J’ai eu du mal à trouver des Arabes dans les pays arabes dénonçant le pogrom du 7 octobre en arabe. Mais le magazine français Le Point a publié cette condamnation sans équivoque des attentats par l’intellectuel musulman marocain Tahar Ben Jelloun, quelques jours après les attentats :
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» En tant qu’Arabe marocain et musulman de naissance, de culture et d’éducation traditionnelle, je ne trouve pas les mots pour dire à quel point je suis horrifié par ce que les militants du Hamas ont fait aux Juifs. La brutalité, lorsqu’elle s’attaque aux femmes et aux enfants, devient barbare et n’a aucune excuse ni justification.
Je suis horrifié car les images que j’ai vues m’ont touché au plus profond de mon humanité.
Je crois qu’on peut résister à une occupation, lutter contre la colonisation, mais pas avec ces actes d’une grande sauvagerie.
La cause palestinienne est morte le 7 octobre 2023, assassinée par des éléments fanatisés, embourbés dans une idéologie islamiste de la pire espèce.
Le Hamas est l’ennemi non seulement du peuple israélien, mais aussi du peuple palestinien. Un ennemi cruel et sans aucun sens politique, manipulé par un pays où de jeunes opposants sont pendus pour ne pas porter le voile sur la tête.
La prise d’otages et le chantage à leur exécution ne font qu’exacerber la colère de chacun d’entre nous.
Cette brutalité vient de loin. Certainement de l’occupation et des humiliations subies par une jeunesse sans avenir, rapidement reprise en main par un mouvement islamiste dépendant du bon vouloir de l’Iran.
Après le massacre, quel que soit le nombre de morts des deux côtés, la barbarie a imprégné notre imaginaire et il est difficile aujourd’hui de croire que ces hommes ont fait cela pour « libérer » un territoire. Non, la guerre se fait entre soldats. Pas en tuant des civils innocents.
Non, il n’y a aucune raison d’excuser ce qu’ils ont fait dans les maisons, dans les camps, partout où ils ont pu capturer des jeunes en train de faire la fête.
L’horreur est humaine, je veux dire que les animaux n’auraient jamais fait ce que le Hamas a fait. Un ministre du gouvernement de Netanyahu [le ministre israélien de la Défense Yoav Gallant] a qualifié les Gazaouis d’« animaux ». Non, il y a des hommes sans conscience, sans moralité, sans humanité qui ont perpétré les massacres, puis il y a une population qui souffre, qui n’est ni armée ni barbare.
Ne confondez pas le Hamas avec la population (2,5 millions de personnes) qui vit sous occupation et embargo.
Je le dis, mais ma voix est seule.
Moi, dans ma solitude, dans ma tristesse et ma honte d’être humain, mon dégoût de cette humanité à laquelle je refuse d’appartenir, je dis, non, c’est un combat qui ne fait pas honneur à leur cause. Non, à ces applaudissements dans certaines capitales arabes. Non, à ce triomphe sanglant sur les innocents. Non, à l’aveuglement de ceux qui tirent les ficelles d’une tragédie où, tôt ou tard, ce sera la population palestinienne qui paiera cette lourde facture.
Nous garderons cette tragédie dans notre mémoire comme une blessure faite à l’humanité toute entière. Une blessure jamais refermée, jamais oubliée.
Le quotidien marocain Hespress a écrit que d’autres intellectuels marocains étaient « presque unanimes » pour dénoncer Ben Jelloun.
L’écrivain marocain Aziz Lazraq a déclaré que cet article était rempli de « déclarations hâtives et émotionnelles qui ne font pas partie de son langage ou de sa nature, et dénuées de tout sens ».
Un autre écrivain, Montaser Hamadeh, a accusé Ben Jalloun d’adopter la position française à l’égard d’Israël au lieu de celle du Maroc.
Lui et l’écrivain Abdel Samad Belkabir ont expliqué que Ben Jallun manquait de « contexte » approprié pour condamner le Hamas sans voir que tout est réellement de la faute d’Israël, et que les meurtres, les enlèvements et les viols du Hamas ne sont que de simples « erreurs ».