorsquâil sâagit de sauver des vies humaines, il nây a pas de limite rĂ©gionale ou dâaffiliation nationale ou sectaire, et tout le monde fait un don pour tout le monde en sachant quâen faisant cela, dâautres vies peuvent ĂȘtre sauvĂ©es. »
Tamar Ashkenazi, directrice du Centre national de transplantation : « Des rencontres comme celle-ci, de la famille des greffĂ©s et de la famille des donneurs, sont trĂšs Ă©mouvantes. Surtout, elles mettent lâaccent sur le facteur nĂ©cessaire Ă lâexistence dâune greffe â la gĂ©nĂ©rositĂ© de la famille du donneur. La camaraderie de la rĂ©union nous donne, Ă nous qui sommes impliquĂ©s dans la coordination des greffes, la justification de continuer Ă offrir aux familles le grand privilĂšge de donner des organes et de sauver des vies.
Le vendredi fatidique du 2 septembre, Bella est rentrĂ©e chez elle Ă JĂ©rusalem et Bentzi est restĂ©e Ă lâhĂŽpital avec Libby. Ă 23h50, Bella est partie chercher sa sĆur Yael Ă la maternelle, en route pour faire ses courses. Dans le bus, lâinfirmiĂšre du coordinateur de transplantation Schneider lâa appelĂ©e. « Jâai dĂ©jĂ lâhabitude de recevoir des appels tĂ©lĂ©phoniques de lâhĂŽpital, mais cette fois, lâinfirmiĂšre mâa dit : âMaman, respire profondĂ©ment, jâai un cĆur.â Jâai passĂ© une nuit trĂšs difficile de colĂšre et de douleur. Et lĂ , un jour plus tard, cet appel tĂ©lĂ©phonique arrive, comme si jâĂ©tais venu de la plus grande rupture Ă la meilleure chose. »
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Bella est arrivĂ©e Ă lâhĂŽpital Ă 14h00 et a couru au cinquiĂšme Ă©tage, Ă lâunitĂ© de soins intensifs cardiaques pĂ©diatriques. « Je lui ai dit : âLiby, on va enlever les tubesâ, et elle a dit quâelle ne voulait pas parce que ça faisait mal. Je lui ai expliquĂ© que câĂ©tait un nouveau cĆur. Je lui ai dit quâelle Ă©tait une hĂ©roĂŻne et un championne, et tout le dĂ©partement lĂ -bas Ă©tait extrĂȘmement excitĂ© et trĂšs heureux. Un rĂȘve qui est devenu rĂ©alitĂ© pour tout le monde. »
Ă 16h40, Liby est entrĂ© dans la salle dâopĂ©ration, toujours connectĂ© au cĆur externe. La greffe a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©e par le Dr Gabi Amir, chirurgien cardiaque senior et directeur de lâunitĂ© de chirurgie cardiaque nĂ©onatale Schneider, pendant environ 12 heures, ce nâest quâĂ 3 heures du matin, Ă la fin dâune opĂ©ration considĂ©rĂ©e comme complexe en raison de la besoin de se dĂ©connecter du cĆur extĂ©rieur et de se connecter au cĆur humain, que Liby est sorti avec le nouveau cĆur.
« Nous Ă©tions tous assis Ă lâextĂ©rieur de la salle dâopĂ©ration, avions un repas de Shabbat et attendions sans fin. Au milieu, jâai vu une valise qui Ă©tait arrivĂ©e de Rambam. Les mĂ©decins mâont expliquĂ© que câest un rĂ©frigĂ©rateur avec un cĆur Ă lâintĂ©rieur, et dĂšs quâils le connecteront aux vaisseaux sanguins de Liby, il commencera Ă battre. Jâavais lâimpression de faire renaĂźtre Liby »
Ă la fin de lâopĂ©ration,Liby a Ă©tĂ© connectĂ© Ă un appareil Acmo, qui active artificiellement le cĆur et les poumons, pour stabiliser son cĆur. Mardi, elle Ă©tait dĂ©jĂ sĂ©parĂ©e par lâappareil ACMO. Par petits pas, les uns aprĂšs les autres, son corps sâhabitue Ă vivre sans appareils, avec un cĆur qui bat tout seul.
