Triste époque que nous vivons quand certains, se disant h’assidim (« charitables/ généreux/ pieux »), négligent le commentaire de Rachi (qui – sur Berakhoth 18b – insiste sur la valeur des devoirs que l’on rend aux morts) et se réjouissent ouvertement du décès du Rav Ovadia Yossef (zt”l).
Pendant tout un temps, l’interprétation de la Halakha par les adeptes de l’Admor de Satmar et des Nétourei Karta, concernant le Retour de notre peuple en Eretz Israël, m’a laissé froid. Certes ! En considérant le sionisme – tant laïc que « religieux » – comme « pire que toutes les fautes et perversions du monde », ils manquaient non seulement – si j’ose écrire – de derekh Eretz (« savoir-vivre juif», littéralement « chemin de la terre ») mais aussi, singulièrement, d’Ahavath Eretz Israël (« Amour de la Terre d’Israël »), d’Ahavath Am Israël (« Amour du Peuple Juif »), et leur Ahavath Torath Israël (« Amour de la Torah d’Israël ») – au vu de ce que m’ont enseigné mes Maîtres – me semblait, pour le moins, disons… « très restrictif ». Mais bon, me disais-je « Ceci et cela, ce sont les paroles du D-ieu vivant » (Massekheth Erouvim, 13a). Pourtant, je me suis peu à peu aperçu qu’ils versaient dans la faute qui nous a valu la chute du deuxième Beit Hamikdach (« Temple ») : la sinath h’inam (« haine sans raison »).
Si le fait que l’un des dirigeants des Nétourei Karta (« Les gardiens de la cité ») soit, jadis, devenu le « Ministre des Affaires Etrangères » (sic !) du « terroriste-en-chef, retraité des villes de Beyrouth et de Tripoli (Liban ) » (Que son nom et son souvenir disparaissent à jamais de dessous les Cieux !) et qu’il demandait à Hussein de Jordanie l’autorisation d’aller prier au Kotel (« Mur »), déjà sous souveraineté israélienne, prêtait plus à en rire (jaune) qu’à en pleurer, le geste de ses séides consistant à apporter leur soutien et leur présence physique aux côtés du nabot iranien – et aussi à ceux d’autres Amalèkites actuels – constituait un hiloul Hachèm (« profanation du Nom ») flagrant ! Mais, depuis peu, des h’assidim de Satmar (On ne sait plus très bien lequel, ses proches se voulant chacun son seul héritier spirituel !) se sont joints pleinement à la danse du Veau d’Or, exercice ressemblant à une érèv rav party (jeu de mot intraduisible sans longues explications linguistiques). On en a vus, par exemple, agresser une gamine juive de huit ans sous prétexte que ses manches n’étaient pas assez longues à leur goût et on les a vus aussi, amenés en cars/trains/avions par milliers à Bruxelles, brandissant des calicots de pur lachon hara (« mauvaise langue ») prétendant que l’Etat d’Israël discriminait les juifs, demandant à la Commission européenne (donc à des non-Juifs) de prendre des sanctions contre l’Etat d’Israël (donc à l’encontre de leurs frères juifs), sous prétexte que cet Etat Juif voulait forcer les étudiants Israéliens de Yéchivoth à participer, dans Tsahal, à la défense du pays (Entendez, ce faisant et en raison d’une diminution d’élèves, « de réduire les subsides versés à leurs écoles Talmudiques » !)… et ce, bien que la Torah soit très claire quant à l’obligation pour tous (sauf à de rares exceptions bien définies) de partager le fardeau militaire : « Quoi ! dit Moché Rabbénou. Vos frères iraient au combat et vous resteriez ici ! Pourquoi voulez-vous décourager le cœur des enfants d’Israël de passer au pays que leur a donné Hachèm ? Ainsi firent vos pères lorsque je les ai envoyés de Kadèch-Barnéa pour explorer le pays » (Bamidbar XXXII, 6-9). Puis, le plus grand des prophètes poursuit sa diatribe en disant aux solliciteurs ce qui est arrivé quarante ans plus tôt lorsque les explorateurs furent envoyés à Canaan et comment Hachèm a puni le peuple : « Et maintenant engeance de pécheurs, conclut-il, vous vous insurgez à la suite de vos pères pour ajouter encore à la colère de Hachèm contre Israël : si vous vous détournez de Lui, Il vous laissera tous dans le désert et vous aurez fait le malheur de tout ce peuple » (Bamidbar XXXII, 14-15).
