Zelensky annonce la reprise des relations diplomatiques avec la Syrie : un tournant inattendu au cƓur de l’ONU

Lors de l’AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des Nations unies Ă  New York, le prĂ©sident ukrainien Volodymyr Zelensky a créé la surprise en annonçant la reprise des relations diplomatiques entre l’Ukraine et la Syrie. « J’ai rencontrĂ© le prĂ©sident syrien Ahmad al-Sharaa. Nous avons convenu de rĂ©tablir nos liens diplomatiques », a dĂ©clarĂ© Zelensky devant la presse internationale, citant un geste de « pragmatisme et de responsabilitĂ© partagĂ©e dans un monde en crise ».

L’annonce a immĂ©diatement suscitĂ© des rĂ©actions contrastĂ©es. D’un cĂŽtĂ©, certains y voient un coup diplomatique audacieux du chef d’État ukrainien, soucieux de ne pas laisser la Russie monopoliser le dossier syrien au Moyen-Orient. De l’autre, des observateurs dĂ©noncent une manƓuvre risquĂ©e, tant Damas reste Ă©troitement alliĂ©e Ă  Moscou et Ă  TĂ©hĂ©ran.

Une rupture consommée depuis 2022

Pour comprendre l’ampleur de cette dĂ©cision, il faut rappeler que l’Ukraine avait rompu ses relations diplomatiques avec la Syrie en juin 2022. À l’époque, Damas avait Ă©tĂ© l’un des rares rĂ©gimes Ă  reconnaĂźtre l’« indĂ©pendance » des territoires ukrainiens occupĂ©s par la Russie dans le Donbass, alignant ainsi sa diplomatie sur celle du Kremlin. En rĂ©action, Kiev avait immĂ©diatement annoncĂ© la fermeture de son ambassade et la rupture des liens officiels.

Pendant plus de deux ans, les deux pays ne communiquaient que par des canaux informels, souvent via des mĂ©diateurs tiers au sein des Nations unies. La reprise de relations annoncĂ©e par Zelensky marque donc un revirement majeur. Selon des sources diplomatiques citĂ©es par l’agence Reuters, l’accord aurait Ă©tĂ© facilitĂ© par des intermĂ©diaires arabes, notamment des reprĂ©sentants des Émirats arabes unis et du Qatar, soucieux de rĂ©insĂ©rer la Syrie dans un jeu rĂ©gional plus Ă©quilibrĂ©.

Une rencontre hautement symbolique

La rencontre entre Zelensky et Ahmad al-Sharaa – qui a succĂ©dĂ© Ă  Bachar el-Assad dans le cadre d’une transition politique encore fragile – revĂȘt une forte portĂ©e symbolique. Les deux dirigeants se sont entretenus en marge de l’AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale, avant de poser ensemble pour une photo officielle, un geste qui marque la fin d’une longue pĂ©riode de gel diplomatique.

« Nous avons beaucoup de divergences, mais aussi des responsabilitĂ©s communes », a expliquĂ© Zelensky. « Le monde ne peut pas se permettre de nouvelles divisions alors que la guerre en Europe se poursuit et que le Moyen-Orient reste instable. » Le prĂ©sident ukrainien a aussi insistĂ© sur la nĂ©cessitĂ© de « crĂ©er des canaux de dialogue, mĂȘme avec ceux qui hier semblaient trop proches de Moscou ».

Kiev joue une carte moyen-orientale

Pour l’Ukraine, ce rapprochement a plusieurs objectifs. D’abord, il s’agit de couper court Ă  l’influence exclusive de la Russie en Syrie. Depuis 2015, l’armĂ©e russe est dĂ©ployĂ©e massivement sur le sol syrien, soutenant le rĂ©gime contre ses opposants. En renouant avec Damas, Zelensky espĂšre ouvrir une brĂšche dans ce partenariat stratĂ©gique.