Pendant neuf mois, Libby Ă©tait Ă lâhĂŽpital, en soins intensifs pĂ©diatriques, et maintenant le personnel lui a dit au revoir. « Son histoire dĂ©montre quâune combinaison dâune Ă©quipe professionnelle multidisciplinaire, lâutilisation intelligente des technologies modernes et la gĂ©nĂ©rositĂ© des parents de Fuad ont conduit au meilleur rĂ©sultat et lui ont sauvĂ© la vie », explique le Dr Schiller. « Nous espĂ©rons tous que les dons dâorganes, en particulier chez les enfants, augmentera. Au cours des derniĂšres annĂ©es, 14 tout-petits, enfants et adolescents ont Ă©tĂ© connectĂ©s Ă diffĂ©rents types de cĆurs artificiels Ă Schneider, la plupart dâentre eux ont subi une greffe de cĆur humain â et leurs vies ont Ă©tĂ© sauvĂ©es. » MĂȘme de nos jours, il convient de noter quâil existe deux enfants et deux adolescents en attente dâune greffe cardiaque Ă Schneider.
Dimanche de cette semaine, aprĂšs neuf mois dâhospitalisation, comme renaissant, Liby est rentrĂ© chez elle. Lorsquâelle lâa quittĂ©, en janvier, elle dormait encore dans un lit de camp. Maintenant, en lâhonneur de son retour, Bella lui a commandĂ© un lit dâenfant Ă sa taille. Dans un avenir proche, Libby devra se rendre Ă lâhĂŽpital chaque semaine, pour ĂȘtre surveillĂ©e par le Dr Amichai Rothstein, qui lâa soignĂ©e tout au long, et par lâĂ©quipe de transplantation de lâInstitut de cardiologie, qui est dirigĂ©e par le professeur Einat Birak. En mĂȘme temps, elle reçoit des mĂ©dicaments et des stĂ©roĂŻdes.
Mais maintenant, dans la cour de lâhĂŽpital Schneider, elle sâabandonne aux paroles aimables et aux bĂ©nĂ©dictions que lui ont prodiguĂ©es Jed et Samar. « Je ne cesse de dire Ă Liby quâelle a reçu le cĆur de Fuad. Quand elle sera grande et plus forte, elle saura le dire elle-mĂȘme et saura tout sur lâenfant grĂące Ă qui elle vit. Mais tout », promet Bella Lesser.
Benzi : « Jâattendais tellement cette rencontre. Sâil y a quelque chose que je peux citer comme le plus excitant, câest le lien entre les trois religions. MĂȘme sâil y a un si grand conflit, nous avons rĂ©ussi Ă atteindre une telle unitĂ©, ce qui mâĂ©tonne. DĂ©sormais nous sommes une famille. Une telle dĂ©cision est surhumaine Ă mes yeux, et elle a Ă©tĂ© prise Ă un moment oĂč la chose la plus prĂ©cieuse leur a Ă©tĂ© enlevĂ©. »
Samar et Majed disent quâils nâont jamais Ă©tĂ© dĂ©rangĂ©s par lâidĂ©e de savoir qui recevrait les organes de Fouad, ni Ă quelle religion il appartiendrait. « Nos enfants sont nos vies », dit Samar. « Et quand vous ĂȘtes avec votre enfant Ă lâhĂŽpital, vous voulez tout arrĂȘter pour le retenir, pour retenir votre vie. Quand vous nâavez plus le choix, vous voulez aider les autres â et peu importe Ă qui cette aide parvient.
« Quoi de mieux que de donner une autre vie Ă dâautres enfants ? Il nâa jamais Ă©tĂ© important pour moi de faire la diffĂ©rence entre les religions et les gens. Dans notre famille Ă©largie, nous avons des musulmans et des chrĂ©tiens et aussi des juifs maintenant »
Par Betchen Epstein Elias
RĂ©daction francophone Infos Israel News pour lâactualitĂ© israĂ©lienne
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