Loin de moi l’idée de « mépriser leurs Sages » (Zilzoul talmid h’akham) : c’est justement parce que j’ai le plus grand respect pour leur savoir que j’exprime ma stupeur et ma douleur au vu du chemin où ils s’égarent et égarent leurs disciples ! Car, comme le souligne le Rabbi de Bratslav : « Détourner l’ensemble du genre humain des chemins de la rectitude n’est pas chose aisée pour les forces du mal. Alors, que font-elles ? Elles placent une célébrité religieuse par-ci, une autre par-là ! ». En effet, « un grand Sage peut parfaitement être un décisionnaire de première ligne, pour ce qui est des sujets du judaïsme, tout en étant relativement inexpert en “la science du peuple sur sa terre” » (Rav Chlomo Aviner – « Le Retour », 1993, Editions Eliner, O.S.M.). Lors de leur manifestation sous les fenêtres du Parlement européen à Bruxelles, me basant sur Vaykra XIX, 17 (« Tu ne haïras pas ton frère dans ton cœur. Tu réprimanderas ton prochain et ne porteras pas de faute pour lui »), je me suis donc permis d’interrompre leurs rabbanim dès le début de leurs discours (Je voulais d’abord écouter leurs arguments mais, comme tout n’était qu’en Yiddish…) pour souligner (En hébreu, pour ne pas que les goyim comprennent !) toute l’erreur – « l’horreur » – de leur action. Ils ont refusé le dialogue et ont préféré me faire partir par la police. Oh, bien sûr ! Je n’ai pas respecté les trois conditions décrites par le Talmud Bavli (Traité Arakhin, 16b), à savoir : « Celui qui réprimande doit lui-même être irréprochable », ce que je suis loin, très loin, d’être ; « Il faut que son interlocuteur soit psychologiquement prêt à l’entendre », ce qui n’était clairement pas le cas ; « Il faut que l’on y mette des gants », ce qui n’est malheureusement pas dans mon caractère quand on met ne fut-ce qu’un seul juif en danger. Mais j’étais – devant les banderoles mensongères exposées face à tous les passants, les tracts (en anglais) de même nature qui leur étaient distribués par des enfants – animé par l’Ahavath Am Israël que j’éprouve pour tout notre peuple (eux compris) et, pour l’Amour de Sion, je n’ai pas pu me taire.
Cela me rappelle un commentaire du Baal-Chem-Tov. Un des oiseaux prohibés est la cigogne qui, en hébreu, se dit h’assida (« l’aimante/ la pieuse », termes d’où est aussi issu le nom de h’assidouth !). Rachi justifie ce nom en expliquant que « la cigogne agit avec bonté avec ses congénères » (Rachi sur Dvarim XIV, 18) et, évidemment, on n’a pas manqué de se demander pourquoi un animal qui porte un nom si beau est considéré comme tamé (« impur » mais… traduction approximative). Le fondateur du h’assidisme explique : « C’est précisément parce qu’elle ne fait du bien qu’à ses congénères ! » Ah ! Si les Sages des Netourei Karta et des Satmar pouvaient rappeler à leurs élèves que le Loulav est passoul (« impropre/invalide ») s’il ne comporte les quatre espèces réunies, symboles des différentes sortes de Juifs… laïcs inclus ; s’ils pouvaient se pencher plus pleinement sur les mots de la prière de Minh’ath Shabbath « Tu es Un, Ton nom est Un ! Et qui est, comme Ton peuple Israël, peuple-Un sur la terre !? » ; s’ils pouvaient dialoguer sans se renfermer dans leur paradis artificiel galouthique… Peut-être, alors, hâteraient-ils la venue du Machiah’ !?
Mais veulent-ils vraiment hâter celle-ci ? Se cramponnant sur un commentaire d’une seule ligne des deux mille pages du Talmud Bavli (Rabbi Yéhouda s’y réfère au verset du Chir Hachirim – « Cantique des Cantiques, II, 7 » – « Je vous en conjure, filles de Jérusalem…, n’éveillez pas, ne provoquez pas l’amour avant qu’Il ne le veuille », commentaire considéré par le Rambam – dans son Epître aux juifs du Yémen – tout au plus comme un machal, c’est-à-dire une « parabole », et par la plupart des décisionnaires comme n’ayant pas force de « loi » – halakha*), ils brandissent « Les Trois Serments » comme un « Sans Domicile Fixe » brandirait sa condamnation pour vagabondage afin d’éviter sa libération anticipée et de rester en prison en y profitant d’un confort relatif ! Libre à eux (Quoique…) de refuser de sortir de leur cellule, sous prétexte que la porte n’a pas été ouverte par le Roi lui-même, mais qu’ils n’exigent pas d’avoir pour compagnons de misère toute leur famille, qu’ils n’accusent pas de crime de lèse-Majesté ceux qui ont préféré retourner chez eux avec l’approbation des geôliers.
…Et, surtout, qu’ils ne fassent pas la fête parce que l’âme d’un des plus grands Sages de notre génération, a quitté notre monde de l’Action ! « Abtalion disait : Que les sages prennent garde à leurs paroles afin de n’être pas exilés en un lieu d’eaux mauvaises, et leurs disciples qui les suivent en boiraient et mourraient… » (Traité talmudique Abboth I, 11).
Par Yéh’ezkel Ben Avraham pour Alyaexpress-News
* Nous reviendrons en détail sur ce commentaire, d’où découlent « Les Trois Serments » (1.- Qu’Israël ne devrait pas monter en muraille – Rachi interprète : avec force ; 2.- Le Saint-béni-soit-Il a fait jurer à Israël de ne pas se rebeller contre les Nations ; 3.- Le Saint-béni-soit-Il a fait jurer aux Nations de ne pas opprimer Israël trop durement.) et ses interprétations, dans un prochain article !