Ensuite, Kiev cherche Ă  Ă©largir son rĂ©seau d’alliĂ©s au Moyen-Orient. La diplomatie ukrainienne multiplie les ouvertures vers les pays arabes et musulmans, notamment depuis l’invasion russe de fĂ©vrier 2022. En accueillant la Syrie dans ce cercle, mĂȘme timidement, Zelensky veut montrer que son pays n’est pas isolĂ© hors du bloc occidental.

Enfin, cette reprise pourrait avoir un volet Ă©conomique. La Syrie, bien que ruinĂ©e par plus d’une dĂ©cennie de guerre, cherche Ă  attirer des partenaires pour sa reconstruction. L’Ukraine, de son cĂŽtĂ©, pourrait y voir une opportunitĂ© d’exporter son savoir-faire dans les domaines agricoles et Ă©nergĂ©tiques, notamment via des accords triangulaires financĂ©s par des pays du Golfe.

Des risques et des critiques

Mais cette ouverture n’est pas sans danger. Nombre d’alliĂ©s de Kiev, notamment en Europe, restent profondĂ©ment hostiles au rĂ©gime syrien. Les accusations de crimes de guerre et de violations massives des droits humains continuent de peser lourdement sur Damas.

Certains diplomates occidentaux redoutent que Zelensky donne une lĂ©gitimitĂ© Ă  un rĂ©gime encore sous sanctions internationales. « C’est un pas trop prĂ©cipitĂ© », a confiĂ© un responsable europĂ©en sous couvert d’anonymat. « La Syrie reste alignĂ©e sur Moscou et TĂ©hĂ©ran. Rien ne garantit qu’elle ne trahira pas Ă  nouveau l’Ukraine. »

En IsraĂ«l, oĂč la prĂ©sence militaire iranienne en Syrie est une menace permanente, la nouvelle a Ă©galement Ă©tĂ© accueillie avec prudence. Des commentateurs soulignent que ce rapprochement pourrait indirectement renforcer l’influence iranienne si Damas tente de jouer sur plusieurs tableaux Ă  la fois.

Un coup de projecteur sur l’ONU

Au-delĂ  du contenu diplomatique, l’annonce de Zelensky a aussi permis au prĂ©sident ukrainien de dĂ©tourner l’attention mĂ©diatique lors d’une AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale dominĂ©e par les dĂ©bats sur Gaza, l’Iran et le climat. Par ce geste inattendu, il a rappelĂ© que la guerre en Ukraine n’est pas oubliĂ©e et que son pays entend rester actif sur tous les fronts, y compris dans un espace aussi complexe que le Moyen-Orient.

Il s’agit aussi d’un message indirect Ă  Moscou. En normalisant ses relations avec un alliĂ© traditionnel de la Russie, Kiev envoie un signal : l’influence du Kremlin n’est pas intouchable, mĂȘme au Levant. Reste Ă  savoir si ce rapprochement restera symbolique ou s’il dĂ©bouchera sur une vĂ©ritable coopĂ©ration.

Conclusion : un pari diplomatique

En choisissant de tendre la main à la Syrie, Zelensky surprend, dérange et intrigue. Ce geste, qui aurait semblé inimaginable il y a encore quelques mois, montre à quel point la diplomatie ukrainienne cherche à sortir des sentiers battus. Mais il comporte aussi un risque majeur : celui de brouiller le front uni de ses soutiens occidentaux.

Ce pari audacieux pourrait soit ouvrir une nouvelle Ăšre d’alliances pour l’Ukraine, soit se rĂ©vĂ©ler une impasse diplomatique. Dans un monde fragmentĂ©, oĂč chaque geste est scrutĂ© par Moscou, TĂ©hĂ©ran, Washington et Bruxelles, la reprise des relations avec Damas devient bien plus qu’un simple acte protocolaire : c’est une piĂšce supplĂ©mentaire sur l’échiquier gĂ©opolitique global.


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