Le siècle dernier incarnait le grand amour de l’avenir. Cent ans de nettoyage intrépide de printemps sous le cri retentissant « adieu au vieux/désuet, bonjour au nouveau/progrès ». Tout le monde était progressiste. Rêver à l’avenir était l’unique aspiration commune aux guerriers de la Seconde Guerre Mondiale. Le Reich de mille ans, les États-Unis et le communisme culminèrent en une hécatombe pour l’amour d’un avenir merveilleux. Les Allemands mouraient en masse pour un super-état nazi érigé sur les tours monstrueuses de Babel d’Albert Speer – renouveau technocratique du projet de construction du château du roi Ludwig II de Bavière. Les Russes s’entretuaient pour l’agriculture collective et les affiches inspiratrices de travailleurs sinistres, binant la terre et électrolysant la campagne. Tous les autres trépassèrent sur leur voie d’une vision comme d’une autre.

Puis, vint le sacrifice pour une l’Europe unifiée et une Organisation des Nations Unies qui paveraient la voie à un monde meilleur. Le monde de demain aura connu de bien meilleurs jours. L’Occident est toujours épris de l’avenir. Si vous doutez, arrêtez-vous devant une boutique d’Apple et admirez ses façades reluisantes.

Le slogan sur lequel Obama mise pour décrocher les quatre prochaines années est « le Progrès », formule par excellence des progressistes. Ces avant-gardistes veulent refaire le 21ème siècle conformément à leurs idées du 19ème siècle. Le progressisme, comme tant d’autres saveurs du futurisme, est si nouveau qu’il est vieux. C’est le monde de demain remodelé par des hommes affublés de chapeaux haut de forme et d’une barbe entière. Les étendards des descendants du Twitter, nous exhortent à « progresser » 150 ans plus tard.

N’essayez surtout pas de prêter attention à l’esthétique qui est rétro-futuriste, car même notre avenir est déjà devenu notre passé. Quarante ans après la tentative d’atterrissage d’un robot de l’Union Soviétique sur Mars, les USA positionnaient leur robot beaucoup plus impressionnant et sophistiqué sur l’astre rouge. Possible que l’Amérique ne soit pas en mesure de rejoindre l’ISS (Internationale Space Station), sans devoir chevaucher une Soyouz soviétique. Les sections de la Nasa inaptes à prouver que la science et la technologie consument la planète terre par le réchauffement climatique, peuvent encore réaliser un triomphe de l’ingénierie occasionnelle.

Mais l’avenir n’est pas une place ; c’est un état d’esprit. Il s’agit d’une foi fervente en l’inéluctabilité du progrès humain. Des hommes sont morts pour cette foi, et continuent de mourir pour elle. Le décapsuleur des olympiques anglaises célébrait le chemin se faufilant entre la révolution industrielle jusqu’au lit d’euthanasie des services de santé britanniques. Alors que le capitalisme assassinait accidentellement et inconsciemment les travailleurs, l’état progressif les tue scientifiquement et méthodiquement.

Les vieilles usines peuvent tuer leurs travailleurs simplement en lâchant une charge sur leurs têtes ou bien en les laissant inhaler des vapeurs qui rétrospectivement se révèlent toxiques. Mais il faut une véritable tournure d’esprit progressive pour laisser ces mourants croupir dans leurs lits trois jours, mendiant un verre d’eau, puisque selon la belle terminaison nazie, ils vivent une «vie indigne d’être vécue = lebensunwertes Leben». C’est le progrès qui se profile sous le nom du navire spatial sans équipage Soyouz, qui empêche les astronautes américains de mourir de faim ou de soif sur l’ISS.

Les nazis et les communistes croyaient que certaines races et classes devraient être éliminées pour rendre l’avenir propice. Nous, les modernistes qui communiquent à travers des cadrans brillants de plastique blanc et noir, utilisent le drapeau des Nations Unies comme fond de scène et la chanson de John Lennon «Imagine» comme voix vibrante, ne croyons pas en la barbarie !!! En guise, nous tuons les trop vieux et trop malades qui nécessitent des services médicaux perpétuellement en carence dans un système collectif de santé.

Nous avons combattus la première et seconde guerre mondiale pour des ambitions régionales, mais sommes allés bien au-delà. Nos scientistes peuvent mesurer chaque atome de carbone dans l’atmosphère et revendiquer la responsabilité à tout individu. «Qui a mesuré les eaux dans le creux de sa main, divisé les cieux par le temps, estimé la quantité de poussière terrestre, pesé les montagnes sur des bascules et les collines à la balance ? » Interroge la prophétie de Yeshayah – ces domaines là échouent à notre responsabilité à présent.

Quand nos institutions modernes n’affament pas à mort les ouvriers en retraite dans leurs lits souillés d’hôpital, elles rationnent l’eau et l’air, la terre et le ciel. Elles nous avertissent de la pénurie d’icebergs, de sol et de marécages. Notre rationnement est devenu planétaire. Nous emprisonnons des hommes pour avoir osé occuper des zones humides et pour accélérer le réchauffement de notre planète. L’état du monde collectiviste ne permet pas au moineau de tomber sans en incriminer un chasseur sans permis.

Leur prise de possession de la planète est peut être un peu prématurée. A l’extérieur de quelques enclaves où prédominent encore le doux et le glabre, les barbares sont aux portes de l’empire de demain. Tandis que l’Occident est encore amoureux de l’avenir, même si c’est un avenir rationné où chacun à droit à une dinde de tofu dans son four micro-ondes et un projet de loi fiscale exorbitant pour payer l’empreinte carbone de la dinde tofu, le reste du monde est amoureux de son passé.

Sitôt que les foules s’étaient amassées au Caire, Tunis et Damas, les analystes occidentaux de politique étrangère commencèrent à dépoussiérer leurs livres d’histoire pour procéder à des analogies avec les révolutions européennes de 1848. Mais il n’y a rien de moderne à ces révolutions même si elles s’appuient sur des attroupements de foules de Twitter et de Facebook. Ce n’est pas l’avenir que le monde musulman brigue, même si des Albert Speer modernes encombrent Dubaï avec leur architecture futuriste à vomir – c’est le passé doré qu’ils cherchent à ressusciter. 

En Tunisie, berceau du printemps arabe, Hamad Jebali, le nouveau premier ministre islamiste de Tunisie, proclamait : « Mes frères, vous assistez à un moment historique dans un nouveau cycle de la civilisation, si Dieu le veut, nous vivons le sixième califat. »

Pour les islamistes, héritiers du printemps arabe et leurs partisans enthousiastes, l’avenir est le passé, un retour aux gloires du califat et son harem, à une époque où les chrétiens et les juifs dhimmis étaient conscients de leur emplacement et l’empire islamique s’étendait à travers le monde.

 

Rappelons ici que le printemps arabe avait démarré lorsqu’un musulman battu par une femme, s’était senti si intolérablement humilié qu’il s’immola par le feu. Cet acte culmina en viols collectifs de femmes et en la montée fulgurante des Frères musulmans au pouvoir. Révolution initiée par un homme humilié aboutissant à l’humiliation sexuelle rituelle des femmes par des révolutionnaires et par un régime visant la restauration du vieil ordre patriarcale des imams islamistes et néo-califes. Tant pis pour l’avenir et pour le monde de demain où tous les hommes étaient frères, pourvu qu’ils puissent battre leurs sœurs aussi longtemps qu’ils le souhaitent.

Les libéraux occidentaux prétendent encore que Califat est l’appellation à reculons des nations unies, mais leur foi en l’avenir progressif sans nations, frontières et liberté, ne peut perdurer à travers les petites annonces Benetton et les séries burlesques multiculturelles. Hors de leurs enclaves, l’avenir ne ressemble en rien à leur vision. Bien qu’ils réussissent à morceler les atomes du carbone du pôle Nord, leurs capitales sont fragmentées en parcelles tribales où l’avenir ressemble comme un frère jumeau au passé du Caire ou de Tunis.

Notre avenir actuel est défini par un désordre excédent de violence. Dans les affres de la révolution égyptienne, les tribus bédouines du Sinaï revendiquent avec férocité leurs droits et les Kurdes se soulèvent en Syrie. Comme lors de la chute des tsars et de la dévolution du pouvoir de l’Empire austro-hongrois, des portions considérables de la Russie et de l’Europe de l’est plongeaient dans le chaos – chaos rageur qui se répéta plusieurs décennies plus tard, avec la percée des nazis vers le Reich de mille ans. La chute des derniers états musulmans modernes du Moyen-Orient inaugurait l’intrépide chaos du banditisme, tribalisme et terrorisme.

Pour l’instant, l’Occident patauge dans ce chaos qui le contraint à entretenir un état policier, une armée militaire massive et d’inégalables dépenses en aide sociale excédant tous les plafonds. C’est loin de ressembler à ce que les progressistes modernes insistent à nous faire croire – que la cause est le prolongement de la vie de l’homme – mais plutôt le fruit avarié d’une instabilité intérieure où s’enracinent la violence tribale et le chaos culturel, sans euthanasie aucune et sur un air de Paul McCartney, qui, contrairement à John peut encore prétendre qu’il n’y a pas de ciel, seule une terre où si votre maladie coute trop cher, on cesse de vous nourrir.

Mais les architectes de notre avenir refusent de voir le présent pour ne pas effaroucher l’avenir. Ils ne se rendent pas compte que le présent est devenu le passé. Dans les mosquées urbaines, ce n’est pas à la reine infidèle ou à la république que l’allégeance est due, mais au calife, au Mahdi et aux martyrs qui donnent leur vie dans des orgies de mort, afin que la roue du temps puisse faire marche arrière et qu’hier puisse remplacer demain.

Leur culture originale est tout autant décadente. En art et littérature, cinéma et mode, l’actuel ressemble à s’y méprendre à l’ancien. Les deux plus grands films d’été se basent sur des personnages de 1939 et 1963. Arrêtez-vous à Broadway et vous pouvez choisir entre une comédie musicale basée sur Abba, un film de Disney âgé de vingt ans, et des comédies musicales fondées sur des films des vingt dernières années. Nous faisons de nouvelles versions avec la langue collée à la joue pour nous prouver que notre culture n’est pas en faillite, que nous sommes seulement les connaisseurs ironiques du passé.

Les sites libéraux dénoncent les années 1950 dans un format rétro minutieusement conçu pour donner l’impression qu’ils existent depuis les années 1950. Marques de vêtements destinées aux jeunes visent ce même regard rétro. Hollister, la marque populaire d’Abercrombie et Fitch se rattache à 1922. L’uniforme américain s’enracine dans les années 70. Rien n’est moderne car sans modernisme, seuls des brins d’appropriation culturelle pour donner au rétro une saveur plus exotique.

Le progressiste ricane sur le passé, mais ne peut lui échapper. Quelle que soit l’énergie créatrice, l’agression déclenchée contre la culture a perdu sa force depuis longtemps. Il n’a rien de nouveau à offrir, sinon que le rationnement de l’ancien. Notre technocratie a fait de nous des communicateurs sophistiqués, même si nous n’avons rien de nouveau à dire. Institutionnellement, nous récoltons et manions des quantités massives de données que nous utilisons pour manipuler les gens. Nous applaudissons très fort pour l’atterrissage de curiosité sur Mars parce que cela fait un sacré bout de temps que notre culture n’a rien fait de remarquable. Même si ce n’est vraiment pas nouveau, pour nous ça l’est.

 

Il n’existe pas de monde de demain, car il n’y a pas de demain. Une culture en décomposition n’a pas d’avenir. Seule une stagnation facilement rompue par des ennemis internes et externes. Pour avoir un avenir, nous devons avoir une culture et pour cela nous devons reconstruire une identité en relevant des défis. Nous pouvons découvrir qui nous sommes à travers ce que nous pouvons faire. Ce n’est pas le futurisme qui fait l’avenir, mais un peuple qui s’efforce de faire quelque chose parce qu’il croit que l’avenir vaut la peine.

Le grand projet progressiste de l’avenir pue le pourri soufflant de l’Atlantique. C’est un rêve informe mort, un futur sans avenir. C’est un million de conférences et un milliard de lois. C’est un monde où tout se sait, où chaque atome est pesé et chaque homme est pris en défaut. C’est une chambre close et un lit blanc sur lequel on s’étend et meure pendant que des machines égrènent les secondes.

 

Si nous voulons avoir un avenir, il n’émergera pas de ces endroits. Ce ne seront pas les villes ou la conférence éternelle. Ce ne seront pas des hommes et des femmes qui s’attitrent les maîtres de la terre et de tout vivant en son sein. Il émergera plutôt de ceux qui défient le délabrement, qui font face au chaos engendré par le programme progressiste, qui s’accrochent à leurs maisons et à leurs entreprises et se battent pour leurs rêves.

 

(Inspiré de l’étude de Daniel Greenfield)

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